Le dernier
Ulver point encore chroniqué, je me sens comme pour le dernier
Deathspell Omega, tout seul face à la dernière sortie d'un monstre sacré, avec la peur aux tripes de dire de grosses âneries, mais cela a l'avantage d'être stimulant.
Dans ses communiqués, la petite bande d'
Ulver avait prévenu que l'état d'esprit du nouveau disque, l'œuvre se voulait plus intimiste, plus personnelle (en même temps, dire qu'
Ulver fait une musique personnelle relève du pléonasme éhonté), plus douce et mélancolique que les précédents travaux d'
Ulver. Et effectivement, c'est le cas.
Comme d'habitude,
Shadows of the Sun ne ressemble à aucun des disques qu'
Ulver a sortis jusque-là (si le groupe se mettait une seule fois à se répéter, je suppose qu'on pourrait se dire que la formation court à sa perte). Pour autant, bien évidemment, on pourra se servir des précédentes productions pour le définir.
Shadows of the Sun oublie les débauches de
Blood Inside, revient vers une composition plus proche de l'esprit de
Perdition City, mais un esprit qui suit une voie dérivée, où se retrouvent les influences de
Svidd Neger (les influences ambiant jazz de
Perdition City sont bien là, le saxophone planant fait son grand retour, mais les parties néoclassiques y sont beaucoup plus importantes). Bref, prenez ces deux disques, mélangez-les, et imaginez ce qu'ils pourraient donner s'ils étaient encore plus calmes et nostalgiques. Rajoutez-y une petite trace de l'esprit de
Silence Teaches You How to Sing. Vous approcherez peut-être à peu près de ce qu'est ce
Shadows of the Sun.
Comme je suis gentil, je vais tenter d'expliquer ça autrement pour les néophytes :
Ulver fait une musique électro/indus parcourues d'instrus acoustiques (piano, saxophone, instruments à cordes), qui approche dans cet opus une dimension aérienne et nostalgique. C'est plus simple exprimé comme ça, mais c'est un peu réducteur. Difficile de définir un tel disque, à vrai dire.
Shadow Of The Sun est peut-être un des
Ulver les plus difficiles d'accès jamais sortis (avec
Nattens Madrigal, mais pas du tout pour les même raisons), surtout pour ceux qui connaissent la discographie du groupe par cœur. On attend de la folie, on en trouve bien peu. Ici, c'est la transe qu'
Ulver recherche avant tout. C'est un disque qui s'écoute en solitaire, la lumière éteinte, le soir venu, un verre d'alcool à la main. Ce disque est un véritable brûlot émotionnel, que chacun se doit d'apprivoiser à sa manière. C'est peut-être cela que le groupe entendait dans ses communiqués, le fait que l'album soit moins direct (si on peut dire d'un disque d'
Ulver qu'il est direct) et demande à l'auditeur d'aller vers lui, et non le contraire. Apprécier
Shadows of the Sun est une démarche à entreprendre, pas un don de la musique elle-même. Mais la transe n'en est que plus belle.
Que dire ? Oui,
Ulver a signé là un petit chef-d'œuvre.
Ulver reste
Ulver, assemble toujours ses éléments épars avec un génie qui seul rend le disque magnifique au lieu d'être un simple fatras incompréhensible, le groupe compose plus que jamais pour lui-même et met son âme à nu, proposant à l'auditeur un voyage qui n'a pas lieu d'être s'il ne consiste pas en un don de soi à la musique autant que la musique donne à l'auditeur. Et le jeu en vaut la chandelle. Les amateurs ne doivent pas être rebutés par l'aspect très planant, nostalgique et apparemment (apparemment seulement) épuré de leurs habituelles débauches sonores et expérimentales. Quant aux autres, si un disque recherchant une beauté calme et terriblement nostalgique ne les rebute pas, je n'ai qu'une chose à dire : foncez.
Il semble que décidément Garm et sa bande ne me décevront jamais.
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire