Nulle trace de break, de split ou de reformation chez les
Tankard. Depuis la première démo au début des années 80, les petits gars de Francfort ont su mener leur fût de bière de main de maître, faisant fi des modes et des tendances. A l'unanimité,
Tankard, s'il n'a pas toujours sorti des albums mémorables (petit creux qualitatif d'une dizaine d'années après le début des 90's, après un début de carrière admirable boosté par Noise Records), fait partie des quatre gros groupes allemands dans son style. Sans jamais avoir lâché les rênes, le duo Andreas Geremia / Frank Thorwart, présent depuis les débuts, sort tous les deux ans sa nouvelle cuvée, plus ou moins inspirée, mais toujours sympathique à ingurgiter. Non professionnel, le groupe prend un malin plaisir à distiller ses hits en festival par chez nous (récemment au
Fall of Summer 2016 ou au Motocultor et au Gohelle Fest de 2015) et localement où il jouit d'une bonne cote d'amour de l'autre côté du Rhin.
On notera avec plaisir le retour de l'
Alien-mascotte sur la pochette du groupe (pas présent depuis
Beast of Bourbon - 2006 - excellent album par ailleurs, un signe de bonne augure ?), et un changement aux manettes, puisque Martin Buchwalter (Personal
War,
Suidakra) remplace Michael Mainx qui avait produit les trois derniers albums. Ça ne s'entend guère, tant le style
Tankard prend le pas sur le son en lui-même.
Pas d'inquiétude donc à ce sujet.
En général, dans un album de
Tankard, on trouve deux à trois titres au-dessus du lot, et quelquefois des morceaux de remplissage plus ou moins inspirés, significatifs de la qualité globale de la livraison, à l'instar des sorties récentes de
Destruction. "Pay To Pray" laisse vite place à un up-tempo modéré comme le groupe sait bien le faire, avec un Gerre à l'aise au micro, et un refrain réussi, comme souvent avec le groupe. Un bon titre, pas exceptionnel, mais ça donne plutôt un bon point de départ. "
Arena of the True Lies" avec son crescendo de départ (à l'instar d'un "Lock 'Em Up" survolté), son solo mélodique fort réussi et son refrain bien trouvé, fait partie des très bons titres du groupe. Résolument traditionnel, et placé en seconde position, il donne clairement envie d'en écouter plus, à l'instar de la voix un peu plus éraillée de Gerre sur les couplets de "Don't Bullshit Us" et de son tempo rapide. Notons encore une fois un travail remarquable sur le solo d'Andy Gutjahr sur ce titre très efficace (ce qu'on retrouvera plusieurs fois au cours de l'album). Si
Tankard a pu passer parfois pour un groupe linéaire, il n'en est que peu question ici, car l'intro du sautillant "
One Foot in the Grave" ou le refrain épico/heavy de "Northern
Crown" aèrent un disque qui file droit entre les oreilles. Aidé par des refrains frais et dynamiques, la joyeuse bande s'en donne à cœur joie et le fan se trouvera comblé devant un album solide.
Bien sûr, certains titres, sans être mauvais, restent un peu en deçà ("Syrian
Nightmare", "The
Evil That Men Display", rapides et sympathiques, mais nullement mémorables), mais sans non plus faire injure au passé du groupe. Finalement assez homogène en qualité, ce
One Foot in the Grave ne décevra pas. Un mot sur les paroles, pas uniquement axées sur l'alcool, puisque des titres comme "Syrian
Nightmare" ou "Pay To Pray" sont plutôt dénonciateurs, contrebalançant les propos habituels sur la bière ou la déconne. A cela, au rayon réjouissances, s'ajoute de manière distincte le morceau "Secret Order 1516", titre rapide à l'introduction et au final fantastico-épiques (inhabituel pour du
Tankard puisque chœurs et orchestration sont de la partie également sur le superbe refrain digne d'un
Powerwolf), gros morceau relatant... le décret stipulant le procédé de fabrication de la bière (changerons jamais ceux-là, et c'est tant mieux !). Un excellent morceau à tiroirs de plus de sept minutes, qui transforme l'essai, et judicieusement placé dans le séquencement de l'album, avant un "Sole
Grinder" final plus conventionnel (qui finit après quelques secondes de silence par des chœurs de match de foot, rappelant le rapprochement entre le groupe et l'Eintracht de Francfort).
Verdict final, ce
Tankard nouveau se classera dans les bonnes cuvées, au côté d'un
A Girl Called Cerveza ou d'un
Beast of Bourbon, parmi les albums post-2000 les plus réussis. Finalement, l'
Alien judicieusement ressuscité redonne la santé aux thrashers germains, et ceux-ci peuvent continuer à faire vivre leur créature sans risquer le deuxième pied dans la tombe qui n'est pas pour tout de suite.
Merci pour la chro Jérome. Tu as tout dit, et notamment la proposition du groupe d'aller vers quelques titres un peu "différents" du répertoire habituel (même si je ne suis pas un grand connaisseur des skeuds du groupe). Je trouve moi aussi l'album très réussi, davantage que "A Girl Called Cerveza" qui était sympathoche mais pas transcendant quand même. Très bon cru donc, bravo Tankard.
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire