Aaaaaah,
Dimmu Borgir... Ses orchestrations grandiloquentes, son gros label, ses hordes de fans, sa production en béton, ses claviers au top... Voici la recette de ses albums, y compris pour le dernier en date, qui en dépit de toutes ces forces, ne fait pas l'unanimité. Surprenant ? Peut-être pas. Car si vous ne connaissez pas les débuts des Norvégiens, vous n'avez pas toutes les cartes en main pour comprendre les raisons d'une telle déception :
Dimmu Borgir a depuis longtemps vendu son âme, non pas au diable, mais au Dieu pognon. Mais fi des controverses. En
1994, le groupe avait sorti quelques démos, mais devait encore faire ses preuves. Si l'étape du premier album est souvent décisive et donne le ton pour la suite de la carrière d'un artiste... Nous sommes en face du meilleur exemple d'exception à cette règle car tout ce que vous connaissez du groupe peut-être laissé au placard à l'écoute de
For All Tid.
Il suffit de regarder les membres du groupe pour constater la première grande différence : seuls Shagrath et Silenoz sont toujours dans
Dimmu Borgir, de nos jours, mais pas aux mêmes postes. Car sur
For All Tid, en plus de tenir sa guitare, Silenoz chante tandis que son compère, alors âgé de 17 ans s'occupe de la batterie ( encore que ce dernier partage le travail au chant ). Logiquement, l'image de leur musique s'en ressent énormément : pas d'effet sur la voix, qui est ici bien plus Black que maintenant : plus grasse, plus râpée...
Plus malsaine et ça, c'est important. Des voix claires ? Oui, il y en a, mais peu, sur une seule chanson ( "Over Bleknede Blåner Till Dommedag" ) et c'est un membre invité qui s'en charge... Mais l'effet est plutôt raté et on a la désagréable impression qu'il chante faux ( dommage car à côté, la chanson est bien composée ).
Et les changements ne s'arrêtent pas à la voix. Musicalement, on est à des années-lumière d'un
Puritanical Euphoric Misanthropia. Ici, pas de grandiloquence décadente, mais des chansons artisanales, avec bien moins de fioriture. Budget oblige,
Dimmu Borgir se contente d'un clavier un brin synthétique, mais qui s'intègre au final bien à leur musique. Son utilisation est des plus maîtrisée, et il magnifie la musique ( la chanson titre en est la meilleure illustration. ) Ils ajoutent beaucoup de mélancolie aux chansons. Car en plus d'être malsain ( comme les autres le sont encore de nos jours, ou au moins essayent de l'être ), l'album dégage une atmosphère morose et belle à la fois. La pochette exprime avec efficacité cet aspect, avec cet homme seul sur son cheval, face à un château, figure immense, le dépassant en tout point de vue illustre très bien ce côté nostalgique et contemplatif. Pour ceux que cela intéresse, il s'agit d'une illustration par Gustave Doré représentant Camelot.
La production, elle aussi est plus artisanale, sans être vraiment raw. Problème de budget ou volonté consciente ? Aucune idée, mais le résultat sied tout à fait à cet album. Les guitares, elles, sont également très différentes ( mais ça, vous vous en doutiez bien ). Elles sont saturées, parfois à tel point que le son en est très crade ( voir à nouveau la chanson titre ), mais ça ne fait que renforcer la noirceur des passages où elles jouent de cette façon. D'une manière générale, elles sont moins techniques que maintenant, les riffs sont moins recherchés car avant tout, ce sur quoi travaillait
Dimmu Borgir à l'époque était les ambiances et c'est d'ailleurs très réussi. Qui plus est, le jeu de batterie est bien moins violent, moins rapide et moins technique, ( mais bon, n'est pas
Hellhammer qui veut ). Résultat des courses :
Dimmu Borgir dégage beaucoup moins de puissance, ce qui est logique puisque tel n'est pas l'objectif.
For All Tid était un premier album très réussis. Certains lui reprocheront son côté brouillon ou mal produit, mais il a un argument que les dernières sorties n'ont pas : sa sincérité sans faille. Car si aujourd'hui,
Dimmu Borgir chante en anglais, adopte une production du tonnerre et des voix moins Black, attisant ainsi les controverses à son sujet, leurs deux premiers albums, eux, étaient produits avec les tripes et ça se sent dans chaque riff, chaque ligne de basse, chaque coup donné à la batterie, chaque mélodie au clavier, chaque mot chanté...
Dimmu Borgir avait une âme et méritait déjà la gloire, sans avoir besoin de tous les artifices qu'ils emploient de nos jours. Est-ce finalement leur faute ou celle du public qui n'avait rien compris ?
Peu importe, les choses sont telles qu'elles sont et
For All Tid mérite toute votre attention car c'est un disque qui démontre que le Black
Metal peut être beau, ne serait-ce que pour la chanson titre de tout beauté ou pour "De Nye Riket", avec juste le synthétiseur et la voix parlée... Il contient tous les ingrédients nécessaires à un bon album. 16/20 pour ce début qui ne laissait en rien prévoir la suite.
sinon bonne chronique
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