La réflexion intense qui pourrait nous amener à énoncer certaines évidences face à certains univers créatifs, nés d’une analyse argumentée où l’évidence objective guiderait nos pensées, est parfois d’une inexorable imbécilité. Effectivement, ces emphatiques litanies sérieuses, dictées par nos certitudes critiques et que nous déversons tel un flot ininterrompu de vérités que nous croyons fondatrices et vraies, sont parfois d’une réelle stupidité tant elles oublient que nous parlons essentiellement d’art. Et que, de cet exercice, fondé sur nos convictions évidemment sincères, naît une image forcément déformée puisque le reflet certes exact de nos ressentis mais, souvent, très imparfait, est éloigné de la réalité. De cette image vague, dans laquelle tentent de se reconnaître ceux qui cherchent des réponses à leurs appétits artistiques, naissent les plus grandes déconvenues, mais aussi les plus grandes satisfactions. Et puis, parfois, les mots sont simplement impuissants à décrire objectivement nos joies face à certaines œuvres…
Pour narrer précisément l’épopée contée, depuis plusieurs décennies, par les Allemands de
Blind Guardian, il faudrait sans aucun doute, en un tome volumineux, évoquer cet amour immodéré pour les écrits fantasmagoriques de J.R.R. Tolkien, dire cette capacité mélodique à théâtraliser une histoire, parler de ce talent avec lequel les Saxons surent composé une musique empreinte d’un caractère très personnel à la fois âpre et agressive mais aussi tout à la fois symphonique et harmonieux, exprimer les délices de ces compositions aux nuances diverses et nombreuses, ou encore nous épancher sur la teneur de ces chants si particulièrement séduisants et si particulièrement symptomatiques. Bien évidemment, il nous faudrait aussi exprimer certaines de nos déceptions concernant des œuvres parfois moins inspirées, moins efficaces, ou, dont le concept, bien trop intellectualisé, peut demeurer obscur. Quoiqu’il en soit, il nous faudrait, assurément, noircir de nombreuses pages pour décrire parfaitement ce qu’est l’œuvre de
Blind Guardian. Disons, pour résumer imparfaitement, qu’après un décevant
A Night at the Opera, dans lequel les volontés orchestrales mélodiques du groupe furent bien trop mises en exergue au détriment d’une certaine agressivité nécessaire en des titres, pour la plupart, moyennement charismatiques, son successeur,
A Twist in the Myth, sans bouleversements, était revenu à certains fondamentaux plus consensuels et à un compromis plus fédérateur.
Riches des enseignements passés, et sur le socle de ce dernier album plus convaincant,
Blind Guardian revient après quatre longues années d’absence avec ce
At the Edge of Time. Dans une expression mûrement réfléchie, cette œuvre s’inscrit, d’emblée, dans la continuité de son prédécesseur. Une évidence anecdotique si tant est que l’œuvre nouvelle n’en transcendait pas non seulement les qualités les plus incontestables, mais aussi, qu'elle n'en changeait pas en vertus ces défauts les plus embarrassants.
Pour étayer cette argument facile, il faut commencer par dire qu’il y avait longtemps qu’Hansi Kursch et le siens n’avaient pas été aussi combatifs. Ainsi, des titres simples, et d’une redoutable efficacité, tels que le véloce, et excellent,
Tanelorn (Into the
Void) et ses superbes refrains fédérateurs réussis, ou encore tels que le vif Ride into Obssession mais aussi tels que le prompt, rugueux, et superbe,
A Voice in the Dark avec ses couplets rageurs et ses refrains communicatifs parfaits témoignent d’une délectable ardeur primaire retrouvée qui satisfera, sans doute, les adeptes d’antan déçus par les chemins parfois bien trop mélodiques et abscons empruntés par les Allemands. Si ces titres possèdent le délicieux parfum de cette nostalgie d’autrefois, apprêté d’une virulence charmeuse, ils n’en demeurent pas moins, exception faite du très rude
A Voice in the Dark, très marqués par une certaine musicalité, signature actuelle des Allemands.
Au-delà de ça, se sacrifiant à ses desseins les plus symphoniques, parlons ensuite de ces quelques morceaux composés en de longues sonates harmonieuses que
Blind Guardian nous propose. Pourtant, abrutis par un exercice dans lequel nombre s’égarent malencontreusement, l’auditeur ébahi ne pourra que constater que les Saxons s’y illustrent avec une maestria que peu, finalement, atteignent. Ainsi, citons le superbe Sacred World, dont l’entame à la fois orchestrale et véhémente, avant qu’Hansi, en un moment plus calme, ne vienne déposer avec douceur les mots d’un premier couplet, est juste sublime. Mais aussi, le magnifique
Wheel of Time et ses atmosphères orientales, avant que ne s’érige ce monument puissant et énergique mais aussi majestueux et beau. Bien évidemment, on ne peut nier que ces titres sont esclaves d’une certaine grandiloquence que certains pourraient juger comme bien trop solennelle. Cependant, il s’agirait là, à mon sens, d’une regrettable erreur tant ils demeurent d’une redoutable efficacité et d’une construction infaillible.
Et même des titres tels que
Curse my Name, sempiternelle ritournelle médiévale de ménestrels, ou encore tels que le plus intimiste et pondéré
War of the Throne (Piano), ne constituent pas véritablement des imperfections notoires et demeurent même suffisamment attachants pour ne pas laisser faiblir une excitation et un plaisir légitimes.
Pour finir, ajoutons encore ces titres les plus caractéristiques de ce
Blind Guardian, plus actuels, dans lesquels s’unissent toutes les velléités les plus diverses du groupe, pour un résultat, encore une fois, très réussi. Ainsi, citons au chapitre de ces morceaux aux passages tour à tour mélodieux, orchestraux, rudes ou âpres en des constructions subtiles, des titres tels que les délicieux
Road of no Release, Valkiries ou encore, par exemple, Control the Divine.
Il pourrait être judicieux de détailler encore et encore, dans une longue énumération dithyrambique emplie d’adjectifs plus élogieux les uns que les autres, la qualité de ces musiciens, de ces titres, de ce travail, de ces sonates, de cette pugnacité ou de que sais-je encore, mais parfois les mots sont impuissants à exprimer pleinement nos ressentis et seul le silence s’impose face à l’enivrement.
At the Edge of Time est une œuvre qui commande une écoute admirative respectueuse et muette.
Dans le jeu , le groupe a donc été modélisé en 3D , ils nous donne même chacun une mission , il y a même un clip avec le moteur 3D du jeu , ou l'on voit BG joué avec des haches comme guitare , devant un publique d'orques et d'elfes :D
J'ai bien aimé le livret également, même si l'artwork principal est un poil décevant par rapport à leurs œuvres précédentes.
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