Après trois longues années de silence, les Finlandais d'
Apocalyptica se sont décidés à offrir à leurs fans un nouvel album. C'est une double première car c'est leur premier album live, et leur premier album symphonique.
"
Wagner Reloaded" est né de la collaboration du groupe avec le MDR Symphony Orchestra, dirigé par Sven Helbig, et le chorégraphe Gregor Seyffert. Ce dernier a imaginé un spectacle monumental, incluant danse, musique, effets spéciaux, et retraçant la vie du célèbre compositeur, Richard Wagner, à l'occasion de son deux centième anniversaire. Qui mieux que Wagner peut se prêter à une réinterprétation "metal" ? De ces deux heures de spectacle mêlant des morceaux anciens et nouveaux d'
Apocalyptica aux œuvres (métallisées ou orchestrales) de Wagner, le groupe a tiré 14 pistes entièrement nouvelles (si l'on excepte "
Creation Of Notes" qui est une réorchestration de "
Worlds Collide" de l'album du même nom), pour notre plus grand bonheur.
L'album s'ouvre avec les puissantes sonneries de trompes de "
Signal". Puis, dès "Genesis" et "
Fight Against
Monsters", on découvre une musique qui ne ressemble que peu à ce à quoi nous a habitué
Apocalyptica. Pour autant, il ne s'agit pas non plus d'une simple réinterprétation du répertoire classique. Dans une même vibration se fondent le metal et le symphonique,
Apocalyptica et Wagner. Plutôt que de se niveler, ces pôles opposés s'enrichissent mutuellement. Le plaisir que prennent les violoncellistes à retrouver leurs racines classiques pour les mêler au metal est palpable, et l'alchimie entre le groupe et l'orchestre est parfaite.
Un défaut qu'on peut trouver au metal dit symphonique est la place de l'orchestre : tantôt utilisé en nappe sonore d'arrière-plan, tantôt pour rehausser un morceau préexistant pour une "édition spéciale" ; il est rare que l'orchestre n'ait pas un rôle très subalterne par rapport au groupe qu'il accompagne. Peu d'albums parviennent à marier le metal et le classique de façon équilibrée. "
Wagner Reloaded" est assurément de ceux-ci.
On sent que les morceaux ont, dès le début, été composés avec la dimension symphonique en tête, si bien que l'album entier prend la forme d'un véritable concerto pour
Apocalyptica et orchestre. Le groupe de metal et l'ensemble symphonique tantôt se répondent, tantôt jouent ensemble et s'accompagnent. Des morceaux comme "
Flying Dutchman" ou "
Path In
Life" commencent par des introductions orchestrales aux styles rappelant Wagner, Grieg ou Dvorak, qui sont brutalement coupées par des riffs de violoncelles saturés ; puis l'orchestre revient et les thèmes s'entremêlent. Même "
Creation Of Notes", qui semble initialement n'être qu'une version saupoudrée de violons de "
Worlds Collide", se révèle plus puissante et plus complexe que le morceau d'origine.
Globalement, la proportion de morceaux lents et doux est étonnamment élevée pour un album de metal, si bien que certains pourraient lui reprocher un manque d'énergie. "Birth
Pain" est notamment très longue, et, si cette longueur se justifie scénographiquement et orchestralement, il est plus difficile au métalleux sans
Culture classique de l'apprécier.
Le seul défaut que je trouve à cet album est technique, et inhérent aux conditions de l'enregistrement live : la qualité du son (notamment pour les violoncelles d'
Apocalyptica) n'est pas au niveau de ce qu'on a pu connaître sur les albums précédents, et quelques fausses notes, aussi bien dans les violoncelles que dans l'orchestre, titilleront les oreilles les plus sensibles.
Pour le reste, il s'agit d'une heure de pur plaisir face à cette œuvre d'une créativité dévastatrice et rafraîchissante à la fois. Nos violoncellistes en ressortent ressourcés, leur inspiration réveillée, ce qui présage du meilleur pour leur album suivant.
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