«
Saxon wants you » semble nous dire le général Kitchener, grand héros des guerres du Soudan, son doigt pointé en notre direction, sur la couverture de ce 19ème opus d’un groupe qui aura incarné le heavy metal britannique pendant près de 35 ans. Après un «
Into the Labyrinth » assez moyen, on espérait voir revenir la bande à Biff Byford à l’assaut, baïonnette au fusil, avec de biens meilleures intentions, de vraies envies de guerre. «
Call to Arms » est annoncé comme un retour aux sources. Rien de plus motivant, quand on sait le nombre de batailles remportées notamment durant la période 80-85. Époque de gloire et de conquête pour l‘illustre formation. «
Saxon » n’est cependant plus aussi frétillant qu’à la grande époque. «
Call to Arms », malgré son apparence jaunie et défraichie, arriverait à nous rendre nostalgique.
Cette redescente revigorante dans les eighties se produit instantanément dès «
Hammer of the Gods ». Titre bien aidé par ses riffs aguicheurs et vigoureux. On nous offre un morceau énergique, dompté par des solis assourdissants digne d’un très grand «
Saxon ». Le hic serait ici situé au niveau du chant de Biff Byford, donnant cette sensation étrange de se détacher de la musique. Le terme « burn » ne se justifiera jamais autant que sur «
Afterburner », jouissant d’un dynamisme pur de la part des membres, suant sang et eau pour le pur plaisir des auditeurs. Il s’agira là du titre le plus puissant et le plus performant de l’album. Les autres titres n’auront pas cette même prestance et transcendance. Le ton sera bien souvent en dessous.
«
Saxon » fera intensément revivre les années 80 avec certains titres oscillants entre le heavy et le hard. Parfait exemple, « Back in 79 » se voudra bien percutant. Le rythme à l’ancienne est d’ailleurs tout ce qu’il y a de plus prenant. Si ce n’est qu’il se montre extrêmement répétitif. « Chasing the
Bullet » aussi, rappele davantage le «
Saxon » de l’époque dorée. Celui-ci se montrera très plat malgré son côté sexy et nonchalant. Le retour dans le temps réussira beaucoup mieux au hard rock musclé de « Surviving Against the Odds ». Biff donne parfaitement la mesure. On vous envoie directement la sauce, une sauce relevée qui pourrait paraitre peu originale et déjà maintes fois goûtée. Pareil en ce qui concerne «
Ballad of the Working Men ». Le groove des riffs rappellerait d’ailleurs plus directement l’ère «
Strong Arm of the Law » - «
Denim and Leather » sans parvenir non plus à égaler le moindre morceau de ces dits albums.
Dans une dimension plus actuelle, on retrouve un «
Saxon » tempéré et posé. Un «
Saxon » que l’on ignorait quelque peu, ambiancé par les claviers de
Don Airey (
Deep Purple) sur « Mists of
Avalon », et sur « When
Doomsday Comes ». Si « Mists of
Avalon » malgré son caractère apaisant, ne laissera pas un grand souvenir (peut être trop niais et linéaire pour être pris en considération), « When
Doomsday Comes », qui sera inclus dans la bande son du film anglais «
Hybrid Theory » réalisé par James Erskine, attirera davantage l’attention. L’impression de pénétrer dans un environnement étrange et malsain s’y fait sentir. Quelques airs symphoniques peu orgueilleux ont été introduits, apportant une certaine consistance au morceau. Cela reste toutefois assez prévisible et peu ambitieux.
L’obscurité réussirait mieux encore à « No Rest for the Wisked ». Ombrageux, surtout à travers la voix d’un Biff Byford possédé, le titre, sans véritablement se démarquer de l‘album, montre un aspect sombre et dément tout à fait appréciable. Même la mélancolie du refrain est parfaitement à sa place. C’est déjà moins pauvre musicalement que sur le titre éponyme qui privilégiera d’une version symphonique sur la piste 11. «
Call to Arms » n’est pas le grand titre attendu de la part d’un éponyme de «
Saxon ». On se confine ici à une pseudo ballade assez pâle au niveau de la prestation des divers instruments. On partage ici la même lassitude du talentueux chanteur, mais pas pour les mêmes raisons que lui en toute vraisemblance.
C’est un «
Saxon » égal à lui-même que l’on retrouve sur ce «
Call to Arms ». Se remettant à chaque fois en question, sans en aucune façon trahir les principes du heavy metal. Le groupe se sera nettement éloigné de la profondeur qui imbibait le duo «
Lionheart » - «
The Inner Sanctum ». S’en dégageant plus nettement que l’avait fait «
Into the Labyrinth », pour procéder ici à un long retour en arrière. Le procédé comblera les plus fervents admirateurs de l’ancienne période, plus encore ceux qui l’auront totalement oublié. «
Saxon » cherche son glorieux passé, espérant rebondir sur son futur, mais depuis, bien des traces ont été effacées. Le groupe ne peut plus produire de tubes comme à cette époque. «
Afterburner » ne fait évidemment pas le poids en comparaison des titres sortis entre
1980 et 1985. Le groupe a vécu et vivra encore. Mais les traits sont tirés. Comme Kitchener durant la première guerre mondiale, «
Saxon », n’accomplissant plus aucun fait d‘arme, reste malgré tout une vitrine de la machine de guerre du heavy metal britannique.
13/20
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