Immutable

ajouter les paroles de l'album
ajouter une chronique/commentaire
Ajouter un fichier audio
16/20
Nom du groupe Meshuggah
Nom de l'album Immutable
Type Album
Date de parution 01 Avril 2022
Style MusicalMetal Expérimental
Membres possèdant cet album55

Tracklist

1.
 Broken Cog
 05:35
2.
 The Abysmal Eye
 04:55
3.
 Light the Shortening Fuse
 04:28
4.
 Phantoms
 04:53
5.
 Ligature Marks
 05:13
6.
 Good He Sees in Mirrors
 05:28
7.
 They Move Below
 09:35
8.
 Kaleidoscope
 04:07
9.
 Black Cathedral
 02:00
10.
 I Am That Thirst
 04:40
11.
 The Faultless
 04:48
12.
 Armies of the Preposterous
 05:15
13.
 Past Tense
 05:46

Durée totale : 01:06:43

Acheter cet album

 $13.67  14,06 €  13,95 €  £7.99  $18.55  16,99 €  15,99 €
Spirit of Metal est soutenu par ses lecteurs. Quand vous achetez via nos liens commerciaux, le site peut gagner une commission

Meshuggah


Chronique @ JeanEdernDesecrator

01 Avril 2022

Other bands djent, Meshuggah kills !

On peut dire de Meshuggah qu'il a un statut à part dans le metal, ayant quasiment enfanté à lui tout seul les styles de metal "moderne" de ces vingt dernières années : ce qu'on appelle le Djent, ainsi qu'une bonne part des groupes de core, metalcore, et deathcore. Tel un dieu créateur, il était là avant tous les autres, posant les bases d'un metal extrêmement lourd, sous accordé et syncopé, a laissé ses ouailles croître et se multiplier, contemplant d'un œil distrait et bienveillant leur disparition définitive. Vu leur position au dessus de la mélée, on attend toujours d'eux d'être les plus forts, les plus à la pointe de la modernité, bien que leur style si reconnaissable ne semble pouvoir changer qu'à la marge ou dans sa forme. Et on pourrait se demander comment, en 2022, ce neuvième LP pourrait apporter quelque chose de neuf qui n'ait pas été fait et copié vingt mille fois avant, y compris par eux-mêmes.

Formé en 1987 à Umeå (Suede), creuset d'où sont sortis des groupes aussi divers que Refused, Cult Of Luna, Nocturnal Rites, ou Moloken, le combo s'est vite démarqué après un premier album plutôt classique, à cheval entre Metallica et Pantera. Leur deuxième effort "Destroy Erase Improve", en 1995 a écrasé tout ce qui se faisait jusqu'alors, et demeure à mon sens un des albums les plus heavy et brutaux jamais sortis… avec "ObZen", leur album de 2006, qui a surélevé encore un peu plus leur piédestal. Leur discographie, plutôt que de suivre une évolution, a exploré de toutes les manières possibles le concept de metal lourdissime à polyrythmie congénitale. Leur dernier LP "The Violent Sleep of Reason", datant de 2016, m'avait cependant déçu avec sa complexité froide de machine forcant autant le respect que le bon sens de la ligne droite, tel un crabe tournant en rond, mais de travers.

Le travail sur le nouveau full length a débuté fin 2019. Le processus créatif des suédois est particulier : chaque membre du groupe participe à la composition (bien que le guitariste Mårten Hagström ait fait la moitié de l'album), la batterie étant programmée par celui qui écrit le morceau, et le groupe ne répète qu'une fois les chansons construites et maquettées. Le guitariste Frederik Thordendal, qui s'était séparé du groupe en 2017 semble revenu aux affaires et a participé à distance à l'enregistrement de "Immutable", en particulier sur les soli, qu'il a fait chez lui et envoyés au groupe.
Cependant, les choses ont été pour le moins compliquées pour le quintet ces derniers mois, avec les problèmes de santé successifs de son batteur Tomas Haake : outre des problèmes de dos se répercutant sur la mobilité de son pied droit, il a souffert ces derniers mois d'eczéma à l'intérieur des mains, l'obligeant à trouver des parades pour pouvoir jouer de la batterie. Malgré ces obstacles, il a pu mener à bien l'enregistrement de ses parties au Sweetspot Studios, et l'amélioration récente de son état lui permet d'envisager la tournée à venir avec un peu plus d'optimisme.

Mais c'est toujours une noirceur qui baigne l'artwork de relativement coloré de "Immutable", dont l'humain dévoré par les flammes n'en lâche pas moins son précieux couteau, allégorie de la permanence des bas instincts de nos congénères. Sauf poisson d'avril, il sera sorti le 1er avril 2022 chez Atomic Fire Records, presque six ans après son prédécesseur.


On rentre dans un album de Meshuggah comme dans un temple antédiluvien, insignifiant devant sa majesté. Tel un craton, roche des premiers âges de la Terre, c'est l'essence primordiale la plus brute de Meshuggah qui se trouve condensée ici. Une lourdeur extrême, un groove chaloupé, une musique plus simple dans ses structures et ses motifs, des riffs très épurés et directs et une production Kolossale. Cet album sonne plein, massif et organique, à l'opposé de la froideur cybernétique de "The Violent Sleep of Reason" qui avait pourtant été enregistré dans les conditions du live. Le morceau d'ouverture "Broken Cog" est un bon résumé de ce que le groupe propose en 2022. Du gros chug où on se demande comment diantre on peut pondre un accord aussi grave et malsain, des notes perchées dans la réverb qui font entrevoir le ciel du paradis du fin fond des crevasses de l'enfer, et le growl implacable rugissant sous les yeux révulsés de Jens Kidman.

La simplicité des parties de guitare est aride, minérale, monolithique, se terminant dans un solo simplissime semblant joué par un bambin-dieu-de-cinq-ans ("Ligature Marks"). Les riffs sont lancinants et vous étirent comme un vulgaire caoutchouc ("The Abysmal Eye", "Kaleidoscope"). Heureusement, les notes ne sont pas uniquement scotchées au fin fond de la grosse corde, comme sur certains riffs qui montent un peu sur le manche (n'exagérons pas, ça ne part pas dans les aigus).
Les signatures rythmiques barbares sont moins cryptiques que d'habitude -quoique sur "Phantoms", Tomas Haake se laisse aller faire twister ses baguettes avec un toucher jazzy de trois tonnes. C'est une musique qui semble se répéter à l'infini dans une galerie des glaces, comme dans ce solo désincarné et autorépliqué : une mise en abime qui va jusqu'à son titre justement nommé "God He Sees Mirrors".
Les guitares nous laissent tout de même des espaces de calme aquatique sur le très beau début de l'instrumental "They Move Below" (presque dix minutes quand même), avant de nous asséner des mouvements éléphantesques alternant mélodies et dissonances, qui semble reprendre de droit ce qui lui appartient dans le jardin de Misha Mansoor. Aussi, l'opus se termine-t-il sur les notes énigmatiques de "Past Tense", dans une quiétude relative qu'on imagine toute provisoire, dans l'intimité des cordes entre elles.

Vu la longueur très conséquente de cet opus (68 minutes), j'avoue avoir un peu eu peur de m'embêter à force d'entendre le groupe répéter ses mantras metalliques avec l'absence de pitié qu'on lui connait tout au long de ces treize (13!!!) titres. C'est en arrivant à la fin du marathon qu'on s'aperçoit que la lassitude a disparu, à moins qu'elle n'ait été qu'une illusion. Car le groupe a su construire et aérer son œuvre, voire y placer des choses qu'on attendait absolument pas de lui, comme un enchainement de trémolos picking purement black, nommé opportunément "Black Cathédral" joués aux guitares seulement, comme des chutes de brainstorming de huit cordes. Un intermède pas si incongru que ça, vu l'ambiance mystique de certains riffs de "I Am That Thirst" qui le suit.

La seule chose que je pourrais reprocher ici concerne le chant de Jens, déjà assez monocorde en général, mais qui manque décidément de relief et de moments forts (à l'exception de quelques parties chuchotées dans "Broken Cog" ou "The Faultless" par exemple), alors que musicalement ses compères nous régalent. La basse de Dick Lövgren, comme souvent, se retrouve juste à gonfler le bas du spectre avec un grondement tectonique pourtant bien audible… dès qu'on tend l'oreille.

Pour risquer une comparaison un peu facile, je dirais que la profondeur de ce disque apparaît quand on le place, au hasard, à côté du dernier Fear Factory, "Aggression Continuum". Deux LP de vieux briscards du métal extrême, connus pour leur violence millimétrée, qui font figure de résumé de carrière. Pour faire simple, celui de Fear Factory m'a déçu, là où celui des suédois m'a rassuré. Meshuggah n'a jamais prétendu être quoi que ce soit, il impose d'autorité sa musique, par le seul fait de la jouer.

7 Commentaires

14 J'aime

Partager

Game_system - 02 Avril 2022:

Merci pur cette chronique bien fournis, que j'ai pris plaisir à lire même si je n'ai jamais été un gros fan de Meshuggah (il n'y a que Detroy Erase Improve qui m'intéresse de chez eux).

Par contre je suis vraiment surpris que tu n'aies pas aimé le dernier Fear Factory, de ce que j'avais écouté, je l'ai trouvé vraiment génial et puissant, d'une redoutable efficacité.

heavyjos84 - 11 Avril 2022:

belle chronicle, des chansons qui ont l'air a se répéter par moment, plusieurs écoute pour adoré, du bon meshuggah comme je les aime depuis maintenant 20 ans, mais une chose je te contredis sur fear factory leur dernier m'a bien plu comparé au dernier et dans il est dans  mes meilleurs. 

JeanEdernDesecrator - 23 Avril 2022:

Game System et Heavyjo84 : merci pour vos commentaires ! Ça fait des années que j'attends ce petit truc qu'avait Fear Factory sur "Soul Of a New Machine", et à chaque album, je suis un peu déçu malheureusement ;-)

Sephiroth26 - 08 Juillet 2023:

Mon album préféré de Meshuggah, je pense que c'est aussi le plus accessible de leur discographie.

    Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire