Edguy fait partie de ces groupes à la destinée magique. Partis de rien alors qu’ils n’avaient que 14 ans, limités à enregistrer dans un garage pour finalement être 15 ans plus tard au sommet de la chaîne alimentaire du
Metal Mélodique. Il est également un de ces rares groupes à n’avoir souffert de presque aucun changement de line-up, avec le même personnel depuis aujourd’hui dix longues années.
Quatre ans après avoir défrayé la chronique avec ce qui restera probablement comme un des meilleurs albums de Speed jamais enregistré par un groupe allemand (pour le moins !), j’ai, bien sûr, nommé «
Hellfire Club ». Et, deux ans et demi après le très controversé «
Rocket Ride », le quintet allemand revient avec sa nouvelle offrande seulement quelques mois après le magistral "The Scarecrow" d'
Avantasia.
«
Rocket Ride » avait dispersé les fans en raison d’un panel musical très (trop ?) varié, passant allègrement du Sympho au Speed, sans oublier le
Hard Rock qui prend de plus en plus de place dans les productions de Tobias Sammet (il a toujours été plus ou moins présent mais le son plus
Hard fait énormément ressortir le côté « vintage » sur les derniers opus). «
Tinnitus Sanctus » s’inscrit dans la lignée de son prédécesseur mais avec ce côté
Hard encore plus présent, ce qui a eu pour effet initial de rebuter, voire de décevoir.
Mais, une fois n’est pas coutume, un album des lutins allemands ne se comprend pas en quelques écoutes, et ce nouvel effort demandera de vous beaucoup plus qu’il n’y parait. En effet, si lors des premières écoutes, la musique parait fade et relativement chiante (n’ayons pas peur des mots), elle se découvrira au fil des écoutes pour finalement vous ensorceler. Dans la veine de morceaux comme « Fucking with
Fire » ou « Wasted Time », la plupart des nouveaux titres ne brillent pas par leur vitesse et ne constituent donc pas des hymnes immédiats comme ce fut le cas jadis.
Mais finalement, «
Tinnitus Sanctus » y gagne en étant plus adulte et sensible. Bien que les premiers soient des chefs-d’œuvre, il faut avouer que maintenant que nous savons tous pertinemment de quoi ils sont capables, il n’est plus utile de composer des morceaux ultra speed avec de nombreux solos et un Tobias chantant très aigu, cela n’aurait pas de sens car ces albums représentaient justement une jeunesse voulant bouffer le monde. Maintenant que c’est fait, autant passer à autre chose, ce qu’ils font avec brio.
En effet, si «
Sex Fire Religion » choque de prime abord, il devient avec le temps un des meilleurs titres de l’album. Son tempo relativement lourd et son solo très
Hard Rock peut surprendre, mais Tobias fait de cette chanson une perle grâce à son chant et son interprétation sans failles (quelle hargne sur la fin du refrain…jouissif !). En revanche, «
Dead or Rock » convint moins dans un genre pourtant similaire (le titre le plus faible de l’album, je pense, malgré un bon refrain).
«
Dragonfly » est selon moi la plus grosse baffe et surprise de cette cuvée 2008. Si l’intitulé très clichesque pourrait laisser envisager un morceau typique « dragon metal », il n’en est rien. Suite à une intro formidable de sensibilité où chant et guitare (très 70s) s’entremêlent, le morceau nous emporte jusqu’à ce refrain splendide et solennel, sans doute le plus réussi et original de l’album, qui ne sera pas près de vous lâcher une fois incrusté dans votre esprit. Et en parlant de solennel, comment ne pas évoquer le break magnifique de « Speedhoven », où Tobias prouve qu’il est certainement le plus grand chanteur actuel du genre, avec encore ce mélange de hargne et de mélancolie, pour ensuite sombrer dans un déluge d’harmonie de guitare où Jens Ludwig et Dirk Sauer se font vraiment plaisir (assez proche de « Judas at the Opera »).
Car si le mid tempo est à l’honneur,
Edguy n’a pas non plus oublié ses premières amours comme le prouve « Speedhoven » justement (avec ses sonorités de clavier orgue Hammond très prononcées), mais également « The Pride of
Creation » qui me rappelle le «
Return to the Tribe » de l’album précédant, avec cet humour autant dans les paroles que la musique. Sur ce titre, les chœurs sont très imposants et, en plus de sublimer la ligne de chant principal, font un véritable question-réponse, cela conférant un côté comédie musicale plus proche d’
Avantasia.
"
Nine Lives" se révèle être l'un des nouveaux titres les plus intéressants. Paradoxalement à ce retour aux valeurs primaires, le son n’a jamais été aussi moderne. Digne héritier de "Matrix", et doté d’un refrain exceptionnel (il faut se retenir de le passer quinze fois dans la journée), "
Nine lives" dévoile un pont sous forme d’un mur de guitares pachydermiques s’effritant rapidement pour laisser place à un solo très mélodique et beau, tout en gardant assez de place pour faire chanter le public en live. Je m'attarderai également sur le texte, évoquant probablement les nombreuses critiques subies par les "fans", lorsqu'il déclare "toujours une vieille histoire, toujours une vieille chanson, seul le nom avait changé", comme pour balancer en pleine gueule ce qu'il pense de la stagnation qu'il ne désire pas connaître avec
Edguy, ceci sur fond de métaphore sur les différentes vies d'un chat. Subtil!
Une fois assimilé, ce disque nous emmène de surprise en surprise car, si le côté hard est évident, paradoxalement, les Allemands ont été très soigneux sur les arrangements qui parsèment les titres, à l’image du déjà classique «
Ministry of Saints », blindé de bruitages bizarroïdes et modernes (des sortes de sons mécaniques). D’ailleurs, en ce qui concerne ce titre, je ne comprends pas ceux qui le trouvent niais, bien au contraire. Et même si son intro surprend (on croirait du
Black Sabbath pendant dix secondes !), le refrain est très accrocheur et le pont musical sur fond d’arpèges est très agréable et semble taillé pour la scène. Je pense que la plupart des nouveaux morceaux feront des ravages lors de la prochaine tournée car ils sentent le live à plein nez, ils sont nés pour ça, et les refrains de cet album ne pourront vous laisser de marbre (celui de « 9-2-9 », particulièrement facile à retenir et « catchy » à souhait), comme sur n’importe quel opus d’
Edguy en fin de compte.
Alors, oui, il ne s’agit pas de leur meilleur album, mais il montre clairement le
Edguy d’hier et le
Edguy de demain sur cinquante minutes, tout en conservant cet humour si communicatif, à l’instar de l’épilogue « Aren’t you a Little Pervert Too », sorte de country débridé qui conclut d’une façon qui n’est pas sans rappeler le non moins hilarant «
Life and Times of a Bonus
Track ».
Certains diront que Tobias reste sur ses acquis, je ne suis pas d’accord d’un point de vue vocal, car sa voix, de plus en plus rocailleuse avec le temps, est toujours superbe et un vrai exemple pour les apprentis chanteurs, tant il la module comme il le désire. Certes, la réussite repose encore une fois en partie sur ses épaules, car si les musiciens sont impeccables, c’est bien lui qui fait de ces morceaux, à priori banals, de véritables perles artistiques. Ce sont ces détails qui font que les grands artistes perdurent dans le temps (écoutez attentivement sa performance sur «
Nine Lives »), et sur ce point, Tobias fait non seulement partie des plus grands actuellement, mais n’a également plus rien à apprendre de personne.
Ensuite, des extaits ne m'auront pas forcement convaincu mais j'attend pour juger, ça ne sert à rien d'être positif ou négatif avant (vous trouverez de toute façon ma chronique dans quelques semaines)
Quand a the scarecrow, c'est un album beaucoup moins accessible qu'il n'y parait, avec un feeling et une émotion de tout les instants, et une réelle élaboration (voir ma chro.)donc je serai loin de dire que c'est un album "moyen". Mais je suis conscient que le regard des fans sur Tobias change, mais il reste unique selon moi. C'est ce que l'on appelle l'évolution!!
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