Passage to Arcturo ayant reçu un écho très favorable dans l’underground,
Rotting Christ se voit ouvrir quelques portes, Øystein Aarseth (aka Euronymous) et sa jeune maison de disques
Deathlike Silence Productions, fait des pieds et des mains pour attirer les grecs dans son écurie, mais son assassinat en été 93 clora à jamais le débat et
Thy Mighty Contract (1993) sortira sur un autre jeune label de
Metal extrême,
Osmose Productions.
Enfin le Black
Metal subtile de Sakis et les siens est doté ici d’une production digne de ce nom, pas forcément agressive, toutes guitares devants et minimaliste à la norvégienne, mais homogène, équilibrée et tout en nuances. Anthony Delaportas et son Molon Lave Studio ont en effet apporté un soin tout particulier au disque qui ne sonne ni trop crade ni surfait ou aseptisé.
The
Sign of
Evil Existence, une montée en puissance progressive et son départ frénétique accompagnant le cri glacé de Sakis, montrent un bond en avant manifeste dans l’intelligence de composition de leur Black mélodique. Sans forcément chercher à impressionner l’auditeur avec des gros sabots, Transform all Suffering into Plagues distille progressivement des touches de clavier par ci, du chant incantatoire par là, ou de la guitare mélancolique couplée à de la double pédale. C’est alors que quand on s’y attend le moins, Sakis souffle tout le monde en entamant un riff qui tue soutenu par les frappes régulières de Themis, le solo qui suit montre aussi une maturité indéniable par rapport à
Passage to Arcturo.
Attention,
Rotting Christ n’a pas perdu son âme et sa flamme sacrée en obtenant des moyens d’enregistrement dignes de ce nom, au contraire leur approche mélodique et originale (sans jamais tomber dans le mou du genou ni l’expérimentation forcée) est magnifiée par l’inspiration redoutable du guitariste Sakis, sachant toujours faire le bon dosage mysticisme / efficacité et le constat est aussi valable pour son chant. Malgré un ensemble pas forcément très rapide (en tous cas pas pour le fan de
Morbid Angel) , le dynamisme est toujours de rigueur sur
Thy Mighty Contract, à l’image de His Sleeping
Majesty et de ses nombreux changements de rythme.
D’aucuns trouveront que
Rotting Christ manque d’agressivité, ce qui n’est pas faux dans une certaine mesure, mais par exemple le départ haineux de Coronation of the
Serpent apporter un cinglant démenti. Comparé à un
Darkthrone qui base sa force sur une musique monolithique et crasseuse, les hellènes développent eux aussi une aura satanique forte, mais celle-ci est juste moins directe, plus subtile et fouillée, tel ces carillons toujours sur Coronation…, qui donnent à ce passage une atmosphère à la fois funeste et ésotérique.
Rotting Christ a balayé ses dernières influences Thrash et Death lui donnant parfois des allures de
Possessed ésotérique, affirmant ainsi définitivement sa personnalité musicale. Une dernière longue pièce épique vient parachever le chef d’œuvre, The Fourth Knight of
Revelation propose en effet des riffs majoritairement Heavy entêtants dans la première partie et une semi instrumentale laissant libre cours aux pérégrinations solistes de Sakis dans la deuxième.
Alors que le Black
Metal commence tout juste son offensive qui emportera tout sur son passage, à commencer par le Death qui mettra quelques années à s’en remettre,
Rotting Christ apporte sa pierre à l’édifice grâce à ce flamboyant
Thy Mighty Contract, mais ne connaîtra hélas pas la reconnaissance de
Pure Holocaust (
Immortal), Transilvanian Hunger (
Darkthrone) ou Ugra-
Karma (
Impaled Nazarene), peut-être trop fin et discret à côté des scandinaves qui font tout pour se faire remarquer, et je ne parle évidemment pas d’un point de vu musical…
Accompagnant
Varathron et
Necromantia, sortant également leur premier album en cette année 1993,
Rotting Christ s’affirme comme le leader de la scène Black
Metal grecque, qui est sans aucun doute l’une des plus particulières
A noter que si vous possédez ce putain d’exemplaire réédité de
Century Media et sa pochette insipide (oui c’est mon cas c’est pour ça que je râle…), une erreur s’est glissée dans la track-list : la piste 4
Dive the Deepest
Abyss est en fait His Sleeping
Majesty (et inversement).
Ah oui une dernière chose, pour ceux qui n’auraient pas encore compris ce disque est à posséder absolument, pour peu que vous arriviez à rentrer dans un style pas si facile d’accès que ça autoproclamé
Abyssic Black Cult : ouais ça colle bien…
BG
Sinon, visiblement, tu as un talent particulier pour attirer les crétins congénitaux. Continue à écrire tes chroniques elles sont un trait de lumière dans la noirceur de leur connerie.
Enfin, ces titres sont fort heureusement immortels.
Perso mon préféré serait l'incroyable Exiled Archangels, je trouve imparable cette pauvreté de moyen qui parvient tout de même (et en mieux) à faire passer cette dévotion mystique qui est la marque de fabrique du groupe et où, à mon sens, réside le véritable génie du christ pourrissant.
Pièce maîtresse à mes yeux, elle a beaucoup tourné dans mon Walkman, vite rejointe par le premier Septicflesh, la scène extrême grec avait clairement une identité particulière qui perso me faisait voyager.
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