Cradle of
Filth, chapitre II
Résumé de l’album précédent : le premier méfait de Cradle, en dépit de ses hésitations, avait laissé entrevoir un potentiel certain pour le groupe réuni autour de son parolier et chanteur Dani
Filth. Las ! Suite au succès honorable de cette réalisation, le groupe a connu pendant plus d’un an et demi des moments tumultueux et douloureux : démission de plusieurs membres, dont certains sont partie formé le groupe
The Blood Divine, contrat inique de plus en plus inconfortable avec leur label... Le persévérant Dani arrive toutefois à mettre sur pied une nouvelle équipe complète tout en piochant dans des compositions réalisées entre mars 93 et mai 95 (la plus ancienne étant en fait “ The
Forest Whipers My Name ”, chanson du premier album reprise et en grande partie remaniée ici) afin de produire sa deuxième offrande et pouvoir ainsi briser le pacte passé avec le patron de Cacophoneus Records.
Changements dans la line-up : Damien Gregori remplace Benjamin Ryan au clavier et Stuart Anstis assume seul le rôle de Paul Allender et Paul Ryan aux guitares – le fantomatique “ Jared Demeter ” apparaissant dans les crédits n’est rien de plus qu’une astuce pour faire croire qu’un second gratteux a officié sur ce disque (vu que l’on entend bien deux guitares)... à moins que le groupe fasse référence à Bryan Hipp. Recruté en 1995 et ayant participé à plusieurs concerts, le malheureux a été victime d'un accident de voiture, l’empêchant de participer en décembre à l'enregistrement de ce deuxième full-length, que l’on pourrait très bien qualifier de « MCD » (gros EP) de par le nombre de ses titres et de sa durée.
Vempire... Un « savant » jeu de mot entre “
Vampire ” et “
Empire ” en anglais, le V pouvant être compris comme le cinquième chiffre romain. L’intitulé complet comprend aussi : “...or
Dark Faerytales in Phallustein...
Symbols and
Sign to know us by ”. Autant dire qu’à l’instar du précédent
The Principle of Evil Made Flesh, les vampires britanniques de Cradle mettent dès le début les choses au clair quant au contenu thématique et ambiant du disque et ce n’est pas l’artwork qui vient démentir cette première impression. Et pour ceux qui en douteraient encore avant l'écoute, l'avant-dernière page du livret nous jette à la face un petit extrait biblique : “ The
Life of all
Flesh is the
Blood ” -
Leviticus 17:14.
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Dès le relativement court morceau d’ouverture, il est assez flagrant que le style de Cradle a beaucoup évolué en deux ans :
Exit les constructions et ambiances lourdes sur le premier album porté par le côté death et la production (délibérément ?) approximative. Place à un tempo beaucoup plus soutenu, des riffs de guitares plus limpides, plus denses, plus incives que jamais. Il en va de même pour les vocaux de Dani : sa “ sepulchral voice ” (growls et chuchotements) est nettement plus présente et maîtrisée ; elle est même devenue sa meilleure arme. Quant à son véritable chant de guerre suraigu d’outre-tombe, poussé au maximum vers la fin des couplets, il tranche constamment dans le vif du sujet – attention les oreilles ! Il n'est d’ailleurs point incongru de comparer toutes ces variations vocales avec celles du grand
King Diamond, ce que le chanteur de CoF a toujours reconnu.
Détail crucial : cette fois, les arrangements vocaux féminins sont omniprésents. Les deux nouvelles session members Sarah
Jane Ferridge (alias Sarah « Jezebel »
Deva) et Danielle Cneajna Cottington, respectivement créditées “ Dulcet Ghostly Singer ” et “
Seducer of Ravens and Angels ”, nous offrent des chants, chœurs et cris de douleurs absolument époustouflants au côté de Dani – à se demander si ce n’est pas directement de l’Enfer qu’ont débarqué ces deux filles de
Lilith. Notons en outre une troisième participante, du nom de Rachel, aux “
Tortured Orgasm Chorus ” ; contexte très imagé, n'est-ce pas ?
Et pour couronner le tout, les longues dents de CoF mord de nouveau dans la tentation progressive.
De l’impériale “ Queen of
Winter, Throned ”, (LA Perle Noire de Cradle pour beaucoup), à l’annihilateur et aérien “ The Rape and
Ruins of Angels ” en passant par le tout aussi destructeur “
Nocturnal Supremacy ”, l'auditeur se retrouve pris dans un maelström de frénésie sanguinaire agrémenté par des breaks bien pensés, tel ce magnifique son de piano à la 45e seconde de la dernière piste, qui donnent un aspect grandiose au mariage entre la vitesse rythmique des guitares, la cadence infernale de la batterie et l'atmosphère angoissante distillés par les claviers et les changements de timbres de nos trois vocalistes. Autant dire que les parties atmosphériques centrales de ses morceaux correspondent à un cruel répit laissé à leurs proies, avant que la chasse ne soit relancée pour achever ces dernières dans leur étreinte mortelle.
De son côté, l’unique instrumentale, “ She Mourns a Lengthening
Shadow ”, parfait mélange des précédents interludes “
Iscariot ” et “ One Finale
Graven Kiss ”, contribue elle aussi à la majesté horrifique de l'ensemble - le livret nous propose même de goûter pendant celle-ci à une citation du poète Percy Bysshe Shelley, un des premiers romantiques anglais du XIXe siècle et époux de Mary Wollstonecraft Godwin Shelley, la créatrice de Frankenstein.
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Bref, point de mélodies larmoyantes ou de lenteurs quelque peu handicapantes comme sur le précédent méfait des Anglais ! Ici, les compositions et les textes de Dani évoquent et invoquent de terrifiantes et envoûtantes créatures de la nuit, incarnant la facette la plus insidieuse et érotique du Mal absolu. Et si leurs propres lamentations sur leur cruelle nature peuvent émouvoir, leurs actes prouvent qu’elles sont prêtes à en découdre férocement avec les forces du « Beau », du « Bon », du « Bien », de la Chrétienté toute entière, quoi ! Les preux chevaliers en armure rutilante n'ont qu'à bien se tenir ; ce n'est pas leur encombrant attirail ou leur pitoyable vertu qui arrêteront les coups de crocs ! - crocs sans doute un tantinet plus longs que ceux du lapin de Sacré
Graal.
Peut-on alors reprocher que la caisse claire de la batterie soit parfois trop en avant dans le mix, sachant que cet opus a été exécuté et enregistré à vitesse grand V ? Ce serait pinailler en vain, car
Vempire or Dark Faerytales in Phallustein est un sommet technique et cauchemardesque que CoF aura bien du mal à ré-atteindre par la suite sur un album entier et continuera sans aucun doute à faire date dans l’histoire du
Metal extrême au mêmes titre que les premières galettes des norvégiens d’
Emperor,
Dimmu Borgir ou
Limbonic Art.
Mmm... au fait, est-ce du Black
Metal symphonique que nous avons là ? Malgré l’usage « immodéré » d’arrangements néo-classiques ou choraux, ne serait-ce pas plutôt du Melodic Black
Metal ? Quelle étiquette lui conviendrait mieux ?
...Ah, mais suis-je bête, évidemment ! “ Supreme Vampiric
Evil ” !
Et maintenant, ne vous posez plus de question, pauvres mortels ! Le portail s’est refermé sur vous et vous ne pourrez résister aux charmes et à la furie des démons qui règnent en maîtres sur le château dont vous avez osé franchir le seuil de son enceinte. Mais rassurez-vous : votre lente agonie sera le moment le plus intense de votre vie pathétique de pêcheur hypocrite.
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16/20 si on est gêné par les passages défouloir-démonstratifs/un peu bâclés, 18/20 dans le cas contraire.
“ Those who
Trespass against us,
Beware the Shadows of
Dusk ”
N'importe quoi, il faudrait peut-être éviter d'exagérer.
Les influences Techno et Indus ont pris le dessus et ce n'est pas du tout ma came, mais il y a une construction musicale cohérente.
Des daubes intemporelles il y en a d'autres, ce n'est pas ce qui manque, si tu avais écouté Furze tu le saurais.
Bonne chronique, je n'apporterais rien de plus si ce n'est mon avis.
The Forest Whispers My Name, est surprenante, on l'a redécouvre, le son y fait pas mal faut dire. Je suis tout à fait d'accord sur le fait qu'il est indispensable à la discographie. Bien plus qu'un simple EP de passage, je trouve que c'est l'accomplissemant de ce qui avait était entrepris sur le premier.
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