Inébranlable et indétrônable. Même lorsqu’ils furent dans les profondeurs les plus pourrissantes et atrophiées du trou créatif, quand ils étaient dans les affres de la médiocrité et au moment où plus rien ne semblait pouvoir éviter une inéluctable chute vers l’oubli collectif. Même à cet instant, ils y ont cru, sans jamais renoncer, en regardant toujours loin devant, fort et fier comme un roc, l’oiseau
Helloween a continué, envers et contre tout, d’avancer. Les citrouilles n’ont jamais renoncé.
Quinze albums plus tard, ils apparaissent même au firmament d’une carrière exemplaire et marquée par le courage et une passion sans commune mesure. Clairement pas parfaite, la discographie d’
Helloween, emmenée par les vétérans Michael Weikath et Markus Grosskopf, n’a jamais vécu de véritables creux temporels, jamais trois ans ne passant sans une nouvelle livraison du groupe (que ce soit un album studio, de reprises, un live, un best of…) et on peut aujourd’hui clairement dire, depuis "
Rabbit Don’t Come Easy", que la personnalité si typique d’Andy Deris derrière le micro s’est désormais complètement ancrée dans le paysage des citrouilles, la nostalgie de
Michael Kiske ayant enfin disparu. De plus, avec un line up stable depuis cette période (avec le taulier Dani Löble derrière la batterie et le transfuge de
Freedom Call Sascha Gerstner en tant que virtuose à la guitare),
Helloween est revenu en force avec le troisième volet des "Keeper of the
Seven Keys" et il y a trois ans avec leur opus le plus abouti depuis vingt ans, à savoir un "
7 Sinners" ayant pourtant fortement divisé les fans. Sombre et agressif (les photos du livret montrant les membres du groupe reprenant les gimmicks des tueurs en série les plus réputés du cinéma), l’album osait réellement et cassait l’image happy metal des Allemands.
Car il s’agit bien là d’une des recettes de la longévité du quintette, à savoir toujours cette faculté de vivre avec son temps, de ne pas rejeter la modernité et de toujours s’armer d’une production en béton armé propre et coller un coup de pied au cul des trois-quarts de la scène
Power moderne (merci Charlie Bauerfeind !). "
Gambling with the Devil" avait déjà fait un premier pas vers plus de puissance, voire de violence (il suffit de se manger "
Kill It" dans les dents ou de tester ses cervicales sur le surpuissant "Paint a New World") avant que "
7 Sinners" ne mette les petits plats dans les grands.
Tout en revenant à un enrobage clairement moins sombre, "
Straight Out of Hell" (littéralement "Tout droit sorti de l’Enfer") donne d’emblée le ton, son artwork dévoilant des citrouilles chimiquement modifiées, un drapeau de révolte et un panel d’armes de destruction qui ne laisse que peu de chance à un contenu sans puissance.
Pourtant, on ne manquera pas d’avoir des morceaux très convenus et « happy » tels que le sympathique "
Live Now !" (qui ne manquera pas de rappeler "Open your
Life") ou "
Burning Sun", ne formant pourtant pas la matière première du disque.
"
Nabataea" ouvre d’ailleurs le disque dans une speederie comme
Helloween nous l'a habitué depuis quelques années, Dani étant toujours un torpilleur hors pair, suivi de près par un Andy Deris encore une fois très en voix. On remarque immédiatement que la production est un peu plus claire que sur l’album précédent et que la caisse claire se veut moins percutante, plus ronde et clean, atténuant de ce fait un peu l’agressivité du rendu. Mais cela n’entache en aucun cas la puissance de la composition, aux riffs acérés et aux accélérations radicales (Sascha est un véritable génie) débouchant sur un refrain angélique où le blondinet se permet encore de nous faire profiter de vocalises assez hallucinantes pour son âge. Évidemment, comme le groupe nous l’a aussi habitué depuis quelques années, le titre est en lui-même très orchestré, ponctué de nombreuses interventions de claviers qui enrichissent considérablement le spectre sonore, notamment sur le premier break ou encore après le premier solo, où les riffs se font de plus en plus rapides avant une nouvelle accélération qui risque de tout détruire en concert (et ce final où Dani blaste sa caisse claire comme il pouvait le faire dans "Are You
Metal ?").
Les choses se font encore plus radicales avec l’expéditif "World of
War", très mélodique dans son introduction, mais se faisant plus haché et brut de décoffrage après trente secondes. Le ton se fait sombre, Andy crépusculaire et les claviers sentencieux et presque gothiques. Comme toujours, le refrain arrive comme un point d’orgue, un point d’ancrage qui permet à la composition de trouver son for intérieur et de respirer, tout en formant un repaire imparable dans l’esprit de l’auditeur. Composition géniale autant dans son rendu que dans la prise de risques de son approche des plus sombres pour Weiki, "World of
War" est ce genre de titre que l’on aimerait entendre de la nouvelle génération tant elle est la parfaite fusion de tradition et de modernité, d’un groupe ancestral qui, sans jamais renier ses racines, peut faire chavirer les auditeurs plus novices du metal mélodique ou les amateurs de musique plus dure.
Du même calibre, l’énorme titre éponyme se forme sous le même angle. Une première mélodie, presque niaise, avant un riff énormissime qui détruit tout sur son passage, avec un couple basse/batterie à couper le souffle. Et encore une fois, un refrain impossible de se départir une fois qu’il est entré dans la caboche, pas loin d’être parmi les meilleurs depuis pas mal d’albums (écrit par Markus, toujours très appliqué à cet exercice) et, là encore, une paire de soli à tomber avant qu’un break pur et sublime ne nous réapprenne les codes du genre. "
Asshole !" poursuit avec un refrain une fois de plus sous forme de tuerie, mais un couplet étrangement creux, peinant sincèrement à s’extirper d’une mélodie vocale trop convenue et d’un riff faiblard (fait rare quand le morceau est écrit par Sascha). Il suffit pourtant d’entendre la voix de Deris s’envoler sur le refrain pour en faire un instant que l’on voudra réécouter encore et encore…
Oui, il ne faut pas se leurrer, "
Straight Out of Hell" possède les tares similaires à la plupart des livraisons d’
Helloween depuis l’arrivée d’Andy Deris, à savoir son lot de tueries absolues mais encore trop souvent des titres de remplissage qui ne font que remplir l’album pour cinquante minutes (écueil qu’évitait d’ailleurs intelligemment "
7 Sinners"). C’est notamment le cas d’un "Years" anecdotique ou de la ballade "Hold Me in your Arms" bien loin du sublime "
Light the Universe". En revanche, la surprise du tribal "Wanna Be
God" est réelle ; deux minutes où Andy est la seule pulsation du morceau, ponctué par des percussions grandioses et frappées avec rage (on pense assez facilement au "We
Will Rock You" de Queen) avant un ultime riff tout en distorsion. Idem concernant le magnifique "Waiting for the
Thunder" qui, à la manière d’un "As Long I
Fall" ou d’un "
If I Could Fly", se veut très mélodique et mélancolique, livrant une merveille de refrain posée sur une ligne de piano simple mais furieusement émotionnelle. Deris, compositeur du morceau, y chante avec ses tripes et noue les autres.
Vous l’aurez compris, on trouve dans ce "
Straight Out of Hell" ce qui fait depuis trois décennies un excellent opus d’
Helloween, avec ses qualités et ses défauts, tout en retraçant plusieurs époques.
Pas forcément parfait, mais très bon dans ce qu’on attend d’eux, ce quinzième album est un nouveau témoignage de la fidélité du combo pour ses racines, ses fans mais aussi son amour pour la musique et cette expérimentation constante qu’ils tentent d’apporter pour ne jamais complètement se répéter et apporter de nouvelles sensations aux fans. Ouvert sur l’avenir mais toujours avec un œil sur le passé, voilà une belle prouesse d’un groupe qui, plus que jamais, fait rêver trois générations de fans partout dans le monde. Un simple « merci » ne sera pas de trop pour les remercier d’être toujours présents, là où certains ont depuis fort longtemps déposé les armes…
Très bonne chronique sinon (comme souvent avec Eternalis), bien que j'ai quelques points de désaccord: "Years" est pour moi l'un des meilleurs morceaux de cette galette, j'y trouve beaucoup d'émotions dans ses mélodies, tout comme dans "Far From The Stars" dont on ne parle pas.
Nulle mention non plus de "Church Breaks Down", qui pourtant est à mon sens l'un des morceaux clés de l'album.
Une déception pour deux trois titres: "Live Now!", "Make Fire Catch The Fly" et "Asshole", joyeux et happy certes mais sans beaucoup de charme à mes oreilles. Et puis "Hold Me In Your Arms" qui remporte la palme de la pire ballade d'Helloween (surtout quand on pense à "Light The Universe", "In A Middle of a Heartbeat", "Forever And One" ou "If I Knew", et même "Windmill" de Chameleon me paraît mieux, c'est dire).
Mais malgré ses défauts, cet album s'écoute d'une traite et j'en suis fan. Bref, il en vaut l'achat.
Bref, on tient la un des meilleurs albums des maitres du power metal allemand. Happy Helloween !
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