Il y a trois semaines, nous conversions tranquillement à la maison avec quelques camarades de mon âge - des vieux de la vieille donc - et un petit jeunot de 24 ans que nous appellerons ici Mister Brown afin de préserver son anonymat. Musique, bières (presque) fraîches, le bonheur. Et puis tout à coup, patatras, c'est la sortie de route quand Mister Brown s'écrie soudain : "Hé je connais ça, c'est
Hammerfall!"...
Silence d'abord gêné de l'assistance, rapidement suivi de regards complices moqueurs et enfin railleries diverses et variées. Oui je sais, c'est moche mais on ne se refait pas.
Si vous lisez cette chronique, vous avez déjà compris l'incommensurable erreur commise par notre jeune ami : confondre
Hammerfall et
Pretty Maids. Impossible de laisser passer cela sans réagir. Et me revoici donc de "corvée" de chronique.
En 1981, Paul Christensen, chanteur, et Kenneth Hansen, guitariste, se rencontrent grâce à une petite annonce, musicale bien entendue, passée dans un journal local. C'est le coup de foudre immédiat, artistique bien entendu. Peu après, Kenneth tombe sur un bouquin qu'il n'a pas lu mais dont le titre sonne bien à son goût :
Pretty Maids. Le groupe tient son patronyme. Originaire d'Horsens, à l'est du Danemark, ils montent tout d'abord un cover band de
Thin Lizzy - nous y reviendrons -. Ils enclenchent rapidement la seconde et commencent à écrire leurs propres titres.
En 1983, ils financent une première démo que Ken Anthony, un manager de Copenhague, fait alors tourner au sein de son réseau et que le mag anglais
Metal Forces accueille avec enthousiasme dans son premier numéro (Oui oui, c'est bien la revue qui avait si vivement critiqué
Hellhammer que Tom
Warrior s'était juré de ne jamais jouer en Angleterre). Intéressé,
Bullet Records les signe. Pariant sur un succès commercial international, le label anglais "impose" aux membres du groupe de prendre des noms d'emprunt sonnant plus anglais. Paul Christensen devient Ronnie Atkins, Kenneth Hansen opte pour Ken
Hammer.
Cette même année, leur premier EP voit le jour (une merveille ceci dit en passant). Une tournée anglaise en 1ère partie de
Black Sabbath plus tard, le groupe a tapé dans l’œil de
Ian Gillian, chanteur des Sabb’ à l’époque. Ce dernier vante les qualités du groupe aux animateurs de radios anglaises, ce qui aboutit à l'enregistrement de 4 titres en live lors du célèbre "BBC Friday
Night Rock Show". Pour répondre à une demande grandissante, le label doit dans l'urgence ouvrir un fan club du groupe. BOUM,
Bullet fait faillite ! Fort heureusement CBS Records "récupère" le contrat et réédite le fameux EP.
En juin 84,
Pretty Maids entre dans les PUK Studios au Danemark pour pondre un album incontournable de cette décennie si féconde en œuvres majeures : «
Red, Hot
And Heavy ». 37 minutes de pur plaisir.
Bien que le titre-par-titre ne soit pas en odeur de sainteté sur SOM, je pense qu'une légère entorse à la règle peut être admise pour cette chronique, tout au moins pour les trois premiers titres. Je m'explique et vous en laisse juge.
Après une célèbre mais quelque peu inutile introduction ("Fortuna" de
Carmina Burana), le groupe nous offre d'emblée un titre imparable : "Back to back", un classique du heavy métal des 80's et surtout du heavy métal tout court! Riff introductif qui envoie du bois, rythmique puissante, chant qui l'est tout autant, licks de guitares par ci par là, solo inspiré et un refrain accompagné de superbes lignes de guitares - proche de ce proposera plus tard
Helloween -. "Back to Back", un titre repris par HammerFall sur l'album "
Legacy of
Kings" (1998), d'où l'erreur de Max... Bah c'est pas grave tu es pardonné. Oups, je voulais dire Mister Brown. Tout aussi ra(va)geur, bien que davantage mid-tempo, le titre suivant qui donne son nom à l'album est un hymne aux choeurs musclés, accompagné de paroles certes "clichesques" mais efficaces ("You 've got to be strong, if you will survive, stay ... aliiiiiiive").
Peu nombreux sont les groupes qui ont ouvert leur premier album par deux classiques entrés depuis au panthéon du métal. Après une telle mise en bouche, l'auditeur qui découvre le groupe salive à l'idée de ce qui va lui être proposé ensuite. Du bon gros heavy métal!!! Et donc, c'est une énorme surprise lorsque survient le troisième titre, "Waitin’ for the time". Claviers omniprésents, œuvre d'Allan Nielsen, pardon d'Alan Owen - ça fait plus british n'est-ce pas? -, mélodie et refrain très typés FM, chant rappelant Joe Eliott, le contraste avec ce qui a précédé est assez saisissant!
Dés ce premier album s'affirme ainsi déjà la personnalité du combo, son point fort mais également son talon d'Achille. En effet, sur cet album comme tout au long de sa carrière discographique (11 albums studios tout de même),
Pretty Maids a alterné - grâce notamment à cette utilisation fort bien pensée des claviers et à des solos particulièrement mélodiques - entre compos sucrées ("Waitin´ for the time", "
A Place in the Night", "Queen of dreams") et salées (outre les deux morceaux déjà cités, la triplette "
Cold killer", "Battle of pride" et "
Night danger" vaut le détour). De mon point de vue, cet album reste néanmoins à ce jour dans toute la discographie du combo celui qui présente le déséquilibre le plus net en faveur de la facette agressive du groupe. Les compositions étant excellentes, ce penchant plus heavy fait de ce disque mon préféré des Maids.
Il est évident que le chant de Ronnie Atkins participe également à cette diversité. A même pas 20 ans - il est né en novembre 64 et l'album sort en octobre 84 -, le chanteur fait preuve d'une maîtrise et d'un palette vocale étonnante, aussi impeccable sur les phrasés puissants, éraillés juste ce qu'il faut, que lorsque son timbre se fait plus doux. A ce titre, "
A Place in the Night" résume assez bien les immenses capacités du bonhomme.
Quelques mots également pour féliciter la section rythmique qui livre une solide prestation (Allan Delong à la basse - à ne pas confondre avec notre Alain Delon national - et Phil Moorheed à la batterie (je vous épargne les noms danois). Rick Hanson accompagne
Hammer à la guitare rythmique; il ne signe qu'un court solo sur "Queen of dreams".
Enfin, notons que la galette se termine sur un rock n' roll enjoué, "Little Darling", une reprise de ...
Thin Lizzy, un titre enregistré comme single en 1974 avec le grand
Gary Moore. Par cet hommage, la boucle est bouclée pour
Pretty Maids. Bien qu'excellent, le titre détonne un peu dans le contexte de l'album. Au moins, il ne s'agit pas d'une énième reprise du "Boys are back in town".
Au final, faut-il voir dans cette tendance à avoir toujours un peu le cul entre deux chaises l'une des raisons du manque de reconnaissance du groupe? Peut-on au contraire penser que cela aurait dû attirer un public d'autant plus nombreux? Sommes nous sectaires? Peut on apprécier la Kro ET la 16? Au delà de ces questions philosophiques, le seul constat que nous pouvons dresser est sans appel.
Pretty Maids n'a jamais atteint le succès auquel il aurait pu/dû aspirer au regard de la qualité de ses albums.
Succès doux amer donc pour le groupe dont l'album est bien reçu par la presse mais dont la tournée anglaise en support-band de
Saxon va tourner au cauchemar, accueillis qu'ils sont soir après soir par des insultes, crachats et autres jets de cannettes. Aux dires de Ken, les membres de
Saxon ne font guère mieux que leurs fans (pour ceux qui s'en souviennent, la réputation de la bande à Biff était loin d'être flatteuse à cette époque).
Pourtant, 30 ans après la formation du groupe, Hatkins et
Hammer sont toujours bien présents aux commandes de leur bébé. Leur popularité étant plus que relative depuis déjà une bonne vingtaine d'années, voilà une belle preuve de la foi qui les anime. Et comme les deux hommes n'ont pas atteint la cinquantaine, nous pouvons espérer les entendre encore longtemps.
A ma connaissance, il n'existe pas de version remasterisée du disque. Je trouve cela choquant. Ce n'est pas que le son de l'album ait vraiment besoin d'être revu, le temps qui a passé prouve que Billy
Cross a parfaitement produit cet album, assisté d'un débutant qui commençait là (même s'il avait déjà produit l'EP du groupe) une carrière depuis fort réussie, un certain Tommy Hansen. Non, ce qui me choque, c'est qu’une telle absence traduit bien l'indifférence quasi-générale qui entoure le groupe aujourd'hui. Franchement, même les plus obscurs des groupes de la NWOBHM ont eu droit à leur remaster ces dix dernières années.
Et dire qu'au même moment, un autre groupe danois s'apprêtait lui aussi à sortir une bombe nommée « Don't Break the
Oath ». Forts, trop forts ces danish!
Un bug Anglais à la Elevator ??
Rentré en occ en vinyle, cet excellent album de heavy bien dans son epoque est 1 merveille. Je ne lui trouve pas de defaut et il ne me semble pas qu il ait mal veillit, pas d' effet suranné...
Excellente chro.
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire