Chaos A.D. Un seul mot, des milliers de réactions plus antagonistes les unes que les autres.
Voilà 5 ans que
Schizophrenia, album révélateur des talents du groupe, mit le feu aux poudres de l’enthousiasme des metalheads, 4 ans que
Beneath the Remains signait l’apogée des brésiliens et 2 ans que
Arise finissait de convaincre les septiques et maintenait le groupe sur les rails du succès. Nous sommes en 1993, Roadrunner Records devient petit à petit un label de prédilections pour une flopée de groupes et
Sepultura y a confortablement trouvé son nid. En cette année, la sortie de Chaos A.D devait, selon les dires du label, propulser le groupe vers un territoire musical singulier, le déconnectant littéralement de ses influences thrash US, qui étaient pourtant glorifiées à merveille entre les mains du quartette.
Mais que se passe-t-il ? En quoi le groupe le plus reconnu du territoire d’Amérique du Sud se transforme-t-il ? La réponse est simple :
Sepultura ne joue plus de thrash death. Il semble avoir troqué son souffre et son agressivité au Franprix contre la panoplie hardcore soutenue de tribalisme ethnique. On en vient directement aux réactions en totale opposition, résultat du choc de plusieurs générations de metalheads : Les plus progressistes ou les plus jeunes criaient au génie tandis que les fans les plus anciens et les plus fervents du passé de
Sepultura eurent tôt fait de rabattre le couvercle en hurlant à la trahison. A l’écoute du disque, on pourra aisément les comprendre…
Schizophrenia fut une rupture tranchante entre le proto-death minimaliste et le thrash death vertueux de la fin des 80’/ débuts des 90’. Chaos A.D en est une autre encore plus énorme.
Plus rien de Death, un thrash peu présent et une nette addiction au power metal. Les riffs inoubliables et richissimes, les solis transcendants de Kisser, les speederies aussi techniques que puissantes de Igor… tout cela n’existe plus que par bribes entrecoupées. La déception fut immense, il ne restait plus grand chose de la flamme originelle du géant. A la place,
Sepultura fait appel aux tableaux tribaux traditionnels soutenus de percussions d’origines latines et africaines, aux samples immersifs, à la production lourdingue, au gros riff contestataire, à la rythmique groovy et syncopée…
…et pond un disque fabuleux !
Qu’on se mette d’accord tout de suite ! Le groupe aura beau avoir simplifié son jeu guitaristique et adouci sa puissance de feu, il n’en aura vraiment pas choisi la carte de la facilité pour autant. Au contraire, le disque approche une nouvelle dimension beaucoup plus visuelle. Il peint à présent un environnement belliqueux et identitaire au sein duquel le conflit armé fait rage. Chaos A.D est une immense sauterie à la fois puissante et rêveuse.
Le charme de Kisser est devenu transparent, on aura même envie de le traiter de pingouin sur la globalité, à l'image de Refuse/Resist, qui amorce la lancée assez difficilement malgré sa qualité. Toutefois, Ses dissonances bruitistes perçantes à la guitare telles celles de
Nomad ou
Clenched Fist ou encore un savoir faire mélodique convaincant sur
The Hunt ou l’incroyable et prodigieux We Who Are Not As
Others ne sont que quelques unes de ses réponses mesquines aux moqueries. Il privilégie désormais le sens efficace du riff rentre-dedans, à l’image des terribles
Territory et
Amen sur lesquels Igor nous éblouit par son jeu de toms provoquant presque un déhanché d’une souplesse respectable.
Pour ce dernier, son terrain d’expression est encore bien dégagé à l’inverse de la suite de la discographie. Son charisme rythmique est bien moins percutant que par le passé. Mais monsieur prouve que le bavoir est encore loin en mariant un mouvement très speed et une technicité plus moderniste sur Biotech is Gozilla. Dans l’ensemble, ses rythmiques cadencées poussent à un saut frénétique comme à un headbang pesant.
La puissance homogène globale est beaucoup aidée par Paulo dont la basse a prit beaucoup d’importance, claquant justement sans faire preuve de prétention.
Pour parachever la description, Max Cavalera donne beaucoup plus de puissance vocale. A travers ce timbre, on ressentira une forte volonté de révolution, cette émotion est cependant bien loin du cliché d’un
Soulfly, le projet futur du brésilien au rastas, ou du pitoyable grognement d’un
Corey Taylor.
Enfin, la question des intrusions telles l’ajout de samples ambiants ou d’instruments tribaux reste discrète mais concrétise l’ensemble de l’aura du disque. L’instrumental Kaiowas est une jolie bouche d’aération qui, sans trop en faire, souligne un petit clin d’œil à d’autres cultures.
Le changement est total et des plus réussis. Le grand
Sepultura, empereur du thrash-death sud-américain nous a quitté pour revêtir un costume plus démocratique mais tellement efficace et puis diablement original ( un mot que le groupe oubliera dès la sortie de
Roots ).
Les réactions suscitées ne sont que la rencontre de deux générations de passionnés, qui par leurs avis négatifs ou positifs ont de toute façon vu un jour en
Sepultura un combo touchant le génie, que ce soit sur
Beneath the Remains ou
Chaos A.D. Deux œuvres totalement contraires mais deux pierres angulaires essentielle au développement du groupe.
Et c’est ici que l’histoire de termine.
Sepultura ne se remettra jamais de cet accouchement et, après avoir sorti un
Roots encore convaincant, Max Cavalera laissera son groupe sombrer en se consacrant à un projet à part du nom de
Soulfly, entreprise correcte avec son premier opus, vraiment douteuse dès la sortie de
Primitive.
La marque des grands restera pourtant éternelle.
Pour moi, c'est leur meilleur disque. L'évolution musicale est impressionnante, Chaos AD est une véritable décharge de riffs explosifs et de rythmiques déchaînés, et c'est celui qui a, à mon sens, le mieux défini l'identité de Sepultura. Les morceaux sont prodigieux et très créatifs (Territory, We Who Are Not as Others et Propaganda me laissent toujours sans voix, l'instrumental Kaiowas et le déchaîné Manifest m'impressionnent toujours). Chaos A.D. constitue l'âge d'or de Sepultura et surtout de Max Cavalera, un album très en avance en son temps.
Le compte a rebour de la Fin du Sepultura "magique".
J' ai eu cet album à sa sortie....si le changement de cap musical fut surprenant et destabilisant, Sepultura nous gratifie tout de meme d'un bel album... efficace avec ses morceaux entetant comme territory nomad et ou biotech is godzilla...violent avec son refuse/resist et slave new world.
les cavalera grossissent à vue d oeil et diversifient leurs approches en se rapprochant de leur culture originel et tjrs 1 peu plus de leurs influences punk!
Pas le meilleur mais loin d'etre mauvais, cet album reste 1 valeur sur de 1993.
Bien dit méchant et tout à fait d'accord avec toi.
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