Transparent !
Oui, ce troisième album de
Megadeth fut, et resta dans la carrière si prolifique du groupe de Dave Mustaine un album oublié, perdu dans le temps, coincé entre deux monstres indomptables et intouchables que sont "Peace Sells…But Who’s Buying" et "
Rust In Peace".
Frappé et abattu par la drogue et l’alcool, Mustaine était à cette époque très loin d’être dans son état d’esprit premier, le départ de
Chris Poland n’ayant sans doute rien arrangé.
C’est sans doute pour ces raisons que "So
Far, So Good…So What !" ne ressemble à aucun autre album, ou peut-être uniquement de "Killing Is My Business...
And Business Is Good". Car ce troisième opus pue la mort, le soufre, la rage, la guerre et la mort. Il semble être le déchaînement des victimes de chambres capitonnées, le résultat des hurlements de souffrance de ces hommes maudits.
Les solos déchirants et effrayants de noirceur de l’introduction instrumentale que représente "Into the Lungs of
Hell" lacèrent votre esprit, et se font l’écho de la douleur de la guerre, concept de cet album.
Si la technique n’est pas en reste, elle effacera la virtuosité du précédent opus au profit d’une production plus rêche et parfois clinique, d’une froideur extrême. Les guitares ne sont que le reflet de cette lame qui vous coupe la gorge, qui tranche cette chair putride et humaine, les riffs se font sifflants, malsains et torturés à l’extrême. Ils remplissent l’espace sonore au profit d’une basse annihilée dans un mix quasi-absent, ils abreuvent notre esprit de cauchemar, délaissant loin derrière le simple thrash ayant fait leur renommée, et lançant comme un ultime affront à un
Metallica s’enfonçant dans des sphères déjà plus progressives.
Ce déchainement de haine trouve son aboutissement dans le premier véritable titre, terrorisant "Set the World Afire", œuvre suprême de violence psychologique où la terreur se fait planante et atmosphérique. A travers des riffs supersoniques et ébouriffants de technique (à noter la participation sans faille de Jeff Young, guitariste pour cet unique album), le chant de Mustaine ne fait que vomir une rage envers une humanité réduite à s’autodétruire lamentablement, les effets de distorsion parsemant sa voix renvoyant aux démons intérieurs et schizophréniques. Sa performance est stupéfiante, la drogue aidant peut-être, rarement ses solis n’auront véhiculés tant de furie et de malaise, délaissant la mélodie afin de se consacrer (volontairement ?) sur une atmosphère quasi-inhumaine.
Mais si tout l’album pouvait se vanter d’être de la sorte, "So
Far, So Good…So What !" ne serait pas l’opus fantôme qu’il est. Car si effroyable soit cette entrée en matière, aussi anachronique apparaîtra la suite, à l’image de cet "Anarchy in the U.K" n’ayant absolument rien à faire sur un tel disque.
Si Mötley Crüe se sont donner la joie de reprendre de manière furieuse ce classique des
Sex Pistols,
Megadeth parait ici bien palots, vierge de toute sensation et inutile (entendre un refrain sur un tel album est déjà en soi incompréhensible !).
Manifestement sous l’emprise d’une inspiration hors de contrôle, cet opus donne l’impression de partir dans tous les sens, sans cohérence, ce manque de cohérence qui en fera également une perle si intéressante, comme encore plus synonyme de cette folie que voulait reproduire Mustaine.
Ainsi, la semi ballade
Mary Jane dévoilera une qualité d’interprétation énorme, où les chorus de guitare malsains et sous mixées côtoient un chant presque propre, où Dave évoque un amour qu’il ne verra plus jamais, trop occupé à recevoir une bombe en travers des boyaux. Des boyaux qui se tordent face au texte poignant relatant les derniers instants d’une vie bafouée par la guerre (sous une pluie de solis rageurs et tranchants) et devant un Dave hurlant une rage et une injustice envers cette mort qu’il n’a pas demandée.
Trente cinq minutes ! En trente cinq petites minutes,
Megadeth offre un disque aussi marquant qu’absent de la mémoire collective, comme effacé car trop « vrai ».
Un Mustaine à nu, cru comme jamais sur 502 délivrant des interventions guitaristiques robotiques et noyés sous une couche d’effets parfois peu reluisante.
Et en paradoxe au final plus que moyen que représente Hook in Mounth, le magistral et planant In My
Darkest Hour (en hommage à Cliff Burton), délivrant une âme malsaine se déployant au dessus de nous pour mieux nous pénétrer en plein cœur terminera de faire de cet album bien plus qu’un raté.
Au travers d’harmonies terrifiantes et sur un riff posé et aliénant, le chant, presque narratif de Dave, se pose en chantre, litanie d’une vie stoppée bien trop tôt par une faucheuse omniprésente. Très angoissante, la chanson monte en intensité au fur et à mesure que de nouvelles pistes de guitare se place dessus, comme des lueurs démoniaques avant le déchainement de colère soliste.
Unique ? non. Indispensable ? oui, clairement. So
Far, So Good…So What ! est un album qu’il se faut de posséder afin d’appréhender la carrière du génie roux, de comprendre l’avant et l’après, également pour prendre conscience de l’impact des drogues sur un processus d’enregistrement et de composition (
Rust In Peace ayant été réalisé alors que Mustaine sortait de cure de désintoxication et que marty Friedman, fraichement arrivé, était encore complètement clean).
Une œuvre atypique dans une carrière ayant presque tout connue à travers les années, cet album reste une porte vers un monde apocalyptique, sans autre outil qu’une guitare et qu’une âme manifestement écorchée par la vie, un monde apocalyptique dans lequel nous vivons depuis notre naissance…
Attachant, inégal, et profondément marquant, malgré des titres moins directs ("502"", "Mary Jane").
Achete comme "peace" en import US..."So far..." est certainement le disque de Mustaine que je prefere meme si je pense ne pas l avoir autant ecouté que son predecesseur. L analyse du Moustre est certainement la plus avisée sur ce côté chaotique et bancal....A l'epoque je me demandais bien comment Mustaine faisait pour changer de musiciens aussi regulirement. D ailleurs je me rappelle d un Metal Hammer (1992...????) blindé de posters des grands du Thrash...dont 1 avec notre rouquin et sa bande de 7.62 en guise de ceinture autour de la taille...
Juste pour "In my darkest hour"
16/20
Mon clic d'approbation pour ce texte complétement habité. Bravo !
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