Comme a dit Confucius (dans ses rares moments où il n’était pas élitiste et myso) « une image vaut mille mots ». L’aperçu de la pochette donne d’une certaine façon raison au vieux philosophe chinois : un trône central, un noir personnage les fesses dessus et une couleur verte des plus mystiques.
Un symbolisme derrière ? Non, juste une illustration assez parlante de la principale thématique de ce troisième album bourrin de
Dimmu Borgir sorti en mai 1997. Un peu plus parlante en tout cas que le titre pompeux "
Enthrone Darkness Triumphant ". Rien que pour cette audace, je ne vais pas prendre de gants avec cette galette.
Mais avant toute chose...
I – LA QUESTION QUI TUE : un pompage en règle d’In the
Nightside Eclipse d’
Emperor ?
Le Norsk Black
Metal (prononcez la formule de façon caverneuse) étant ce qu’il est, je vais laisser la parole à quelques « spécialistes » :
« - P’tain ! Pourquoi qu’la midinette qu’on a épargnée nous a convoqués ici !?
-
Pas pour ton goût pour la bière en tout cas.
- Faux, Ingal : Kiru est toujours plus inspiré quand il est soûl.
- Bon, alors, elle nous veut quoi cette fille qui dit s'appeler Lunuy ?!
- Elle voudrait qu’on compare ITNE avec EDT...
- QUOI ?!?!? JAMAIS !!!! JE VEUX PLUS EN ENTENDRE PARLER DES MANCHOTS EMPEROR OU DES TOUTMOU BURGER !!!
- Chut ! Moins fort ! Faut pas que les copains ou les Deatheux sachent qu’on ait là, ils jaseraient !
- Grrr ! J’vois pas pourquoi on lui dirait ce qu’on n’en pense !
- Allez, Kiru, un petit effort pour la belle. Elle était bien sympa.
- Ok ! Le v’là mon avis :
Ihsahn aurait dû jeter ses synthés par la fenêtre dès "Wrath of the
Tyrant"... ! NON, en fait, bien avant ! Lui et Samoth, ils ont rien fait d’autre que cacher leurs bras cassés de guitaristes ou de batteur derrière des murs insupportables de claviers qui pètent plus haut que leur cul ! Bien fait pour eux si Toutmou burger leur a repris tout le plan des hyper-couches (culottes) superposées sur leur saleté d’EDT !
Et je reste poli !
- Mouais… et toi, t’en penses quoi, Ingal ?
- ‘L’a pas complètement tort : niveau technique ou composition, Dimmu a tout copier sur mon cher
Emperor, c’est bien connu.
- T’as des preuves de ce que tu avances, là ?
- M’enfin Yurz, elles sont évidentes ! Les claviers d’EDT sont arrangés de la même façon par rapport aux guitares. Pareil pour la progression ou l'enchaînement des titres. Et quelles que soient les rythmiques, on a un large éventail de mélodies... En fait, ils ont juste choisi des guitares et une batterie surproduites et moins tranchantes et des titres plus courts pour que cela passent mieux auprès des pseudo-fans de Black. Tsss ! Ne me dis pas que tu ne l’as pas remarqué ?
- Tu sais, moi et
Emperor... je préfère le
Moon in the Scorpio de
Limbonic Art ou le
Nexus Polaris de
Covenant*, donc... Mais je crois que t’exagère un peu : par rapport à In the
Nightside Eclipse, Shagrath a un chant plus en avant qu'
Ihsahn ; les arrangements des claviers sont moins denses ou envahissants par rapport aux autres instruments et leurs sonorités différentes, avec moins de simulation de chœurs ; et puis il y a un vrai piano en plus, déjà présent sur Stormblast, qui donne une...
- Bon, on’ va pas y passer la nuit, les gars ! 'Marre des blagues symphos pour trends-minettes ! J’ai gaspillé ma salive et j’ai soif ! ‘M’en vais de suite boire une bonne blonde !
- Je crois bien qu’on va en rester là, Yurz, sinon Kiru va encore piquer une crise de nerfs.
- Ouais, t’as raison Ingal. De toute façon, on a déjà tout dit. Allons le suivre au bar avant qu’il nous pique la meilleure bouteille. »
[*Ancien nom du groupe
The Kovenant]
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Fin de l’intermède, hélas sans grand intérêt...
Crédits : trois sympathiques « Black fâcheux » rencontrés par ma pomme sur les comm’ de la « chronique » notant 04/20 le
Spiritual Black Dimensions de Dimmu (quatrième opus, 1999, avec
Vortex au chant clair).
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II – L’accroche personnelle / les premières impressions
Si l'on considère ses deux premières œuvres,
Dimmu Borgir a complètement changé d’approche avec son troisième album : tempo nettement plus rapide ; constructions des morceaux moins composites ; aucun interlude instrumental et titres possédant à peu près la même durée.
Je vais être franche : j’ai été subjuguée à la première écoute d’EDT. Et à la deuxième. Et à la troisième...
On me signale que le Black sympho de Dimmu est devenu artificiel, pompeux à partir de l'arrivée du groupe chez
Nuclear Blast ? ‘M’en contrefiche ! Ça passe comme une lettre à la poste chez moi !
Mais au diable les étiquettes traditionnelles ! Pour moi, ce n’est pas du Symphonic ou du Melodic Black
Metal, mais du "Physique Black Math" ! ("physique" en anglais pour plastique en français ; math pour mathématiques).
Une précision de matheux et un souci du détail digne d’un peintre néo-classique qu’ils ont eu, les compositeurs, dans la confection de leurs compositions !
Considérons les sonorités : de massifs riffs de guitares Heavy carrés de chez carrés ; des assauts des percussions ultra calibrés au centimètre dans les compositions ; des lignes de synthés et de piano fichtrement bien ajustés avec l’ensemble ; des arrangements vocaux sans faute de bout en bout...
Alors qu’un titre comme l’ouverture " Mourning
Palace " distille une atmosphère lourde et froide, des ambiances bien variées donnent un petit côté ésotérique à des tueries au tempo très soutenu, telles que "
Spellbound (by the
Devil)", " The
Night Masquerade " ou "
Master of Disharmony ".
Si l’on résume, Dimmu nous offre un " Physique Black Math " aux coups imparables, qui placent les Ténèbres définitivement sur le trône dès la première minute de l’écoute : une percée de la mêlée en plein centre par des assauts directs (blast-beats/rythmiques Speed), de savantes manœuvres sur les flancs (mid-tempo) ou quelques feintes (breaks centraux des arrangements néo-classiques) avant de redoutables contre-attaques (solos de guitares/retour de la batterie)...
Les Noirs dominent les Blancs dans cette intense partie semi-rapide de plus de 50 minutes !
Et pour finir en beauté, la ballade " A Succubus in
Rapture " envoie la Dame noire exécuter un interminable baiser de la mort au Roi blanc : Échec et Mat à la Lumière !
... Mais bon, ne soyons pas trop naïve...
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III – L’exploration en profondeurs des Ténèbres... pas si profondes que ça, en fait...
D’abord, qu’on ne vienne pas me dire que ce disque est en tout point irréprochable sur le plan (ultra-)technique. Mon oreille aguerrie en a entendu des notes pas très bien rendues. Et on dit après que Dimmu se permet d’avoir une production exagérément clean, en particulier au niveau des guitares ou de la batterie ?
Enfin... c’est juste un détail insignifiant ; que certaines fréquences soient plus ou moins diminuées par rapport à l’ensemble, ce genre de chose s’est déjà entendues maintes et maintes fois avec d'autres groupes de Black
Metal... et souvent, cela allait dans le sens de la démarche artistique de ces derniers.
Par contre, côté sonorités, il y a quelques petits trucs qui me chiffonnent sur EDT :
Les arrangements des claviers ? « Zolis, Zolis » ! Mais bien trop kitsch par moments !
Les lignes de piano ou de carillon (glockenspiel électronique ?) sur " In Death’s Embrace " ou "
Entrance " demeurent linéaires et répétitives pour pas grand chose ; la couche de synthé de " Relinquishement of
Spirit and
Flesh " et l'ambiance orientale (via des simulations de chœurs) de "
Tormentor of Christian Souls " sonnent un trop superflues...
De trop le piano ? Non : il est plus discret, inquiétant et inspiré sur d’autres pistes, notamment sur " Prudence’s
Fall "... Tant mieux !
Le chant principal ? Euh... Wahooou ! « Vachement impressionnante » la voix de Shagrath, avec son chant hurlé et réverbéré, tellement torturé que c’est à s’en décrocher la mâchoire ! (mauvais jeu de mots, je sais, mais c’était trop tentant) Ah, parfois on a droit à quelque growls... Très bien !
La voix éthérée de la " guest star " Bente Engen à la fin de " The
Night Masquerade " ? Pfiouuu ! Surprenante et provocante !
Ah, et les paroles... tellement imaginatives !
Invoquer les forces des Ténèbres, l'obscurité et
Satan, c’est important, mais quand même ! Que certains titres soient un peu plus mystérieux ! " In Death’s Embrace " ; " The
Night Masquerade " ; "
Master of Disharmony "... Le sommet de la caricature est atteint avec le refrain très neu-neu de " A Succubus in
Rapture ".
Au moins le précédent
Stormblåst, malgré ses petits passages mous du genou et ces vocaux perfectibles, savait lui surprendre avec ses titres et ses textes écrits en norvégien et ses compositions bien plus complexes.
Tiens, au fait, ce retour en force des guitares et de la batterie après ce chant lent de Shagrath... ou ces petits accords néo-classiques introductifs des morceaux ou usés comme de brusques breaks atmos... ou même ces solos très Heavy des guitares... ou encore ce rythme général très soutenu... Je sens le copier-coller d’un ou plusieurs morceaux de certaines productions sorties courant 1996 par d'autres forma...
[S’interrompe par un raclement de gorge :] Hum-hum ! Non ! Ne faisons pas bondir les fan(atique)s de Dimmu. Ce serait tellement cruel... Et qui sait ? Si ça se trouve, je me perdrai dans de douteuses comparaisons stylistiques... Je n’ai pas la prétention d’avoir la science infuse, moi ! Contrairement à certaines personnes...
CONCLUSION / NOTATION
J’ai beau me prétendre matérialiste, mon esprit lunatique n’en ait pas moins un peu déboussolée par cette galette. " Very
Evil " malgré les claviers ? Je n’irais pas jusqu’à dire ça. Je rejoindrais plutôt l’avis d’un certain chat noir : plus mystique que malsain.
Que dire d’autre, sinon ? Tout le monde sait que c’est à partir de cet album que la scène Black
Metal (norvégienne, en particulier) va copieusement vilipender et brocarder le groupe, cet ange noir renégat osant se servir de manière immodérée d’arrangements néo-classiques, de mélodies ou de rythmiques plus Heavy ou Thrash que Black, ou d’une production très clean... En somme, pour les puristes, du « Black commercial », aux orchestrations devenant de plus en plus boulimiques avec le temps – ça viendrait de là ce sobriquet « Dimmu burger » ?
Et puis tiens, pour le coup, j’vais pas noter cet album EDT tant critiqué (et décrié). Donner un stupide nombre d’un ou deux chiffres ? Rien à cirer ! J’veux pas polémiquer !
Mon avis n’est qu’un avis parmi tant d’autres...
Lunuy.
En bref une réalisation majestueuse.
20/20 inéchangeable.
Cet album en soi est excellent.
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