En 1989 un défi attend les légendaires
Mekong Delta; donner un successeur à l'excellent "
The Music of Erich Zann". Et le groupe de Thrash technique allemand a, dans l'ensemble, réussi son coup (on repassera pour le suspens) en sortant "
The Principle of Doubt", toujours chez Aaarrg Records.
Si "
The Music of Erich Zann" était déjà pervers et malade dans ses mélodies, emmenant l'auditeur aux confins de la folie, (Lovecraft quand tu nous tiens), sur "
The Principle of Doubt" la bande à Ralph Hubert tire encore un peu plus sur la corde. La musique est ici encore plus tordue, vicieuse, labyrinthique et maladive, et c'est là que tout va fondamentalement se jouer pour l'auditeur; ceux qui (entre autres) ont apprécié le précédent opus risquent de ne pas être très dépaysés par un album où le groupe balance dissonances et autres contretemps par caisses de cents, mais pour les autres, surtout ceux qui sont allergiques aux inégalités rythmiques et aux intervalles "inhabituels", l'écoute risque d'avantage de relever de la séance de torture, ni plus, ni moins.
De plus, par intervalles inhabituels, entendez, au delà de l'aspect dissonant des guitares, que la voix de Wolfgang Borgmann est assez particulière, d'abord de par son timbre, souvent comparé à celui d'un palmipède, puis ensuite de par ses lignes mélodiques, véritablement tarabiscotées. Pour faire dans le profane, ça arrive au bougre de ne pas être très juste. (en raison justement de ces lignes vocales abusivement complexes, mais qui restent un élément central et indispensable à l'élaboration des mélodies et donc de l'atmosphère finale vraiment réussie).
Tous ces facteurs contribuent ainsi à créer une atmosphère de folie (au sens propre) réellement prenante pour peu qu'on arrive à rentrer dedans (ce qui sera sans doute la plus grosse difficulté). Le travail sur les instruments est vraiment conséquent, qu'il s'agisse du couple basse/batterie excellemment mis en valeur par la prod', ou des grattes légèrement en retrait ce qui crée une profondeur au tout vraiment appréciable. On retient ainsi de l'ensemble instrumental un talent de composition unique, créant un socle harmonique très solide sublimé par les lignes vocales de W.Borgmann (le travail sur la recherche de mélodies "atypiques" est impressionnant), et une maîtrise technique remarquable.
"The priciple of doubt" est donc la suite logique et réussie de "
The Music of Erich Zann". De là à dire qu'il le surpasse, il y a un pas que je ne franchirai cependant pas. La complexité du tout peut parfois amener à décrocher sur certains passages, même si cela reste bref.
De plus le choix d'intégrer au milieu de l'album des reprises (comme le groupe à l'habitude de le faire) peut nuire à l'ambiance générale, ce qui est vraiment dommageable ("El Colibri").
Cet opus est ainsi peut être le plus obscur, tortueux, et torturé du groupe, qui se tournera après vers quelque chose de plus conventionnel et abordable (toutes proportions gardées) avec "Dances of Death" et "
Kaleidoscope". Il reste ainsi l'un de ces géniaux ovnis du métal, qui font toujours débat entre ceux qui crient au génie et ceux qui ne comprennent rien à tout ce boucan. Ces derniers je les plains.
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