Probablement dans sa phase créative la plus productive, la plus salvatrice, celle ayant donné vie au magistral "
Hellfire Club", album rejetant loin derrière toute forme de concurrence dans le monde aseptisé du heavy speed mélodique, Tobias Sammet avait, un mois avant la sortie du fabuleux club infernal, proposé un ep qui dévoilant déjà la puissance sous laquelle allait crouler les fans des allemands.
Car si "
Hellfire Club" est indispensable de bout en bout, il ne va pas sans dire que l’excellence émanant de ces faces B résonne presque comme une insulte insolente à la face d’une industrie du disque sortant groupe sur groupe à tour de bras sans y chercher réelle qualité ou innovation. Les groupes rêvant de possédant ne serait-ce que la moitié de la qualité de ces titres volontairement mis de côté dans leur opus ne pourront que baver face à un mini album regorgeant de brulots mélodiques, puissants et gouvernés par la chant si impressionnant en cette année 2004 de Tobias, incorporant une brutalité à ses riffs dont il nous avait si peu habitué (et dont il n’usera que sur ce disque, à mon grand désarroi !).
Aidé par une production dévastatrice faite « à la main », dans le studio de Sascha mais entièrement autoproduit,
Edguy allait redessiner les contours d’une scène heavy qui avait bien besoin d’un petit dépoussiérage, en alliant rapidité, technique, mélodie et hymne pour nous offrir ce maître album condamner à devenir culte dans le paysage mélodique actuel.
"
King of Fools" ouvre le bal avec des claviers futuristes afin de poser un riff de plomb, extrêmement lourd et saccadé, laissant un Tobias s’exprimer de manière bien plus directe qu’à l’accoutumé, voyant même sa voix passée au vocodeur. Le refrain arrive, mélodique, facile d’accès et déclenche immédiatement un battement de crane frénétique en nous tandis que la basse se fait de plus en plus pesante, menaçante. Quelques chœurs s’envolent doucereusement sur un morceau taillé pour le live, mid tempo ravageur comme si peu arrive à en composer de si passionnant aujourd’hui (à noter que le solo de la version single est considérablement écourté !).
Mais l’intérêt de ce mini ep résidé évidemment dans ses quatre titres inédits, loin d’être ici uniquement pour la figuration. "New Age
Messiah", sur lequel apparait l’orchestre Babelserg en introduction, dévoile toutes les subtilités d’un
Edguy au summum de sa forme (dans la veine d'un "
Babylon"), où Tobias réalise de petites prouesses vocales, alliant second degré dans ses vocalises si originales et puissance vocale sur le refrain laissant pantois.
Le solo ultra mélodique typique de Jens Ludwig (un guitariste qui, s’il est très loin d’avoir un potentiel technique immense, sait marquer de son empreinte unique les morceaux, enfonçant des guitars hero dans âme !) nous laisse en terrain connu, connu mais transcendé par une puissance rythmique de feu instauré par un Felix Bonhke étonnant (le pont alliant uniquement batterie et chant, sublime).
L’énorme et ravageur "The
Savage Union", complètement symptomatique de l’esprit de l’album à venir, nous fera nous demander pourquoi il ne figure pas sur le disque. Un riff d’ouverture très puissant, se dilatant rapidement en une mélodie splendide, mais sans trace de second degré, pour faire apparaitre un Tobias usant d’un vibrato qu’il maîtrise si bien, pour faire éclater toutes les variations dont il peut faire profiter la musique d’
Edguy.
Mais le titre le plus sujet à controverse aura été "
Holy Water", morceau initialement single puis au simple rang de face B, pour on ne sait quelle raison (label ?).
En effet, la teneur très mélodique, presque paradoxale à
King of Fools, aurait peut-être été une mauvaise tentative commerciale, et le groupe fraichement signé chez
Nuclear Blast aura peut-être dû faire quelques concessions.
Un titre splendide, où la basse de Tobias se fait écho du chant de Sammet, soutenue par des claviers angéliques et propulsé par un refrain magnifique et unique. Tobias y est étonnant d’émotion, y chantant avec rage et passion, pourtant emplie d’une beauté surnaturelle.
L’entame du solo, non mixée (conférant un très léger aspect industriel) et orchestral, se déguste avec un solo descendu des cieux.
Un titre magnifique, gagnant sans doute encore en magie du fait qu’il soit rare et méconnue, comme une pierre précieuse cachée au milieu d’une couronne sertie d’énormes diamants.
S’ajoutera (comme toujours) le débile "
Life And Times Of A Bonus
Track", probablement le meilleur morceau dans cette veine de Tobias, réellement drôle et non lourde, contant la vie d’un titre bonus, condamné à voyager illégalement de pays en pays, de téléchargement en téléchargement sans jamais voir la lumière du jour ( ?).
Au final ? Un disque de vingt et une minutes ayant la particularité d’être presque aussi indispensable qu’un album complet, pour peu que l’on soit adorateur du lutin allemand apportant une nouvelle pierre à un édifice en constante construction, l’édifice d’un artisan d’un art perdu et bafoué par le temps et les incohérences.
Que c'est bon...merci pour ton commentaire!
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