Sont fous ces japonais. On le savait déjà, les nippons ont une nette tendance à pondre de la musique barrée. je ne citerai que You Oshima avec son projet
Kadenzza, mais c'est déjà assez révélateur. Donc voilà, c'est sorti,
Sigh nous a pondu un opus barré.
Bon, alors quoi ça être? Sortez le chaudron à pot-au-feu, mettez y de bons vocaux black très typés et assez mélodiques sans perdre pour autant leur hargne, des plans thrash/heavy dominant les grattes qui gardent du black un son assez crade (on est très loin d'un son true quand même, hein, c'est juste que les grattes dégoulinent un peu et ce n'est pas un mal d'ailleurs). Laissez mijoter un peu avant de rajouter des solos qui fleurent bon le heavy frais cueilli. Assaisonnez d'une touche symphonique épique et excessive et de sons d'orgue grandiloquents. Achevez le tout en saupoudrant doucement de champs clairs et de choeurs pas courants et pas attendus du tout. N’hésitez pas à habiller de quelques jolis rires machiavéliques avant de servir. Qu'obtenez vous?
Un bordel sans nom, bravo. Enfin, si, il en a un:
Hangman's Hymn. Mais pour un bordel, c'est un bien beau bordel. La musique de
Sigh est complètement décalée, mêlant une grandiloquence pompeuse assez second degré (ce qui rappelle étrangement
Rhapsody d'ailleurs, dans un registre thrash/black évidemment) à des plans brutaux directs et efficaces. Alors évidemment, on n'adhère ou on n'adhère pas, il faut savoir rentrer dans le trip pour apprécier. Les jugements risquent de ne pas faire dans la demi-mesure pour un opus pareil.
L’album est découpé en trois actes, le premier se révélant particulièrement jouissif, parcouru de mélodies improbables et d'envolées épiques dignes d'un Wagner bourré (ou d'un Bruckner sous exta, à la rigueur), et de chants/choeurs clairs qui prennent de court à la première écoute. Le tout agencé sur un système de retour fréquents de refrains courts et très simples à retenir. Oui, je sais, dit comme ça, ça ne ressemble à rien. Ce qui n'est pas faux d'ailleurs. N'empêche que c'est d'une efficacité insoupçonnable (ou alors vous fuirez en hurlant, c'est selon).
Le second est plus classique (enfin, ça reste du thrash/back à la japonaise avec des synthés délirants, hein), cherche moins de mélodiques complexes et joue plus sur des structures rythmiques -toujours directes- que la première partie. Les titres sont rentre dedans et se permettent quelques débauches sonores, mais c'est tout de même plus sage que le début. Heureusement, In
Devil's Arms apporte un souffle supplémentaire à cette partie un peu moins remuante.
La troisième elle, s'oriente plus sur la pompe symphonique (mélange de frénésie et de choeurs/cloches/trompettes pour le premier morceau, les cuivres dominant sur tout l'acte). L'album s'achève d'ailleurs sur un grand moment pompeux/bouffon plein de belles trompettes grandioses et ridicules.
Ce qui nous amène au principal problème de ce disque. Les actes sont effectivement bien distincts, et on trouve une petite tare de structure qui a tendance à diminuer un peu l'impact du disque (bon, la critique qui suit est parfaitement subjective, je préviens tout de suite): l'album débute sur les chapeaux de roue avec les trois titres fou furieux de l'acte 1, avant de laisser un peu de côté cet esprit complètement jeté au cours du deuxième acte, et y revenir d'une manière plus pompeuse et posée sur le dernier acte. Ce qui créé une sorte de "creux" une fois passée l'introduction du deuxième acte, et ce jusqu'à In
Devil's Arms qui relance la machinerie déjantée. Je trouve que quitte à commencer par ouvrir sur un concept aussi fou que celui des trois premiers titres, ils auraient mieux fait de garder cet esprit à peu près constant tout au long de la galette. Car l'acte second en souffre particulièrement, sans être mauvais en soi.
Enfin, ce n'est pas ça qui me fera bouder mon plaisir, cet
Hangman's Hymn est une très bonne découverte et ravira sans doute ceux qui sont assez ouverts d'esprit pour mettre l'oreille sur un disque aussi hors normes.
une mise en scéne grandilocante,
avec un second degré serieux et désopilant
un pur délire de grande classe
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