Comment créer le buzz en jouant faux et avec le son le plus moisi possible ? C'est tout le paradoxal mystère de
Xasthur, superstar archi-médiatique du dépressif et du suicidaire, méga-vedette du black metal from the States au point de faire de l'ombre à bon nombre de ses collègues et compatriotes, ZE truc à la mode du début du nouveau millénaire, chasse gardée de l’hermétique Malefic, qui en assure les vocaux et tous les instruments. Rien de moins !
Seulement voilà, à force de se maintenir sur la corde raide entre étincelles de génie et foutage de gueule, Malefic a fini par se la casser (la gueule), en pondant avec "
All Reflections Drained" une bouse comme j’eus peu souvent l’occasion d’en entendre.
Bien sûr, les détracteurs du one-man band ricain se régaleront de dire que
Xasthur ça n’exprime rien, que
Xasthur c'est toujours pareil, que
Xasthur c’est toujours la sempiternelle même merde. Moi, je me demande quand même si certains distraits des esgourdes ne font pas de la mauvaise foi leur sacerdoce. Alors bien sûr,
Xasthur c'est lent voire poussif la plupart du temps,
Xasthur c’est du mixage approximatif, des pains en pagaille, des grattes étouffées et des claviers glaireux. Mais
Xasthur, c'est aussi un putain de magma de brume épaisse et déliquescente, se déversant sur un putain d’ossuaire froid et habité de relents de charogne, une sensation de solitude et de désolation comme rarement humain fût capable d’en faire ressentir.
Xasthur, c’est aussi un bonhomme (Scott Conner à la ville) qui, sans se réinventer, a toujours montré une certaine volonté de progression à chaque album.
Du mélancolique "
Nocturnal Poisoning" au misanthropique "
Subliminal Genocide", de l'introspectif"
Telepathic with the Deceased" à l'écorché "
To Violate the Oblivious", chacun dégage, mine de rien, une sensibilité différente et, pris chronologiquement, une certaine forme d'évolution, aboutissant sur un "Defective Epitath" à forte teneur ambiante en même temps que l'emploi d'une vraie batterie rend l'ensemble plus consistant et dynamique. Si bien qu'en restant parfaitement conscient des défauts inhérents aux créations artisanales de Malefic, je n'en appréciais pas moins leurs atmosphères. Aucun de ses albums n’était jusque là irréprochable, mais aucun n’était vide de sens non plus. Loin de là.
Alors qu'est-ce-qui cloche avec ce "
All Reflections Drained" ? … A peu près tout …
La faute à quoi ?
Une lassitude liée à une overdose de nouvelles productions ? …
Pas vraiment, la période post-2004 correspondant à un net ralentissement du rythme de création, d'autant que, comme je l'ai dit plus tôt, chaque disque a toujours revêtu à mes yeux un apparat singulier.
Le mixage désastreusement lamentable ? …
Plus sûrement. Certes,
Xasthur n'a jamais brillé sur cette étape précise de la conception d'une œuvre musicale, mais alors là, c'est une sacrée régression à des temps bien plus reculés encore que celui de l'âge de la pierre. Une catastrophe à un point où traiter ça de travail de macaque serait la pire insulte proférée à l'adresse du peuple singe. Sa pire prod' à ce jour, une vraie chierie qui avantage nettement, très nettement, trop nettement une batterie qui avait pourtant un apport utile sur "Defective Epitath". Ici, sur "
All Reflections Drained", c'est creux, c'est nul et le son d'assortiment de container-poubelles des percus n'arrange rien, pas plus que les plans aussi binaires que ceux du plus binaire des electro-clubbing de base.
Malefic tente bien d'assener quelques bourrades, comme sur "Damage Your Soul" ou l'ouverture de "Obfuscated in Oblivion" mais le manque de punch de la rythmique ne produit que l'impact d'une gélatine Vahiné. Gonflé, le père Malefic de s'être cru capable de hausser le pas par ses propres moyens. Mais sans l'aide de son ex-boîte à rythmes chérie, le voilà qui se prend les pieds dans sa cape et se vautre lamentablement dans la gadoue… Adieu le peinturlurage de ta face par la même occasion…
Et la batterie n’est pas la seule incriminée. Innocentes victimes d'un mixage répugnant, les lignes de synthés, qui se devaient d'être opulentes autant qu'enveloppantes, eu égard aux velléités ambiantes souhaitées dans l'instrumentation, n'ont au final pas plus de densité qu'une flotte diarrhéeuse coulant au son du lointain vieux pet foireux des grattes électriques.
Techniquement, c'est mauvais. Un constat pas nouveau chez
Xasthur. Pire que d'habitude, mais pas nouveau, l'habileté de Malefic ayant été jusque là d'arriver à rendre, malgré ce handicap, une copie, certes sale, mais évocatrice, sans suggestion péjorative, s’en servant même afin d’accentuer l’effet mortuaire et dépressif.
Et c'est là qu'entrait en jeu l'inspiration, l'indispensable carburant qui manque cruellement à ce "
All Reflections Drained" qui tourne à vide, où toute la mécanique se laisse aller, où tous les engrenages se relâchent, où toute la carcasse se barre en couille, sans contrôle, et finit inévitablement dans le canal, en ultime couronnement d'une vie passée à glorifier le suicide de sa triste personne. Mais bordel, que ce fût long !!! Pourtant, la majorité des morceaux ne sont pas forcément des pavés : à l'exception de "
Masquerade of Incisions", ils tournent sensiblement aux alentours des 5 minutes, 7 grand maximum. Mais le temps s'étire comme un chewing-gum lymphatique, chaque minute en devient une heure, et l'heure que dure ce disque en devient l'heure d’aller couler un bronze puis d'aller se pioncer.
Plus fort qu’un comprimé de Poussamor 500 mg, plus puissant qu’une tablette entière de Gepasomay 250 mg, voici la solution définitive, la délivrance ultime pour vous, les serrés du sphincter anal et autres insomniaques en état de zombification avancée. Efficacité prouvée et approuvée, garantie sans accoutumance. Tarif de seulement 15 euros pour traitement à usage illimité, décidé de votre propre chef en fonction de vos besoins, voilà une excellente solution pour commencer à combler le trou de la sécu, à défaut de pouvoir combler celui de votre chère et tendre, car attention au redoutable effet indésirable de la débandade. Dans ce cas, prévoir un complément de Cricabit à forte dose : 5 g sinon rien.
"All
Reflections Drainded" ou un produit qui n'a que bien peu d'autres arguments à revendre que ceux d'une pub pour laxatifs ou somnifères, propulsé par un "Achieve
Emptiness Part II" et un "
Inner Sanctum Surveillance" parés pour faire rude concurrence aux éoliennes de chez Ecosol Atlantique avec leurs nappes de synthé d'un vide intersidéral, amolli par un "
Masquerade of Incisions" et un "Obfuscated in Oblivion" calés dans les starting-blocks pour postuler chez Flamby avec leurs arpèges dissonants archi-flasques du gland. Des arpèges autrefois habités et malsains, aujourd'hui plats et inconsistants.
Et que dire de ces bouillies de voix soupirées, si ce n'est qu'elles se mêlent aux soupirs de fatigue que je pousse à leur écoute, jusqu'au morceau-titre, en conclusion de l'album, qui atteint le summum du minable, avec cette tentative de percussions jazzy puissamment merdée.
Pas possible, il a du enregistrer le tintamarre de la vaisselle de bobonne, tandis qu'à côté bourdonne le mixeur à soupe … ah non, c'est sensé être un violoncelle ?! … sans blague ?! … Par contre, la soupe est bien là, fin prête, dans la musique comme dans le ressenti.
Ajouter à cela une voix claire simili-plaintive à mortellement se bidonner, assurée par un certain Mark
Hunter, champion du poste de session dans bon nombre de formations black ricaines, et vous obtenez le bouillon le plus foireux imaginable.
Un Mark
Hunter qui, lorsqu'il se décide à fermer sa gueule et empoigner ses claviers, reste le seul élément à surnager du marasme. Lui, l'invité de session, et c'est bien là le comble. Hantées et maladives bien comme il faut, ses outros ambiant / indus présentes sur chaque titre sont malheureusement trop diluées pour développer leur aura et trop fugaces pour remonter le niveau d'un skeud destiné à se morfondre dans les tréfonds des divisions amateurs. Dommage, mais la nullité de Malefic sur "All
Reflections Drainded" aura au moins permis à Mister
Hunter de briller.
Et paraît-il que pour le prochain album, un nouvel invité sera de la partie. Un invité qui sera en fait une invitée, en la personne de la chanteuse et instrumentiste folk américaine Marissa Nadler. Une présence surprenante et qui pousse à se demander ce qui a bien pu motiver la donzelle à accepter le deal.
Histoire de fric ? …
Pas au vu de la faible marge que génère les albums de
Xasthur, pour sûr.
Histoire de cul ? … M'étonnerait fort que le père Conner soit un bon coup, vu son apathie, ou alors faut croire que la miss aime quand ça bande mou, et on ne peut que lui souhaiter de ne pas finir noyée dans le mixage comme sous l'éjac faciale dont il va la gratifier. Car si Malefic ne sait pas branler le manche de sa gratte, on peut subodorer qu'il sache au moins convenablement se secouer la nouille.
Un Malefic qui, à force d'introspecter jusqu'aux tréfonds de lui-même, toujours plus loin, toujours plus profond, a fini par trouver la merde et la matérialiser sous forme d'un "
All Reflections Drained" qui sent fort l'entrefesse.
Reste plus maintenant qu'à espérer qu'il se sorte les doigts du cul pour le prochain album …
Ah, j'allais oublier : le packaging A5 (bien luxueux pour une bouse du niveau de celle qu'il renferme) propose un second CD en bonus, avec diverses raretés et chutes de studio qui auraient tout à fait pu rester au fin fond de la benne, ainsi que des reprises saccagées (imaginez par exemple celle du "
Fleshcrawl" de
Autopsy, … enfin non, n'imaginez même pas, c'est encore plus dégueu qu'un tas de zombies défraîchis).
Mais restons positifs, ça fera un frisbee de rechange, et c'est toujours ça de gagné !
Il est très différent des 'premiers' mais je préfère moi cette facette là de Xasthur, bien hypnotisante et aux mélodies plus originales et moins téléphonées que Subliminal Genocide par exemple. Les intermèdes d'ambiant ne sont pas du tout non plus je trouve.
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