Si la Floride a été placée à juste titre sous les feux de la rampe dès la fin des années 80, grâce à l’essor du fameux carré deathmetal composé de Death,
Morbid Angel,
Atheist &
Obituary, un autre foyer devient particulièrement actif à l’est des Etats-Unis, dans les états de Pennylvanie, de
New York et du New Jersey, pour citer
Immolation,
Suffocation,
Revenant,
Mortician ou
Apparition (futur
Sorrow), qui grandissent dans les mêmes temps. C’est dans ce vivier qu’
Incantation émerge en 1989 sous l’impulsion de son guitariste & leader John McEntee. Si Paul Ledney figure dans le line-up initial, il ne reste toutefois que quelques mois avant de fonder l’entité blackmetal
Profanatica, remplacé au pied levé par le growler
Will Rahmer, qui officie également au sein du terrible
Mortician.
Se constituant rapidement un solide répertoire,
Incantation enregistre notamment deux EP vinyles mis en image par Chris Moyen et rapidement devenus cultes, les fameux
Entrantment of Evil et
Deliverance of Horrific Prophecies respectivement parus chez Seraphic
Decay et Relapse Records, deux labels se partageant une bonne part du gratin underground deathmetal de cette époque, notamment nord américain. Si
Will Rahmer pousse les beuglantes sur le premier EP, le second marque son départ et l’arrivée de Craig Pillard, qui restera le growler le plus emblématique de la formation de McEntee, comptant pour l’heure le batteur
Jim Roe et le bassiste Ronnie Deo dans ses rangs.
Tandis qu’
Immolation,
Suffocation et
Sorrow concrétisent leurs efforts en intégrant l’écurie Roadrunner en 1991 à l’occasion de leur premier album,
Incantation ayant déjà gagné une sacrée réputation dans l’underground enregistre quant à lui 6 morceaux destinés à rejoindre ceux de son homonyme finlandais
Amorphis, pour un split-album à paraître chez Relapse Records, qui ne verra hélas pas le jour (la partie d’
Incantation n’étant exhumé qu’en 2008 chez Necroharmonic). Le quatuor s’embarque donc de nouveau en studios entre 91 et 92, pour les sessions d’un premier véritable album, piochant d’ailleurs allégrement dans son répertoire des deux EP et du split-LP avorté, en y ajoutant ses deux dernières compositions, le terrible
Golgotha et le tout aussi mémorable
Immortal Cessation. Onze titres composent ainsi l’album baptisé
Onward to Golgotha, mis en image par Miran Kim (qui deviendra l'illustrateur fétiche du groupe), et paru au printemps 1992 chez Relapse Records, le label s’étant entre temps judicieusement associé avec son confère allemand Nuclearblast pour une couverture européenne.
Si
Dawn of
Possession et Effigy of the
Forgotten (
Immolation,
Suffocation) avaient déjà annoncé un renouveau dans la scène deathmetal à l’automne 1991, en repoussant les limites de la brutalité et de la noirceur de quelques crans,
Onward to Golgotha confirme cette menace issue de l’est des Etats-Unis.
Plus caverneux encore, mais tout aussi difficile d’accès à une époque où le deathster n’était pas forcément habitué à un tel hermétisme musical, ce premier album d’
Incantation possède une singularité à toute épreuve, reprenant à son compte les aspects les plus sombres et brutaux du deathmetal, tout en y incorporant de nombreux passages d’une lenteur écrasante, lui donnant ce côté doomy qu’on retrouve sur l’intemporel
Mental Funeral d’
Autopsy.
Si le ravageur
Golgotha en ouverture fixe d’emblée ce décor abyssal et cette atmosphère à couper au couteau, le début tout en lourdeur de Devoured Death ou le maléfique Christening the Afterbirth aux riffs écrasants, plombent quant à eux plus particulièrement le climat, les abîmes n’ayant jamais parus aussi proches. Les rythmiques tantôt sauvages ou pesantes de
Jim Roe, les guitares tranchantes ou lancinantes de McEntee, les growls si gutturaux de Pillard, forment tous ces éléments façonnant cette ambiance si dense et caverneuse.
Onward to Golgotha, c’est aussi une impression de chaos (
Immortal Cessation,
Eternal Torture) qu’
Immolation n’aurait pas refusé sur son inénarrable
Dawn of
Possession, un riffing sachant aussi se montrer très incisif (
Unholy Massacre), au-delà du growl de Pillard n’ayant non seulement rien à envier à celui de ses collègues
Will Rahmer et Frank Mullen de l’époque, mais possédant en plus une profondeur inégalée.
Concentré de onze morceaux rapidement devenus cultes, pour citer cette paire
Unholy Massacre et Christening the Afterbirth n’ayant aucun prix à mes yeux,
Onward to Golgotha est une école à lui seul, et certainement l’album le plus mémorable de la bande de John McEntee, aux côtés de son redoutable successeur. Le nombre de formations ayant marché sur les pas d’
Incantation est incalculable, mais cette atmosphère maléfique si lourde et si épaisse que le quatuor à réussi à installer en cette année 1992, sans oublier cette force du riff phénoménale, n’ont encore que peu d’équivalents dans le style. Culte à en mourir.
Fabien.
Magnifique chronique pour un album et 1 groupe que je ne maitrise aucunement!
Je vais de ce pas rattraper cette lacune!
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