Après une premier EP prometteur repoussant les limites d’un Heavy-
Metal classique, expression de sa musique tantôt rapide, tantôt mélodique, souvent maitrisée et innovante, suivis d’un excellent
Red Hot and Heavy concrétisant les ambitions légitimes du groupe, il faudra trois longues années à
Pretty Maids pour donner vie à son troisième véritable album. Autant dire une éternité à l’aulne de la créativité de certains autres groupes. Or, lorsqu’en cette année 1987, nos combattifs Danois se prépare à faire offrande de cette nouvelle œuvre, une profonde mutation du paysage musical est en train prendre forme, et de bouleverser, en partie, nombres de style. Tout d’abord le changement naitra du talent d’immenses compositeurs, véritablement novateurs chacun en leurs genres. Cette nouvelle ère qui est en train de voir le jour est plus emprunte de mélodie. Le travail des harmonies y semblent bien plus prépondérant allant à l’encontre de la plupart des derniers styles émergeant, et d’une certaine radicalisation des extrémismes avides de toujours plus de brutalité, de violence, de laideur et de haine. Ainsi, dans un souci de proposer une musique aux airs harmonieux alliée à la rage électrique et saturée inhérente à ce
Metal si chers à ses yeux, ou du moins ses oreilles,
Helloween définis les prémices d’un Heavy Speed mélodique, qui enfantera par la suite le
Power Metal, essentiellement basé sur la recherche au travers des instruments
Metal classique, à savoir voix/guitares/batterie. Europe quant à lui, véritable phénomène, établis avec The Final
Countdown, les nouvelles bases d’un
Hard-FM aux refrains toujours plus arrangés, aux chœurs toujours plus peaufiné, composant ces mélodies essentiellement aux synthés, et aux pianos. Ce n’est pas véritablement une révolution puisqu’en 1984, avec son album intitulé 1984,
Van Halen avait aussi tenté l’aventure, usant de l’instrument à touche comme d’un véritable outil de composition ; et que
Deep Purple utilise depuis toujours les talents d’un John
Lord aidé de ses orgues et autres claviers. L’instrument a pris un tel essor et une telle ampleur depuis son bouleversement majeur instauré par Yamaha en 1982, le rendant plus maniable, plus « vivant », créant des sons toujours plus chaleureux et réalistes, que désormais même les musiques les plus âpres s’y risquent.
Ce qui pourtant ouvre un nouveau terrain vaste de composition dédié à l’imagination créative de certains, est une véritable malédiction pour les autres. Adeptes de puissance, et d’agressivité voient en effet fondre sur eux des hordes toujours plus nombreuses, dans un retentissement mondial, de musiciens se prosternant devant le sacro-saint clavier. Le constat de ces « autres » étant essentiellement amer face à l’incapacité évidente de tant de compositeurs à intégrer l’engin parcimonieusement. Une frustration évidement acerbe lorsqu’on sait que ce choix du « trop de synthés », privilégie la facette la plus mélodique, toujours (enfin jusqu’alors) au détriment de celle plus rageuse, plus hargneuse. Dans ce nouveau monde où les synthés élèvent triomphalement la voix, les guitares n’ont plus qu’à se taire, ou du moins à parler moins fort, voir murmurer.
Dans ce contexte, il est difficile de savoir si
Pretty Maids sortis ce
Future World en toute connaissance de cause. Bien évidement on se souvient que le groupe use de l’instrument à touche depuis son premier EP et qu’il a donc suffisamment d’expérience en la matière pour ne pas se laisser griser par les sirènes de la facilités d’airs moyennement inspirés au nom, au son et au su de reconnaissance mondial ; mais on ne peut pas oublier non plus qu’avec son
Red Hot and Heavy le groupe ne sut pas réussir un positionnement clair vacillant dans certains morceaux entre un Heavy
Metal parfois véloce mais toujours exempt de claviers dans une démarche de composition proche de celle d’
Helloween et dans d’autres entre un Heavy très mélodique au synthé prédominant. L’enjeu est de taille et nos craintes justifiées, d’autant plus que Pete Collins s’en allé laissant Ken
Hammer seul guitariste. Doit-on y voir un quelconque signe ? Heureusement dès le premier morceau éponyme on mesure que d’entré le groupe a su réussir là où autrefois il avait échoué, mêlant de manière judicieuse et intègres leurs diverses aspirations et influences. L’équilibre est parfait et ce morceau enchaine ses divers éléments excellemment, dans une construction adroite où l’intensité dramatique semble scénarisée jusqu'à son apogée. C’est un sentiment que l’on ressentira également à l’écoute du furieux et prompt Yellow
Rain. Ces deux morceaux étant pour ma part la quintessence de cet opus. D’autres titres tel que le déchainés, mais non moins succulent
Loud’n Proud, et un enlevé Needles in the
Dark sont plus familier, l’émotion est moins construite, plus directes. We Came to Rock, et Long Way to Go sont eux aussi composés de manière plus classique, deux mid-tempos dont le premier n’est pas sans rappelé le titre
Red Hot and Heavy, surtout avec ce Riff d’introduction. Seule Rodeo et
Love Games sont relativement moins réussis, basculant un peu trop vers des airs trop policés aux refrains bien trop sucrés.
Il est à noter aussi que l’alternance de ce chant guttural rauque et animal, avec celui plus classique et plus naturelle d’un Ronnie Atkins est désormais plus marquée encore, donnant véritablement tout son sens à ce mariage musical fait de puissance et de mélodie tout à la fois. Mieux encore, les synthés, pourtant relativement présent, loin d’affadir le Heavy de
Pretty Maids enrichissent sa musique de manière très homogène, lui donnant une dimension toute nouvelle.
Evidemment, avec le recul, et les années passées, on ne peut nier que l’album à vieillis, que la production un peu faible mériteraient une remasterisation, que les qualités de batteurs de Phil Morhead sur les titres les plus rapides viennent (à peine) entacher une virtuosité pourtant quasiment parfaite, que les tenues, les attitudes, les coupes de cheveux de l’époque, sont éminemment ridicules. Evidemment. Pourtant disconvenir de la qualité criante de ces morceaux, de l’excellence avec laquelle
Pretty Maids su imposer sa musique aux sons de ce
Future World, en ne sachant pas se détacher de ces détails-là, serait éminemment plus ridicules encore.
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