Inévitablement en plus d’un quart de siècle d’existence, les aléas et turpitudes en tous genres de la vie ne peuvent qu’engendrer des évolutions dans les rares combos atteignant ce cap, et qui sinon, comme dans les vieux couples chers au regretté Jaques Brel, risqueraient de sombrer dans la routine coutumière. La force de l’habitude vous fait alors faire les choses instinctivement, mécaniquement, sans vous renouveler ou vous poser de questions. Le confort de la maitrise et la maturité sont autant d’éléments pouvant rendre léthargiques toute à la fois vos envies et votre créativité, inévitablement jusqu’à ce que vos os blanchissent.
Iced Earth sera à cet égard un parfait contre exemple à l’érosion et à l’usure du temps à travers une alchimie musicale proposée et assénée depuis des lustres certes ; mais qui n’a néanmoins pas prise une ride ! Le
Metal de son mentor Jon Schaffer est toujours le même depuis la genèse du combo, -ou plutôt depuis le «
Burnt Offerings » de 1995 et l’arrivée de La voix Barlow-, et son fil conducteur tramé dans le Heavy/power/Thrash reste inexorablement inchangé, soit. Il n’empêchera que les éléments extérieurs et intrinsèquement liés aux fluctuations du line up auront toujours permis d’éviter d’une part la monotonie, et de l’autre de rebooster continuellement la créativité et motivation du Sieur par des coups de fouets sanguins liés à l’apport de forces vives et nouvelles.
Exit les –courtes- époques du
Judas Priest Tim «
Ripper » Owens, oubliée la légende où l’intraveineuse temporaire du Cop scientifique succombant à une certaine forme de lassitude (quoique allant œuvrer chez
Pyramaze !)son excellence Sir Matthew Barlow, achevée la trilogie des Setians qui mine de rien nous aura tenue en haleine une décennie entre le «
Something Wicked This Way Comes » de 1998 et sa Part II en 2008, « The
Crucible Of Man ». Mis à l’écart un «
The Glorious Burden » conceptuel et tant décrié par des fans devenus légions sans pitiés et hurlant au crime de lèse majesté quant cet opus est pour certains le plus adulé d’une discographie haut de gamme, et dont je n’hésiterais pas à clamer que je fais partie intégrante. Fin de diverses ères donc avec l’arrivée d’un nouveau chanteur somme toute inconnu, un certain Stu Block du sirop d’érable mortuaire,
Into Eternity ! Parlons en d’emblée car le sujet sera forcément disséqué vu ses deux illustres prédécesseurs (mes sincères excuses pour l’omission de
Gene Adam, killing joke) et avouons le sans sinécure : Il s’agit d’une sacrée bonne pioche pour le
Maestro Jon ! Le chainon manquant entre le Tim et sa propension à monter dans les aigus d’un coté, et le cachet, l’unicité et la chaleur du timbre du divin rouquin. A l’exemple, certes pouvant être affublé de stéréotype, mais pourtant o combien véridique, l’
Anette Olzon des nightouiche aurait pu vous faire craindre pour cet
Iced Earth nouvelle mouture le vieil adage :« Un être vous manque et tout est dépeuplé ». Et bien pour ceux n’appréciant pas le combo, pas de chances, et vous repasserez.
La parenthèse du nouveau vocaliste étant réglée, -même si perso, Matthew restera toujours à mon sens La Voix du combo, je le répète-, encore faut il savoir si ce «
Dystopia » a du talent, des tripes, du corps…Et de l’esprit. Et autant vous dire que de coté là, il n’en manque point, en aucun cas. Les marques de fabriques sont toujours aussi présentes, telle cette propension unique à nous pondre des rythmiques de guitares gore en véritables cisailles dignes de
Saw et si particulières de ce combo que l’on peut immédiatement identifier à la première écoute, quant tant d’autres se noient dans la masse et le conglomérat ambiant. Pour les néophytes ou ceux découvrant le groupe, une écoute du «
Tribute to the Gods » de 2002 et les reprises tonitruantes de standards des Blue Oyster Cult,
Kiss,
Black Sabbath et autres Ac/dc seraient beaucoup plus explicites quant à la magie sonore concoctée que mes propos dythirambiques quant à cet état de fait.
Iced Earth possède des labels catégoriels uniques comme celui précité, ou cette créativité du riff qui tue, de la composition qui envoie comme seul un Schaffer sait les pondre. Une douzaine d’équivalents au grand maximum sur la planète
Metal actuelle, c’est vous dire combien le mec et son génie sont uniques…
Et dès l’entame du titre éponyme, on aura tôt fait de saisir que le band veut, et va !, faire feu de tout bois. Hargneux et corrosif comme aux meilleurs jours,
Dystopia assène et envoie son petit bois d’entrée. Poutrée, charpentée, acérée et accrocheuse à souhaits, la musicalité du Sieur Jon et son acolyte Stu gagne la partie d’emblée. Un renouvellement du « peps » peut-être lié à l’arrivée du nouveau, aux ruptures des habitudes, à voir, mais le couillu des compositions délivré vous fait capituler viscéralement comme les suivants « Boiling Point» et autres «
Dark City »… Les ilots aux tempos de quiétude plus relatifs tel un «
End Of Innocence », condamnant ce putain de crabe si nocif, empreint de profondeur, vécu et véracité ; ou une intro volatile sur «
Anguish Of Youth » seront en tous points convaincants eux aussi.
Iced Earth manie la trique et la caresse avec un savoir faire déjà connu, mais de manière plus convaincante que jamais. Les quelques langueurs ou poncifs apparus subrepticement dans les deux précédents « Framing
Armageddon » et «
Crucible Of Man » sont ici aux abonnés absents, et en parallèle l’étreinte ne se relâchera jamais sur notre ressenti et assentiment jusqu’au bouquet final bien nommé «
Tragedy And Triumph » et sa surprise capella. Le commun des pékins pensait avoir subodoré un début de baisse de régime chez
Iced Earth, autant dire qu’ils ont mis à coté de la plaque.
Dystopia dégouline de sang neuf et va s’affirmer comme l’un des scuds les plus conquérants de la discographie du groupe, n’en déplaise aux chasseurs de dinosaures.
La période avant Barlow est sympa aussi, mais si tu veux les essentielles de ces albums, Days of Purgatory est suffisant.
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