Le ciel nocturne et sa myriade d’étoiles, superbe décor dont on ne peut se lasser d‘admirer. Il serait tout aussi farfelu qu’impossible de se mettre à les compter. Tout juste, se contenterons-nous d’en dresser les principaux constituants, de situer les grandes constellations ou les points lumineux qui brillent plus que les autres. Parmi les plus brillantes dans le ciel du folk metal, il y a «
Ensiferum ». Bon nombre la connaissent et l’utilisent comme point de repère pour s‘orienter. Cependant, la disposition des étoiles change au fil des saisons, et en cette année
2012 certains douteraient de la fiabilité de cette grande et belle étoile. Auteur de trois premières pièces («
Ensiferum », «
Iron », «
Victory Songs ») considérées à juste titre comme de véritables monuments, le groupe emmené par l’ingénieux Markus Toivonen signe son cinquième volume chez l’inconditionnel Spinefarm Records. Cela après un «
From Afar » qui avait marqué un tournant dans le style de la formation en appuyant ses diverses compositions sur des orchestrations symphoniques. Une voie était donc tracée. Il était pressenti qu’«
Ensiferum » la suive pour sa prochaine apparition. «
Unsung Heroes » devait être l’œuvre aboutie qui validait ce changement. Une révolution, un spectacle comme le ciel n’avait pas eu l’occasion d’offrir. Que de promesses! Face à pareille annonce, il était donc normal pour le spectateur de cet évènement tant attendu, de déchanter face à la banalité. En comparaison au restant de la discographie, l’opus en question aurait très bien pu être rebaptisé « Unsung Sighs ».
La divine offrande aura bénéficié non seulement des soins de Hiili Hiilesmaa, l’un des meilleurs producteurs finlandais, ayant déjà travaillé par ailleurs pour «
Moonspell », «
Sentenced » et « Him », mais aussi d’un enregistrement au fameux Petrax Studios de Hollola qui a déjà vu passer «
Children Of Bodom » ou encore «
Nightwish » dans ses couloirs. Encore une fois, ils auront sorti la grande argenterie, et c’est clairement pas au niveau de la production que l’on pourrait trouver le moindre défaut. Le contraire serait tout bonnement stupéfiant. L’introduction «
Symbols » nous conforte déjà dans l’idée que nous aurons affaire à un opus de grande qualité sonore. Un bouzouki teinté de mélancolie ouvre une très belle page de couverture. L’instrument se trouve balloté par les flots symphoniques, des airs cuivrées digne d’une bande son de Basil Poledouris. Quelque chose d’immense se profile alors. Notre esprit se tient prêt face à un bloc que l’on imagine insurmontable, à une montagne dont le pic vertigineux appelle à être conquis. C’est donc quelque peu décontenancé que l’on s’attaque aussitôt à « In My
Sword I
Trust ». La transition entre l’introduction et le titre n’a pas vraiment eu lieu. On passerait directement des sommets enneigés à la plaine. Rien de grave à priori, si ce n’est que c’est à partir de ce second titre que nous ressent
Irons l’envie de faire une sieste.
Le morceau en question, objet d’un clip assez statique, est loin de s’avérer mauvais. Galvanisant, guerrier, rythmé par de bons riffs. L’orchestration et les chœurs en fond sonore remplissent pleinement leur tâche d’octroyer une âme, une sensibilité au morceau. Ils joueraient un rôle aussi déterminant que sur «
From Afar », œuvre qui avait la caractéristique de mettre «
Ensiferum » à l’heure symphonique. On retient aussi un refrain très efficace. Malgré tout, il y a un hic. En effet, on se rendra assez vite compte du côté répétitif de la chanson. Après une adhésion immédiate, notre attention baisse au fur et à mesure. Ce n’est pas l’originalité qui est au rendez-vous. La suite ne fera que renforcer cet état de fait. Le bonnet rose aura été décroché avec un titre éponyme assez lassant, fade s’il n’y avait pas eu la rayonnante mélodie de nyckelharpa précédant les chœurs du refrain. Nos yeux se fermeront de fatigue, et non pour nous délecter de la platitude de cette musique. Les plus résistants entameront leur somme sur « Celestial Bond », une tendre ballade envoutée par le chant féminin de Laura Dziadulewicz, mais qui aura par sa redondance autant d’effet qu’une berceuse. Ils auront fait le choix malencontreux d’en mettre une seconde couche deux pistes plus tard sur «
Star Queen (Celestial Bond Part II) » reprenant sans ménagement l’air de plus en plus pompeux qui avait irrigué « Celestial Bond ». C’est beau, certes, mais ça perd de son intérêt en partie à cause de sa proximité dans l’album avec le premier « Celestial … » et le ton amorphe qui y règne.
Entre les deux morceaux précédemment cités, il y avait un petit événement à retenir. Une explosion qui vous tire brutalement de la torpeur dont vous vous étiez affalé à contre-gré. Ce réveil en sursaut a pour nom «
Retribution Shall Be Mine ». On y reconnait là l’«
Ensiferum » survolté usant d’un jeu power metal poussé à l’extrême. C’est l’éloge de la vitesse, du dynamisme. Il n’y aurait que le growl inadéquat, inapproprié de Markus Toivonen qui ferait ombre au tableau. Cette défaillance de la part du leader s’invite également sur d’autres titres. Il s’incrusterait par exemple assez difficilement sur « Pohjola », ne prenant pas le sens de la mélodie, donnant un aspect poussif à un morceau qui s’évertuait pourtant à conjuguer vitesse et forte ambiance épique. Les ouvertures aux chœurs y sont pertinentes, comme l’est le passage narratif de l’acteur et comédien Vesa-Matti Loiri en milieu de piste. Il est vrai que l’album ne brille pas vraiment pour l ‘importance de son aspect épique. « Pohjola », mais aussi dans une certaine perspective, « Passion, Proof,
Power », figureront comme des exceptions. Puisqu’on en est avec « Passion, Proof,
Power », disons-le tout de suite, ce n’est pas moins qu’un ovni, un témoignage surnaturel, révélant de nombreuses traces progressives dans la musique des finlandais. Des bruits d’une faune de marécage à l’aube du jour sur l’entame, on nous convie à un véritable voyage intersidérale. Un rapide transport dans les cieux, histoire de voir de plus près les étoiles que nous ne faisions qu’admirer au coin d’un feu. Nous voguerons alors au milieu de passages décapants, ingénieux, excentriques, totalement méconnus pour du «
Ensiferum ». Durant ces 17 minutes d’étonnement et de ravissement, le groupe aura l’occasion de nous envoyer valdinguer, puis de refaire escale sur Terre, le temps d’un dialogue dans une foire entre les membres d’« Apokalyptischen Reiter ».
«
Unsung Heroes » se caractérise donc par une conservation de l’orchestration symphonique, par l’apport de quelques éléments progressifs (surtout au sein de « Passion, Proof,
Power »), mais aussi par un renforcement de la part folklorique dans la musique du groupe finlandais. Ainsi, on pourra voir une mise en avant de divers instruments traditionnels, du bouzouki et de la nyckelharpa dans les airs champêtres procurés par «
Burning Leaves ». Le titre aura été malheureusement victime d’un growl trop ostentatoire, s’alliant moyennement au climat musical globalement tempéré, à la différence des chœurs dans la sauce «
Borknagar » plus mesurés et justes. L’amateur de pure musique folk se plaira sans doute à s’immerger au sein de la ballade «
Last Breath ». Mais prudence, ne vous y laissez prélasser. L’acoustique monte en puissance et se laisse porter de plus en plus haut par des éléments orchestraux qui ont eu le temps de préparer leur embuscade.
Si on prend en plus pour illustrer le cas de «
Turisas » et de son « Stand Up and
Fight » de 2011, ou le développement des clones de «
Battlelore », tout nous porterait à croire que le monde de la symphonie effectue une opa sur celui du folk dans la lointaine et prolifique Finlande. «
Ensiferum » serait probablement victime d’un effet de mode. En ce qui concerne «
Unsung Heroes », au vue de la profusion d’artifices dans un milieu sans réel conviction, c’est clairement la traduction d’un essoufflement. D’ailleurs, la sobriété consternante du livret reflète bien l’image que l’on peut s’en faire au final après plusieurs approches. Ceux qui avaient déjà émis quelques réserves sur «
From Afar » se retrouveront plus nombreux sur ce dernier opus. Peu contesteront néanmoins la valeur intrinsèque du produit, sa qualité technique ou le bien-fondé des interventions orchestrales. Mais quel est le sens de l’œuvre? Où est la cohérence dans tout ça? Trop souvent nous croyons avoir affaire à un magnifique bateau navigant sans boussole, sans même que l’équipage parvienne à utiliser les étoiles pour situer le Nord. On a beau scruter le ciel, la lumière d‘«
Ensiferum » n’est plus visible. Il faudra attendre une prochaine saison dans l’espoir qu’elle réapparaisse plus étincelante que jamais, reconnaissable parmi mille étoiles.
13/20
Maintenant voici ce que j'en dis :
J'ai dû écouter 20 fois plus Passion Proof Power que le reste, parce qu'honnêtement (excepté quand la nana chante) ce morceau est vraiment terrible. Prenez la peine de l'écouter en entier, et si vous serez franchement pas déçu.
En dehors de ce morceau, le reste, j'trouve que c'est en l'écoutant plusieurs fois qu'on fini par bien apprécier. C'est un peu étrange mais c'est ce qu'il s'est passé dans mon cas, au début j'aimais moyen, maintenant j'aime bien.
En conclusion, cet album est bien loin d'être une perte de temps. Il faut l'écouter pour l'apprécier.
PS : le type qui parle de panoplie disneyland peut sérieusement se recoucher.
Pour avoir écouté au moins une vingtaine de fois cet album, je ne suis pas revenu sur mes réserves, bien au contraire.
Malgré une diminution radicale du tempo, je n'ai absolument pas trouvé cet album désagréable, et je trouve même que la chanson la plus médiocre est Retribution shall be mine (si on excepte la légère envolée en milieu de morceau) très très poussive pour un morceau speed.
Il y a une véritable puissance dans cet album et l'ambiance viking est toujours aussi présente, la préférence symphonique sur le folk ne faisant que rendre plus épiques les chansons. De plus je trouve les morceaux bien plus aboutis et complexes que les précédentes compositions (que je ne renie pas loin de là et qui restent d'une qualité très supérieure!).
Certes c'est plus doux et plus gentil, mais ça reste du Ensiferum, ils nous dévoilent seulement une autre facette de leur monde que je trouve très appréciable!
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