Le reniement du passé est une funeste attitude. Et pour lutter contre le présent et créer de l'avenir, le passé est souvent l'arme la plus efficace.
Cette belle phrase a beau ne pas être de moi, elle est une parfaite introduction en ce qui concerne cet album de
Behemoth. Si aujourd'hui il ne peut exister un deathster qui ne connaisse pas le nom de
Behemoth grâce à leurs albums «
Demigod », «
The Apostasy » ou le fantastique «
Evangelion », il faut néanmoins savoir que malgré leur succès international en tant que groupe de Death
Metal, les Polonais n'ont pas toujours été plongés dans la brutalité technique et diablement efficace qu'on leur connaît aujourd'hui. En effet,
Nergal et ses compagnons ont autrefois été un groupe de Black
Metal aux touches
Pagan, plus caractérisé par une low production, des éléments Folk et une voix criarde que par le chant guttural, les blasts dévastateurs d'
Inferno et les riffs lourds et méchants d'
Orion et
Seth.
Mais autre temps, autre mœurs. Alors que par l'excellent «
Evangelion »
Behemoth se veut être l'un des groupes de Death les plus populaires de notre époque, il va nous falloir fermer les yeux et se laisser emporter dans ce tourbillon païen et faire un bond dans le temps de 14 ans !
S'il est bien différent des productions actuelles, ce « Sventevith (Storming
Near the Baltic) » n'en reste pas moins une excellente production de Black
Metal : la musique est jouée avec cœur, personnalité, émotion, et bien qu'elle n'invente rien dans le style, elle arrive à en tirer tous les bons éléments et à les sublimer.
La voix de
Nergal se veut assez enrouée, criarde et parfois écorchée, ce qui rebutera certains fans actuels. En revanche, elle colle merveilleusement bien avec l'atmosphère de l'album, nous entraînant à plusieurs reprises dans de sombres forêts ou encore des plaines dévastées par le froid hivernal que les Européens de l'est connaissent si bien. Cette voix qui a le bon goût de ne pas se transformer en chant clair à la manière de «
Grom » demandera un temps d'adaptation si vous ne connaissez le groupe qu'à partir de «
Satanica », mais une fois que vous aurez franchi cette barrière de répulsion, vous y découvrirez une hargne et une haine profonde dans les envolées lyriques de
Nergal, au nom de sa patrie de l'est. Elle ajoute à la fois une touche de tristesse, mais aussi de nervosité à la musique parfois difficile d'accès à cause du son distordu des guitares et de la basse, et la relative faiblesse de la batterie bien qu'elle ne peine pas non plus à se faire entendre.
En revanche, malgré ces défauts de production - et c'est là que l'on reconnaît le talent - , le groupe ne peine pas à nous faire entrer dans son jeu par des riffs épiques et entraînants qui restent sans difficulté en tête après les premières écoutes. Que ce soit le premier morceau « Chant of the Eastern Lands » qui annonce la couleur d'entrée, le très connu « From the
Pagan Vastland » encore joué en live par le groupe, malgré le fait que cela soit certainement leur plus vieux morceau, ou le magnifique « Wolves Guard my Coffin » qui est certainement l'un des morceaux le plus marquants avant son refrain répété sans cesse qui vous fera headbanguer sans coup férir pourvu que vous soyez emmenés par leur jeu.
Bien entendu, il serait difficile de parler d'albums
Pagan sans référence à au moins un morceau acoustique. Eh bien vous avez raison et c'est dès la deuxième compo que cet élément classique, mais tellement efficace, pointera le bout de son nez, j'ai nommé « The Touch of Nya ». Cette instrumentale est courte, mais offre une parfaite ouverture à « From the
Pagan Vastlands ». L'expérience est répétée deux autres fois au long du cd par le biais de «
Ancient » un morceau toutefois différent, car plus proche de la musique classique, mais tellement bon pour
Amener « Entering the Faustian Soul » et ainsi aborder la deuxième partie de l'album. C'est donc non sans regret que le troisième instrumental annonce la fin de l'album en conciliant les claviers de «
Ancient » et la guitare de « The Touch of Nya ». La voix profonde de
Nergal nous guide pour ces derniers pas dans le temps.
Ils ont réussi à nous démontrer que, quelle que soit leur période, ils étaient très bons, capables de manier différents styles tout en faisant évoluer l'essence de leur musique sans jamais tomber dans la facilité ou le manque de personnalité. Ils font de la musique avant tout pour eux et cela se ressent dans cet album qui (même si je l'ai déjà dit c'est important) est imprégné de personnalité et d'émotion propres aux membres du groupe, ceux-ci exprimant alors leurs idées et leur passion différemment d'aujourd'hui, mais avec toujours ce petit quelque chose qui fait qu'on les apprécie autant.
Certains puristes du Death que le groupe produit actuellement pourront trouver que je fais beaucoup d'éloges pour un album dispensable vu ce qu'ils sont devenus depuis «
Satanica » et «
Thelema 6 ». Seulement on n'enterre pas si facilement le passé, surtout lorsqu'il est aussi délectable que celui-ci.
Valentheris.
La période BM de Behemoth était sublime. Cela un manque un peu de revoir un Behemoth comme cela.
Bonne chronique !
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