Après l'énorme succès d'un
Demanufacture (1995) élevé désormais au rang d'indispensable et de classique du
Metal (et pas seulement industriel),
Fear Factory décide de remixer cet album - déjà culte à l'époque, à peine deux ans plus tard et c'est donc en 1997 que sort ce
Remanufacture dont le titre complet est en fait
Remanufacture (Cloning Technology).
On pourra rappeler que les thèmes abordés par le groupe sont ceux des machines et de leurs rapports parfois hostiles avec l'homme, et il s'agit donc de mêler ces thèmes futuristes et d'anticipation (homme/machine) que l'on retrouve dans de nombreux ouvrages ou films (
Terminator n'est pas loin). La justification, l'esprit de ce remix, est le suivant : "Technology has learned to duplicate, rebuild, and
Remanufacture reality and humanity", c'est-à-dire "la technologie a appris à dupliquer - dédoubler plus exactement, reconstruire, et re-fabriquer la réalité et l'humanité". On pensera inévitablement au film Matrix dans lequel les machines réalisent la prouesse de reconstruire et d'imposer aux hommes, asservis par elles, un monde totalement virtuel (jusqu'au goût).
La lutte contre la conformité est donc devenue, selon le groupe, une enquête, une étude étendue sur cette technologie qui travaille contre le principe d'individualité et de non conformité. Chaque morceau présenté est donc re-fabriqué avec les éléments de son original dans le but de servir cette enquête, cette recherche de la vérité et de la lutte pour un monde non conformiste. Pourtant cette enquête/étude sera un échec partiel. Car autant
Demanufacture avait su faire un naître un véritable engouement, autant
Remanufacture suscitera de l'incompréhension.
Il faut dire que le côté metal de l'oeuvre primitive est complètement absorbé par l'
ADN de la musique électronique, ce qui a pu logiquement rebuter pas mal de metalheads. A mon sens le problème est plus à chercher de ce côté que d'un argument qui consisterait à dire ou conclure que metal et électronique seraient fondamentalement incompatibles ou missibles seulement à doses électro-homéopathiques. Après tout on a bien vu le rap et le metal se mélanger dans un accouplement que d'aucun aurait jugé antérieurement improbable.
Quand je parle d'électronique je parle bien entendu de musiques électroniques au sens large car nous avons droit à une "revisitation" ici très diversifiée, qui va chercher des sonorités dans divers courants de l'électronique comme la techno hardcore, drum'n'bass, le breakbeat ou hip hop. Pour un auditeur, que ces styles musicaux ne rebuteraient pas, et qui aimerait
Fear Factory, cette galette est évidemment quasiment indispensable. Vous trouvez que cela fait beaucoup de conditions pour apprécier le disque ? Bon et bien vous venez de comprendre pourquoi il n'a pas rencontré le succès espéré.
Pourtant il n'est pas dénué d'intérêt, il est même franchement très intéressant. Ainsi, par exemple, sur "
Remanufacture" (ex "
Demanufacture" sur l'album de 1995) aux accents drum and bass, "National Panel Beating" (ex "Body
Hammer") ou "Genetic Blueprint" (ex "New
Breed") qui lorgnent vers le breakbeat/hip hop/trip hop. De manière générale l'influence électronique est plutôt à rechercher du côté du breakbeat, entendu au sens large. Toutefois on retrouvera aussi de la techno hardcore sur "T-1000" (ex H-K sur l'album de 1995) ou "Machines of
Hate" (ex "Self Bias Resistor").
Le morceau le plus réussi, enfin celui dont la valeur ajoutée me semble la plus probable, reste toutefois "21st
Century Jesus" (ex Pisschrist) qui déjà était absolument magnifique dans sa version originelle et qui a réussi ici à conserver un côté sombre et froid typique de l'electro-indus, avec un petit côté psychédélique qui me fait penser à du bigbeat que l'on peut retrouver chez THE CHEMICAL BROTHERS. S'ensuivra une plage d'ambient avec le titre "Bound for Forgiveness", ce qui est compréhensible puisqu'il s'agit ici d'une nouvelle (très nouvelle) version de "A
Therapy for
Pain", magnifique morceau de clôture sur l'album
Demanufacture. Et je dois dire que ce morceau calme, sans égaler l'original, est très prenant lui aussi et retranscrit parfaitement une atmosphère d'un futur ravagé et sans espoir. Enfin le titre "Refinery" nous plonge directement au coeur même de l'unité de production (il s'agit en fait d'un sample de bruits de machines en action).
Que dire en conclusion ? Le côté électronique est je pense trop présent, c'est à mon sens cela qui a dérangé le public traditionnel du groupe. Toutefois ces morceaux revisités ne sont pas inintéressants mais l'intérêt reste toutefois limité pour un non fan. A réserver à ceux qui apprécient à la fois l'électronique diversifiée (dont bien sûr le hip hop) et le metal, ou tout simplement aux curieux ou à ceux dont l'esprit est suffisamment ouvert. Car si le résultat n'est pas exceptionnel, il reste cependant très honorable. Un bon album, bizarre et hétérogène, mais bon.
Note : 15/20.
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