Linkin Park fut un groupe qui fit sensation dans la première partie des années 2000 avec son albums
Hybrid Theory et son successeur
Meteora, dans la même veine, qui fut très médiatisé. Ces deux albums se vendirent bien car ils écoulèrent respectivement 27 et 10 millions de copies dans le monde. Pourtant, en 2007, l'album
Minutes to Midnight, très hétérogène dans sa structure, dans ses thèmes abordés comme dans ses ambiances, déchira les fans. En dépit d'une ouverture à un public plus large, les ventes diminuèrent encore et l'album fédéra 8 millions de personnes. Mais beaucoup de metalleux se sentirent trahis par cet album et les suivants, le très froid (mais néanmoins culotté)
A Thousand Suns et son successeur l'inspiré Dubstep "
Living Things" se vendirent encore moins. Ce fut donc la surprise qui me domina à la lecture des premières déclarations, puis à l'écoute des premiers titres du nouvel album
The Hunting Party, sorti le 16 Juin en France.
Parlons-en. Je dois dire que
Linkin Park a mis les petits plats dans les grands pour séduire son ancien public Neo
Metal, et a même tenu compte du fait que beaucoup ont grandi (souvent sans eux) et tolèrent à présent des cris moins contrôlés, moins lisses. Keys For The
Kingdom, commence l’album méchamment! On nous dévoile un Chester qui nous vomit à la gueule un « NO CONTROOOOL !!! NO SURPRIIIIISE !!! » des plus libérateurs. Ses cris, d’ordinaire toujours très calibrés, laissent place à des hurlements bien plus gras, rehaussés qui plus est de guitares électriques vraiment Neo
Metal. De plus, la petite fille qui s'essaie au growl en fin de chanson m'a bien fait rire ! Le même phénomène se retrouve dans
War, où Bennington dénonce les atrocités de la guerre, sur des cris ravageurs, appuyés par une guitare pour le coup presque Punk. Mark The
Graves, change beaucoup de rythmes, entre l’explosion du début et de fin et le milieu atmosphérique. De même, A Line In The
Sand, dernière chanson de l’album, commence gentiment, puis s’enflamme. Son "give me back
Once more" de fin de refrain, hurlé par un Chester semblant être ravi d'être à nouveau libre, clôture parfaitement cet album.
Des titres plus proches d’un
Hybrid Theory sont aussi de la partie. On citera
All For Nothing (Feat Page Hamilton du groupe
Helmet). Celui-ci chantant assez bien sa partition sur un ton assez gai, et Chester Bennington l’accompagnant aux cris sur une guitare un brin folle, on obtient quelque chose de proche d’un Metalcore d’une certaine qualité, ce qui fait toujours plaisir. Je n’oublierai pas l’excellente Guilty All The Same, qui à elle seule suscita de nombreux espoirs quant au style musical de l’album. Mais plus que son jeu de guitare simple mais efficace, ou les cris chantés de Chester sur le refrain, c’est le texte de l’intervention de Rakim, légende du rap US, posé sur un flow lent, qui attire l’attention de l’auditeur (et lecteur) d’une lyric vidéo. C’est à la fois un réquisitoire frontal contre les producteurs et les maisons de disques obsédés par le profit qui n’hésitent pas à faire pression sur les artistes pour qu’ils fassent évoluer leur style musical, mais aussi une invitation à la révolte et à l’authenticité. Mais en lisant bien les lyrics, on comprend que si les producteurs exercent des pressions pour le fric, les artistes sont « tout de même coupables » d’y céder pour «la recherche de la gloire, de la Télé ou d’un nom ». Le message global sonne presque comme un mea culpa d’un
Linkin Park s’étant coupé de sa base ainsi, ce qui est plutôt touchant. Notons que l'album est autoproduit par Mike Shinoda, sans doute parce que la Warner ne cautionnait pas ce retour au Néo
Metal...
Wastelands vaut le détour : Chester donne de la voix, Shinoda a un flow rapide et la guitare est bonne. Je suis amusé qu’elle traite de la nécessité de se lancer face à un choix difficile (ce qui s’applique bien au groupe faisant à présent le choix difficile de composer à nouveau du
Metal.)
Rebellion, se moque des « pseudo-rebelles » que nous avons dans nos pays occidentaux en paix, qui « font partie des chanceux à n’avoir jamais connu l’oppression d’un flingue ». Une belle réflexion sur nos sociétés rehaussée par la prestation de Daron Malakian à la guitare et qui donne à ce morceau des faux-airs de
System Of A Down. Drawbar, en revanche, est très décevante. Inviter Tom Morello, ex-guitariste de
Rage Against The Machine et virtuose d’
Audioslave était en soi un symbole fort de retour à un mélange Neo
Metal et de Fusion. Mais elle alimentait aussi de grandes espérances. Or ce n’est qu’un interlude court (ce qui est déjà une idée de merde en soi quand on invite un monument pareil...) et surtout composé de quelques notes de triturage de guitare surplombées de notes simplistes de Mr Hahn, ce qui est très en dessous de ce qu’on pouvait attendre d’une telle coopération.
Comme un album de
Linkin Park sans ballades aurait tout de même été inenvisageable, deux ballades gentillettes au son impeccable trouvent aussi leur place dans l’album. Mais, par la quasi omniprésence de guitares électrique, elles sont bien plus proches d’un Pushing Me Away ou d’un In
The End (sans en atteindre l’intensité, toutefois) que d’un
Leave Out All the Rest. Until It’s Gone, qui traite de la propension humaine à vouloir retrouver ce qu’on a perdu, souvent sans se rendre compte d'à quel point c'était important, est entraînante et sonne vrai. The
Final Masquerade aux airs affirmés de
30 Seconds To Mars est très bonne, tant sur le plan du chant de Bennington que par sa rythmique entêtante, mais je regrette que celle-ci reste la même tout le long de la chanson, et que seul le ton plus ou moins aigu différencie les couplets des refrains. La chanson est sympa, mais on aurait aimé des lignes de chant plus diversifiées.
Le retour aux sources tant attendu… Et même au-delà. C’est ainsi que l’on pourrait résumer
The Hunting Party.
Linkin Park retrouve une sombre forêt qu’il n’a pas arpentée depuis longtemps, a pris son meilleur arc, et a tiré une flèche digne de Légolas vers le cœur de ses fans historiques. Je ne peux que saluer cette décision courageuse de revenir, par l'autoproduction, au Neo
Metal, bien mis en valeur question son, et espérer qu'elle sera couronnée de succès.
Pour moi beaucoup de remplissage de pistes mais réellement 5 pistes pas mal :
3. Guilty all the Same (ft.Rakim) 05:55
5. War 02:11
6. Wastelands 03:15
8. Rebellion (ft. Daron Malakian) 03:44
12. A Line in the Sand 06:35
Dommage qu'il fasse attendre la fin pour avoir droit au meilleur titre de l'album.
Donc une moitié d'album, le reste bof. Je mets la moyenne, c'est un 10 (sur 20).
Pour ma part je ne trouve pas la note de 17 volée. Merci beaucoup pour la chro!
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