La technique.
Instrument inégalement réparti selon les êtres humains, plus ou moins doués, outil aussi indispensable que relégable au second plan selon son utilité ou son contexte, certains l’ont volontairement rejeté tandis que d’autres en ont fait leur fer de lance.
Il n’est pas difficile d’admettre que
Dream Theater fait partie de ces groupes qui attisent haine et adoration car leur utilisation, parfois abusive, de la technique à outrance a de quoi rebuter le néophyte autant que de faire sa
Liver le musicien. Mais l’artiste ?
Longtemps après leur début, ayant évolué au gré du temps qui passe,
Dream Theater a surpris une nouvelle fois son monde avec
Systematic Chaos, pour beaucoup dans le mauvais sens du terme.
A des années lumières du feeling de
Images and Words ou de l’ambiance maladive et glaçante de
Six Degrees of Inner Turbulence, mais largement plus intéressant que le faussement mélancolique
Octavarium,
Systematic Chaos aborde de prime abord un concept étrange. Traitant de l’oubli, de la destruction, de l’annihilation humaine autant que de galeries plus métaphoriques ("The
Dark Eternal Night"),
Systematic Chaos se montre beaucoup plus vindicatif dans le fond que par le passé… et la musique a suivi presque naturellement le même chemin.
Plus sombre et abrupte dans les sonorités, ce neuvième album, sans réellement marquer un tournant, démontre l’envie insatiable d’évoluer, sans pour autant éviter de se répéter.
Car le son, dans son ensemble, les compositions, le toucher si particulier de Petrucci, le chant si caractéristique (est-ce un compliment ?) de
James LaBrie ainsi que la machine de guerre Portnoy derrière les fûts sont plus que jamais présents.
Mais irrésistiblement, des innovations demeurent.
La structure d’"In the
Presence of Enemies", ouvrant et fermant le disque pour un total de vingt-cinq minutes, est déjà quelque peu originale.
La première partie, très instrumentale, laisse éclater lors des cinq premières minutes les multiples extravagances des musiciens, avec une prédominance synthétique d’un
Jordan Rudess impérial et de plus en plus impressionnant (selon moi l’homme le plus extraordinaire du groupe). Pourtant, une grande mélodie demeure, une ligne directrice, un point d’ancrage autour duquel se bâtit le morceau, avant de voir apparaître un LaBrie intimiste, presque touchant et s’acclimatant bien à la musique.
Mais le problème est et restera invariablement le même. Un tel chanteur, ayant une approche très typique des vocalises, souvent limitées, ne peut que faire redescendre un soufflé que les musiciens placent toujours très haut.
Si l’on prend l’exemple de "
Forsaken", à la mélodie de piano belle et agréablement mélancolique, tout en restant complètement dans les conventions du genre, James n’est pas capable de transcender un morceau qui mériterait largement mieux. Certes, les soli absolument géniaux de
John Petrucci en font un titre de bravoure, mais il reste inéluctablement ce léger « mais ».
Pourtant, à l’écoute de "
Constant Motion", "The
Dark Eternal Night" ou encore "The
Ministry of
Lost Souls", son timbre s’acclimate mieux, et presque parfaitement sur le premier des titres cités.
Sans doute l’ambiance plus sombre, plus thrash de "
Constant Motion" lui offre plus de libertés, même s’il s’évertue à parfois plagier un certain Hetfield. Cependant, les guitares, incroyables de bout en bout, sont un véritable bonheur pour les oreilles, et le solo de claviers une perle indispensable.
De même, il semble que
Meshuggah ait également inspiré nos chers Américains, tant "The
Dark Eternal Night" transpire cette atmosphère mathcore, notamment dans la ligne de basse (à ne pas y croire lorsque l’on voit John Myung) très saccadée et inhumaine, mécanique, tandis que Mike Portnoy (très lourd niveau batterie) et Labrie tranchent radicalement avec leurs vocaux hurlés saturés à outrance pour un résultat des plus agressifs et robotiques.
Le titre contient également comme riff final celui que
Dream Theater auto-proclame comme le plus heavy, sombre et brutal de son histoire, superposant un solo de Rudess complètement schizophrénique et improvisé en studio, gardé intact dès le premier essai.
Restera le très décevant et inutile "Prophets of
War", hybride pop électronique ridicule et inconsistante, ridiculisant complètement un Labrie à côté de la plaque et un Petrucci absent, le morceau reposant presque uniquement sur des claviers d’une mièvrerie sans commune mesure, loin de la grandeur des deux dernières compositions, aux tournures des plus progressives et inattendues.
Que dire de plus… ?
Dream Theater reste
Dream Theater… avec ses incomparables qualités et ses indéniables défauts…
Dream Theater est grand, c’est incontestable ! Ensuite, libre à chacun de se forger un avis définitif.
Les mélodies de la chanson "The Ministry of Lost Souls" m'ont particulièrement marqué.
Mais j'avoue que moi non plus je n'accroche pas trop aux passages les plus pop de l'album, je les passe. N'empêche, ça reste un très bon album avec une technique juste incroyable!
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