YT. Voilà deux initiales bien connues des amateurs de la toile. Pourtant, mieux que You Tube, il y a Y&T, le groupe.
Et là, roulements de tambours, je dois vous prévenir que si nous avons tous nos petits chouchous, l’un des miens est sans contestation possible Dave
Meniketti. Alors pas touche à mon idole, sans quoi je peux devenir plus méchant qu’un glamer boy qui ne trouve pas son rimmel avant de monter sur scène, plus féroce qu’un thrasher sevré au hard FM, voire même plus obtus qu’un fan de
Manowar ! Mais pourquoi un tel amour pour ce Dave me demanderez vous certainement. Non ? Ah bon. Tant pis, je m’explique quand même.
En cette rentrée scolaire 1983, je ne connais personne au sein de mon nouvel établissement. Adolescence et timidité faisant, je m'isole. Les journées sont longues. Je finis par faire la connaissance d'un étrange personnage qui porte un sac Us et une veste en jean patchée aux noms de groupes tous plus étranges les uns que les autres. Le garçon est plus âgé que moi - l'école n'a jamais trop été son truc - et il semble se foutre pas mal des moqueries fréquentes sur son look. Il répond même aux profs en classe. Waow. Pour moi aucun doute possible, c'est un rebelle!
Très rapidement, je me retrouve chez lui à écouter pendant de longs après midis les vinyles de son imposante collection. Franchement, je n'accroche pas trop. Mais je m'en fous, le mec est passionné et ça me plait. Et puis un jour, il pose la pointe du saphir de sa platine sur le skeud d'un groupe dont il me précise qu'il est américain. Le disque craque, un peu, et moi aussi, beaucoup. Ca fait immédiatement bang-bang dans ma tête. Ce sera le hard rock et rien d'autre. Au contraire de mon gourou qui a fini par se lasser, je n'ai plus lâché l'affaire depuis (ben oui sinon je ne serais pas là).
Avant de me faire taper sur les doigts pour ces digressions par un des remarquables membres du service de relecture assurant l’homologation des chroniques sur SOM - notez la technique malicieuse pour mieux faire passer la pilule-, j’en reviens à nos moutons et à ce «
Earthshaker » (1981). Cet album est le premier d’une triplette magique complétée par «
Black Tiger » (1982), et «
Mean Streak » (1983). Quelles que soient nos préférences respectives, les amateurs du combo seront unanimes pour reconnaître qu’il n’est pas si aisé de les départager. Histoire de procéder chronologiquement, commençons donc par le premier pour lequel, vous l’avez compris, j’ai un léger faible. Et comme nous sommes entre nous et que nous avons le temps - le SOMien est épicurien-, revenons rapidement sur les débuts du groupe.
Originaire de Californie, Y&T est un groupe de la célèbre San Francisco Bay
Area. Thrashers parmi les thrashers, ils ont logiquement influencé leurs contemporains,
Exodus,
Overkill et autre
Testament. OUPS, désolé. Je reprends.
Originaire de Californie, Y&T est un groupe de la célèbre San Francisco Bay
Area. Y&T fait parti des précurseurs du "son" hard rock US des années 80. Ah oui c'est mieux comme ça, les critiques avisées rôdent sur SOM...
En
1980,
Yesterday and Today, hommage à un morceau d’un des premiers albums des Beatles, galère déjà depuis 74, et ses deux premiers albums sortis sur
London Records n’ont pas beaucoup fait parler d’eux («
Yesterday and Today », 1976, «
Struck Down », 1978). Les membres raccourcissent alors le nom du groupe en Y&T (le logo changera pour l’album suivant), signent chez A&M et entrent en studio.
Outre Meniketti (guitare et chant), le groupe comprend Leonard
Haze (batterie), Phil Kennemore (basse) et Joey Alves (guitare). Ils joueront avec le même line-up pendant presque 14 ans. Ils co-signent également tous les morceaux de ce fameux «
Earthshaker ».
«
Earthshaker ». Que voilà un album qui porte bien son nom! Couchée Xynthia, la tornade c'est Y&T. Ceux qui ont eu le plaisir d'assister un jour à un concert du combo savent combien l'énergie qu’il délivre sur scène est contagieuse (j'ai plusieurs DVD, ça compte non? Ah ce
Live à Reading en 82, cf. vidéo ci-dessous). Cet album studio réussit à mon sens l'exploit de retranscrire parfaitement cette qualité. En outre, le son est tout bonnement impressionnant. On se croirait dans le studio, le cul sur l'ampli de Dave, en train de les regarder s'enregistrer live. Un grand merci donc à messieurs Robert Shulman et David Sieff.
L'album balance entre hard rock 100% pur jus ("
Dirty Girl" - ah les filles de joies, pour ou contre, vaste débat -, "
Hurricane", et son intro heavy à souhait, "Hungry for rock", "Let me go" et ses sympathiques "woo oo oo oo", "Knock you out" au solo stratosphérique), rock n roll musclé ("Squeeze", "Shake it loose") et ballades qui s'excitent et excitent les sens ("I believe in you", "
Rescue Me"). Le tout est enveloppé dans un jeu de guitare aux forts accents bluesy, notamment lors de fabuleux soli. Concernant ces derniers, on pense ainsi souvent à
Gary Moore ("Let me go", "Diry
Girl"), et même un peu à
Angus Young ("Hungry for rock").
L’ensemble est emporté par un groove de malade qui doit beaucoup à la section rythmique. Les chiens aboient, la section rythmique passe. Réputé pour être un bon picolo l'ami Leonard, et un peu cinglé aussi (cf. le « drums and insanity » sur la pochette).
Quelques mots également pour évoquer Phil, décédé en janvier 2011 (depuis quelques années, la liste n'en finit hélas plus de ne plus en finir). Fidèle lieutenant de
Meniketti pendant toute l'aventure Y&T, il est un de ces hommes de l'ombre indispensables sans lesquels d'autres ne peuvent briller. Chacun sa place. Il l'avait bien compris.
Si nous devions faire ressortir quelques titres d’un opus aussi brillant, peut être pourrions nous commencer par ce "
Dirty Girl" proche du premier
Van Halen. On imagine bien Big Dave - pas
Meniketti, l'autre - pousser une bonne gueulante pour ouvrir le titre. Sur "Squeeze", Kennemore se colle au chant, ce qui permet à Dave de se déchainer avec des licks, riffs et soli énormes (même si ok, en studio on peut enregistrer les deux à des moments différents). Enfin, comment ne pas évoquer plus en détails ces deux merveilles que sont "
Rescue Me" et "Believe in you". La première, plus power que ballade, débute piano pour exploser à la minute. La seconde, plus ballade que power, livre deux des plus beaux soli du hard rock.
Si de tels titres ne touchent pas le rocker le plus endurci, c’est à ne plus rien y comprendre. Il faut souligner l’intelligence du track-listing qui place une de ces bombes à la fin de chacune des deux faces du disque. Intelligent parce que cela permet aux autres titres de ne pas (trop) se faire vampiriser par ces deux brulots extraterrestres.
Avec «
Earthshaker » mesdames (ou messieurs également d'ailleurs), pas besoin d'un lifting. Trente ans après sa création, je ne vois toujours pas poindre la moindre ride. Cet album renferme tellement de classiques que le groupe tape encore fortement dedans concert après concert (5 titres sur les 10 qui le composent sont présents sur le récent «
Live at the Mystic Theatre »). Admettons néanmoins que, de ci de là, un ou deux titres ont quand même un peu moins bien vieillis ("Young and Tough" et à un degré moindre "Hungry for Rock")
L’album sera classé parmi les 100 meilleurs disques de tous les temps par le magazine anglais Kerrang. Dave
Meniketti sera nominé pour le titre de meilleur guitariste de l'année 1982. Mais ni Ketti (ouarf ouarf) ni personne ne peut programmer le succès. L'album se vendra correctement, mais sans pour autant faire accéder le groupe au statut de super star. Après trois brulots imparables aux ventes modestes, Y&T propose «
In Rock We Trust » en juillet 1984. Un album loin de soutenir la comparaison avec ses ainés. Et bien évidemment … boum ! Les ventes dépassent les 500 000 exemplaires aux États Unis (disque d'or). A en perdre son latin.
A l'orée des eighties, les groupes jouent la surenchère (les Crüe,
WASP, et bientôt la scène glam). D'un naturel discret, Dave s'est bien un peu forcé au milieu des années 80 à jouer la rock star permanentée. Hasard ou non, cela a coïncidé avec la perte de l'identité musicale du groupe, à son déclin, puis à sa lente agonie. Jusqu'à un retour aux racines en l'an 2010 avec le bon «
Facemelter ».
Doté d'un énorme charisme, l'homme n'a pas besoin de jouer les "posers". Pendant que certains sont plus occupés à faire la toupie au centre de la scène plutôt qu'à se (con)centrer sur la brillance de leurs jeux, lui préfère la jouer sobre. Son instrument - celui qui a six cordes à son arc, ne nous méprenons pas - parle à sa place. Toupie or not toupie,
Meniketti a choisi.
You Tube peut bien aller se rhabiller, il n'y aura jamais qu'un seul Y&T pour moi. Putain, quel pied de rédiger cette chronique !
Très bonne chro l'ami Sam! Ce que je dois faire après l'avoir lu??? Putain mais faut que je me procure ce skeud et pas que celui-ci les précédents albums et ces putain de live aussi!
Merci pour le papier, et pour cette petite anecdote marrante sur ta découverte du hard rock ;-)
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