Liste des groupes Heavy Symphonique Apocalyptica Cell-0

« La beauté est comme une fleur, qui naît, et en peu de temps meurt. »

Difficile d’imaginer un quelconque monde sans émerveillement et sans fantaisie. Si la féérie n’est qu’éphémère, elle fait découler en nous une véritable émotion, une explosion de nos cinq sens et un pouvoir de persuasion. Cette somptuosité est parfois innée, taillée dans nos veines et s’exprime librement comme un poisson dans l’eau. Mais la majeure partie du temps, il faut la sculpter, la dompter, la perfectionner pour qu’elle révèle ses meilleurs traits. Comme un artiste peignant ses toiles ou un musicien composant ses titres, cette grâce grandit et éclot sous diverses formes avant d’atteindre un jour son apothéose.

Dans des termes d’harmonie et de classicité, Apocalyptica est nul doute un élève brillant. Alliant merveilleusement bien force et légèreté, nos finlandais ont su très rapidement enchanté la scène symphonique avec leurs compositions originales ou de reprises forgées à l’aide de leurs violoncelles et leur batterie et entretiennent encore aujourd’hui leur place parmi les plus grands aux côtés de formations telles que Nightwish, Therion ou encore Delain. Néanmoins, depuis plusieurs années maintenant, sa position est quelque peu déstabilisée. Pour cause, depuis le génialissime éponyme, notre quatuor peine à se montrer créatif et absorbant, additionnant les décevantes mélodies en featuring, voire même à proposer des travaux plus alternatifs comme le critiqué Shadowmaker.

Cell-O marque en ce début d’année la neuvième pièce du groupe. En un instant, nous comprenons tout de suite que cette nouvelle galette ne suivra pas le chemin du dernier opus. Fini le chant, fini les arrangements, Apocalyptica ressort enfin ses cordes et ses percussions. Rien d’autre. Le quatuor revient enfin à sa musique d’antan. Ashes of the Modern World ouvre le bal d’une musique authentique et sincère. A la fois dramatique et puissante, le morceau se veut profond et somptueux. Si la batterie amène ce caractère tempêtueux, tel un ouragan frappant de plein fouet nos terres, les violoncelles apportent cet atmosphère morose et sinueuse. Nos musiciens ne cacheront pas le respect qu’ils ont pour des formations telles que Slayer ou encore Metallica et il ne sera pas étonnant d’entendre des similitudes avec Raining Blood lors de la seconde partie du titre.

La carte de la stupéfaction est de vigueur sur ce dernier décor. A commencer par le titre éponyme de près de dix minutes, jouant principalement sur sa progressivité et son désespoir. Jamais nous n’avions vu les finlandais dans une mélodie si funèbre et pourtant si délicieuse. Alternant périodes plutôt angoissantes et nerveuses à des couplets plus tranquilles et doux, on vit authentiquement cette sensation de mal-être mais aussi de délicatesse. Dans un tout autre registre, Fire & Ice suscite notre intérêt avec des influences folk et celtiques rafraichissantes, pouvant parfaitement convenir à des univers comme Game Of Thrones ou The Witcher.

Cette nouvelle pépite tient son lot de titres forts et il serait inimaginable de ne pas parler de En Route To Mayhem qui est sans aucun doute la plus belle impression de cet album. Ici, la notion de musique prend tout son sens : l’instrumental est impactant, les cordes chantent pour l’ensemble du morceau, l’harmonie est ensorcelante, la progressivité et, de fil en aiguilles la montée en puissance est de mise. La terre et la nature fusionnent pour détruire tout sur leur passage tout en gardant une belle esthétique et fantaisie. Beyond The Stars clôturera d’une bien belle manière cet album en parsemant sa mélodie avec quelques touches de piano et en y ajoutant un voix sinistre en arrière-plan avec des propos forts :

« Des cendres du monde moderne, une nouvelle évolution va naître, avec plus de soin et d'espoir. Cellule par cellule, la nature se guérira; l'équilibre de la terre est rétabli. L'ignorance est devenue notre péché le plus meurtrier, car nous n'avons même pas pleuré sur notre planète mourante. Ces éléments d'égoïsme ont conduit à notre propre destruction. L'homme doit être défait. Trois, deux, un ... lancement. Les humains: partis - perdus, quelque part au-delà des étoiles. Bonne nuit. »

En ces derniers propos, les finlandais ont accouché d’une œuvre complète sans que l’ennui nous guette le moindre instant. Mieux encore, ils ont encore réussi à prouver qu’avec de simples cordes et quelques percussions, la musique pouvait être autant voire plus émotionnelle qu’avec les mots. Si l’opus est encore plus maussade que ses prédécesseurs, il n’en a heureusement pas perdu ses lettres de noblesse et captive tout autant qu’il inquiète.

Empli de désolation et de noirceur, Cell-O étonne par sa profondeur et son élégance. Au-delà de son apparence ténébreuse, cette neuvième production est assurément la plus touchante et la plus pure de la discographie de notre quatuor. Nous sommes ravis de voir une formation qui a retrouvé son savoir-faire, ses automatismes pour proposer un album d’une impeccable qualité sans jamais entrer dans l’excès, ni dans la redondance. Amis symphonistes, cette toile est vôtre !