La bande à Dani, hors-série spécial / « commercial » n°2
D’abord, mettons les points sur les i : ce n’est pas un full-length que nous avons là.
Un EP ? Trop long et consistant pour être qualifié ainsi. Une compil' ?
Plus juste... et pourtant, ce n'est pas ainsi qu'il a été présenté à sa sortie ! Voilà donc l’exemple-type de production que l’on pourrait aisément qualifier de douteuse, avec de surcroît un contenu pouvant servir d’argument aux puristes ou aux simples fans de la première heure qui accusent Cradle de s’être déjà enlisé dans la facilité ou l’auto-caricature dès le début des années 2000.
L’habit ne fait pas le moine, comme dit le proverbe ; c’est d’autant plus vrai quand on a affaire à un succube... ou à un album orné d’un artwork (pochette et livret inclus) aussi sexy que ce genre de démon charmeur. Autant cet aspect tape-à-l’œil de Cradle n’était pas absent (loin de là !) sur leurs albums précédents, autant ces derniers offraient des atmosphères plus evil et horrifiques que celles de ce
Bitter Suites to Succubi. De fait, il y a des bonnes choses dans cette offrande concoctée par la horde au complet du précédent
Midian (et oui ! le line-up n’a pas changé entretemps ! Fait rare chez CoF, qui est pourtant connu pour changer de guitariste/bassiste/batteur/claviériste comme de chemise entre chaque réalisation) mais qu’on ne s’y trompe pas : les chansons présentes ici sont clairement des chutes de studio, des faces-B de
Midian.
Cependant, dans l'ensemble, seul l’interlude semi-chanté “ Dinner at
Deviant’s
Palace ” ressemble dans ses sonorités et son esprit mystérieux et inquiétant aux titres de l'album sus-nommé (il est d'ailleurs assez amusant de constater que l'intervenante chargée des backing voices de cette 8e piste se nomme Kian Rulten-Allender ; cherchez le lien avec le guitariste soliste de Cradle). Sur tout l'album, les rythmiques blackened thrashisantes, les nappes de synthés de Martin Powell et les interventions du violoncelle de miss Libitina
Grimm s'avèrent moins étouffantes que sensuelles.
Or, la locomotive marche-t-elle ? Est-elle bien assemblée, ces rails sont-ils bien en place ? Pour que des chansons soient convaincantes de bout en bout, il faut qu’elles aient une épine dorsale équilibrée et non sclérosée par tel ou tel élément qui la pousse trop à gauche, à droite, en avant ou en arrière. Et c’est là que le bât blesse pour
Bitter Suites to Succubi : la plupart des titres sont dotés d’éléments intéressants mais ceux-ci pêchent parfois par des envolées vocales trop démonstratives, voire insupportables. Dani est peut-être en forme, mais il faut apprécier ici ses crissements de harpie ou ses chuchotements doucereux.
Constat à trois niveaux :
Dès l'intro aérienne (et insectoïde) “
Sin Deep My
Wicked Angel ” et le cynique “ All
Hope in
Eclipse ”, l'ambiance est réussie, à la fois sale et attirante. La cohésion de l’ensemble sera assurée avec “
Scorched Earth Erotica ” titre final qui reprend en partie le second dans ses riffs et ses lignes de piano. De son côté, la power ballad “
Suicide and Other Conforts ” est l’une des meilleurs compositions de l’album.
Un gros point d’interrogation en revanche sur la reprise des célèbres goth rock Sisters of
Mercy, “
No Time to Cry ”, efficace mais complètement dérivée de son esprit d’origine. Il sera d'ailleurs repris différemment sur le CD2 de “
Live Bait for the Dead ” un an plus tard de même que le single “
Born in
Burial Gown ”. Ah tiens ce single, parlons-en ! Il illustre ce que j'ai dit plus tôt concernant la loco, en frisant le ridicule absolu, sans parler du clip de ce titre ajouté en bonus sur la version digipack de cet EP : de loin l’une des plus mauvaises vidéos du groupe.
Et maintenant, passons à la grosse (mauvaise ?) surprise de cet opus : les remixes du debut-album
The Principle of Evil Made Flesh... Point commun de celles-ci : l’esprit épique et les aspects black/death très lourds perceptibles sur le premier méfait de Cradle ont quasiment disparus au profit, paradoxalement, d’un tempo plus soutenu et de constructions pas mauvaises en soi mais dont les riffs et la qualité des arrangements vocaux provoquent ... comment dire ? (... Grrr !)
Point très frustrant : “
The Black Goddess Rises II ” et “ The Principle of
Evil... ” frôlent le massacre intégral. Pour les deux : suppression de l’intro originelle ; succession de riffs trop mécaniques des guitares ; ambiance centrale et fin aseptisées par des intonations de voix se voulant charmeuses mais bien trop surjouées que ce soient les interventions narrées de la « diva » Sarah Jezebel ou ces “ shrieks ” pitoyables (pour rester polie) de vous-savez-qui. Les quelques modifications intéressantes opérées çà et là arrivent toutefois à sauver les meubles.
Sinon, “
Summer Dying Fast ”, cette chanson incontournable en live, a reçu un bon dépoussiérage sur cette offrande, même si à l’instar des deux autres auto-reprises, cette version ne vaut pas l’original (à mon sens).
-------------------------
Sorti par CoF pour fêter la naissance de son tout jeune label AbraCadaver et faire patienter ses fans transis avant le prochain album officiel, ce faux-CD n’est pas dépourvu de qualités. Cependant, gardons la tête froide devant ses (petits) charmes. En résumé : mignon et plutôt plaisant dans la forme ; tantôt intéressant, tantôt désolant dans le fond. Donc à écouter sans avoir les premiers albums en tête, comme lorsque l’on voit un bon petit film d'horreur de série B (cf. le clip ajouté par Valentheris dans sa chronique). Une compil' qui est annonciatrice des futures productions davantage orientées visuelles et sensuelles du combo.
il y a quelle que titre qui val la peine
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire