Ne revenons pas trop longuement sur
Risk sur lequel tous les débats possibles auront été faits ces dernières décennies. Résumons simplement, et sommairement, l’affaire, en disant que ce disque possède des morceaux intéressants mais tellement éloignés, du moins pour certains, de ceux que
Megadeth nous avait offerts jusqu’alors, qu’il ne pouvait que décevoir. Disons, en d’autres termes, ce que beaucoup disent, il n’aurait jamais dû sortir estampillé du nom de
Megadeth. Pour ma part, pour être tout à fait franc, même si je partage cette avis c’est à posteriori car, à l’époque, j’avais déjà abandonné le navire depuis deux ans après un Cryptic Writtings que je trouvais déjà décevant.
Bien décidé à revenir à une musique plus conventionnelle, à un Thrash
Metal aux relents Heavy très prononcés, et débarrassé d’un Marty Friedmann avec lequel il n’arrivait plus à s’entendre musicalement (comme on dit pudiquement dans le milieu) remplacé par Al Pitrelli, Dave Mustaine, et ses comparses, s’enferment aux Henson Recording Studios d’Hollywood, afin de donner un successeur à ce très décrié
Risk. Ce nouvel opus sera baptisé
The World Needs a Hero et, disons-le d’emblée, sa réussite commerciale sera assez relative. Ce qui aura pour conséquence de rendre furieux le guitariste, chanteur et leader emblématique de
Megadeth, le poussant à accuser, entre autres, ce nouveau média, internet, et sa cohorte d’individus prompts à voler, appelons un chat un chat, le travail des artistes en le téléchargeant illégalement sur toutes sortes de plateformes, elles aussi, peu concernées par ce qui est licite ou non. Évidemment, difficile de ne pas accréditer cette thèse. Difficile de lui donner totalement tort. Toutefois, il y a sans doute d’autres raisons à cet échec.
Déjà, pour commencer, chacun est bien libre de penser ce qu’il veut de
Countdown To Extinction et de
Youthanasia, qui étaient déjà, soit dit en passant, deux disques assez différents de leurs prédécesseurs, faisant encore un pas de plus vers le territoire Heavy
Metal, mais
Skin o' My Teeth et Reckonning Day, qui démarrait chacun de ces opus, étaient deux titres forts qui marquaient de leur empreinte indélébile nos esprits. Ce que
Disconnect n’est absolument pas. Même l’académique
Trust qui entamait un
Cryptic Writings qui déjà, ne faisait pas l’unanimité, était, en un sens, plus intéressant. Or, la seconde impression que nous laisse un album, suivant presque immédiatement cette première offerte par la pochette (sur laquelle nous reviendrons plus tard), est cruciale.
Une entame poussive donc. Et la suite de cet opus ne viendra pas vraiment bouleverser ce premier ressenti. Un
The World Needs a Hero un poil plus convaincant mais assez convenu, un
Moto Psycho aux refrains moyens ou un 1000 Times Goodbye sympathique mais sans plus viendront, en effet, difficilement réveiller notre enthousiasme.
Avec la ballade
Promises, sur laquelle on retrouvera Suzie Katayama pour ce qui est des arrangements de cordes (violons notamment) et Al Pitrelli à la composition (la seule pour laquelle il est crédité d’ailleurs), on en vient à se demander si on n'a pas à faire à une piste issue de la session de composition de
Risk. Même si, soyons honnêtes, elle garde suffisamment de tenue pour ne pas totalement nous consterner.
Bref, on est déçu. Et ce d’autant plus qu’il manque ici, le plus souvent, l’essentiel : de la hargne.
Autrefois, excédé par son éviction de
Metallica, qu’il n’oubliera jamais vraiment pour des raisons liées à la manière expéditive dont James Hetfield et les siens l’ont écarté (euphémisme) sans lui donner ne serait-ce qu’une seconde chance, Dave Mustaine avait déclaré : « Une seule chose m'obsédait : je voulais du sang… le leur.». Cette rage, cette tension, ce flux épais et sombre, ont indubitablement donné naissance aux premiers albums délicieusement vindicatifs de
Megadeth. Or, il y a dans ce
The World Needs a Hero une forme d’apaisement, de renoncement presque, qui, créativement, dessert ce disque. Une sorte de quiétude que, pourtant, la pochette superbement gore de ce disque, où l’on voit à nouveau Vic
Rattlehead (absent depuis ce
Rust In Peace de 1990) jaillir d’un cadavre sanguinolent n’indique pas et que des chansons tels que
Burning Bridges, Recipe For
Hate...
Warhorse, Dread
And The
Fugitive Mind,
Return To
Hangar ou When viennent aussi, fort heureusement, démentir. Mais que c’est peu pour le groupe qui aura composé des missiles tels que Killing Is My Business...
And Business Is Good ou
Wake Up Dead, pour ne citer que ceux-là.
Objectivement, on ne peut nier que ce disque aura été l’une des nombreuses victimes de ce changement d’époque qui aura vu de nombreuses œuvres disparaître dans les fils de cette toile libertaire où beaucoup aiment à prendre sans donner. Objectivement, on ne peut pas nier non plus qu’artistiquement elle n’était sans doute pas tout à fait la mieux armée pour lutter.
Une belle base qui amènera une belle brochette d'albums jusqu'au surpuissant endgame
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