L'esprit artistique téméraire des Allemands de
Sodom avait, jusqu'alors, sublimé leurs travaux créatifs, les conduisant même jusqu'à une certaine forme d'apogée fort d'un excellent
Agent Orange. Ce dernier, presque entièrement dévolu à ce Thrash rugueux typiquement teutons, laissait néanmoins entrevoir quelques cicatrices mélodiques qui lui donnaient tout son caractère. Fort de ces nouvelles aspirations et, de surcroît, d'un passé récent allant en ce sens, nul doute que Tom Angelripper, chanteur, bassiste et âme fondatrice décisionnaire de ce groupe, allait, une fois encore, ne pas se laisser emprisonner dans les caractéristiques sclérosantes d'un genre en particulier, et nous asséner un nouvel assaut aussi intéressant qu'innovant. Ce nouvel effort, répondant au doux nom de
Better Off Dead, sort en 1990.
Le premier fait marquant, qui pourrait être responsable d'une certaine déception, est l'absence ici du guitariste Frank Gosdzik dont, jusqu'à présent, les soli avaient véritablement sublimé les œuvres d'un
Sodom très inspiré. Le musicien, partis rejoindre
Kreator, est remplacé par Michael "Micha" Hoffman qui s'il ne démérite pas vraiment aura beaucoup de mal à s'illustrer aussi parfaitement que son prédécesseur.
Mais cessons de nous égarer sur des considérations aussi subjectives concernant les talents d'un musicien dont les responsabilités quant aux vertus, ou aux non-vertus vertus, de cet album ne sont pas vraiment avérées, ou si peu.
Il y a, en effet, concernant ce
Better Off Dead, au-delà de toutes les réflexions ineptes livrées jusqu'à maintenant dans cette rédaction, un terrible secret qu'il nous faudra énoncer sans plus attendre. Une révélation terrible, qui point en filigrane dans ces mots et qu'il est difficile d'admettre après des œuvres aussi remarquables que celles de ces saxons:
Better Off Dead est une déception.
Pourquoi cela?
Pour une raison assez simple: les inspirations musicales qui ont guidé, cette fois-ci, Tom sont si éloignées de l'esprit originel de
Sodom qu'elles seront suffisantes à dénaturer presque complètement le Thrash de ce groupe. Tant et si bien que les
Partisans initiaux de ces Allemands seront, à juste titre, totalement déconcertés par ce mélange anarchique dans lequel nul ne peut véritablement trouver une cohérence captivante de bout en bout. Et lorsque votre humble serviteur use avec tact du terme "déconcerté" c'est pour ne pas user d'un autre nettement moins courtois mais tellement plus juste.
Pourtant la disparité musicale de ce disque n'est pas d'emblée perceptible puisqu'il démarre sous les auspices d'un Thrash assez classique dans lequel, cependant, on déplorera, outre ce léger académisme, des passages guitares, justement, moins notables (An
Better Off Dead for an
Better Off Dead, Shellfire Defense).
La suite, quant à elle, est, malheureusement, nettement moins glorieuse. Et dès The
Saw in the Law, on ressent la désagréable morsure de la désillusion. titre très Heavy
Metal s'inscrit dans une démarche assumée à laquelle on ajoutera des morceaux tels que
Cold Sweat et tels que l'abominable
Resurrection (deux pistes dont les refrains ultra-mélodiques et ultra-mièvres sont une aberration si l'on songe au groupe en présence. Et pire encore si l'on songe aux travaux d'autrefois).
Plus représentatif de l'esprit créatif d'antan de ces Allemands, les influences Rock'n roll, si chère à Tom Angelripper (et à son idole Lemmy Killmister (Motörhead) dont le fantôme plane indiscutablement sur ce disque), sont ici bien présentes aussi. Et en une sorte de Thrash'n'Roll pas totalement désagréable mais un peu insuffisant au regard du manque d'aspérités d'une œuvre dévolu à un Heavy
Metal plutôt qu'à un Thrash rugueux, des chansons telles que les reprises Turn your
Head Around de
Tank (Turn your
Head Around (
1982)) et
Cold Sweat de
Thin Lizzy (
Thunder and
Lightning (1983)), ainsi que, par exemple, Stalinorgel parviennent à entamer légèrement notre déception.
Ajoutons aussi, fort heureusement, quelques autres titres qui viennent, eux aussi, nous contenter puisqu'ils sont davantage dans l'esprit de ce Thrash âpre développé sur
Agent Orange et qu'ils sont bien meilleurs que les atrocités déjà évoquées (Bloodtrails,
Better Off Dead, Tarred
And Feathered...).
Néanmoins
Better Off Dead est un album dont le contenu est bien trop composite pour ne pas dérouter les
Partisans séculaires de
Sodom qui vouent une adoration à l'ère Thrash Black de ce groupe. Quant à ceux qui découvrirent la formation au travers des quelques évolutions mélodiques d'un
Agent Orange et de son propos défendant un Thrash symptomatique de cette scène teutonne et débarrassé presque totalement de ces aspérités dévolues à l'art noir, s'ils comprendront davantage les orientations prises ici, ils ne sauraient totalement s'en satisfaire. Toutefois, au-delà même de ces choix musicaux contestables, n'oublions pas que le résultat est, de toute façon, insuffisant à combler qui que ce soit. Dans tous les cas,
Sodom aura donc déçu ses adeptes.
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