C'est du sommet des verts alpages autrichiens que nous parvient un message éolien fort envoyé sous forme de sons enjoués. L'habillage de cet appel des sirènes se cristalliserait dans une énigmatique pochette d'album où l'oeil central qu'elle contient se veut pénétrant, comme pour nous chercher au plus profond de nous-mêmes. C'est dans ce dessein que le quintet de heavy symphonique inscrit son oeuvre, sous l'impulsion conjuguée du producteur et guitariste
Lanvall et de la talentueuse chanteuse Sabine Edelsbacher.
Quelque peu en retrait de la scène médiatique internationale du heavy symphonique, contrairement à certains groupes de même orientation musicale tels que
Within Temptation,
Epica ou
Delain, le combo n'en demeure pas moins bien présent à l'échelle européenne, jouant plutôt la carte de la sobriété au service d'un public acquis à sa cause.
Dans cet album, les qualités artistiques sont au rendez-vous, avec des morceaux élégants de par leur rythmique bien dosée, sensibles de par la finesse de leurs harmonies et de leur écriture, parfois énergiques mais jamais violents, nous gratifiant ainsi d'une écoute agréable sur l'ensemble de ce voyage musical. D'un point de vue technique, une orchestration judicieusement pensée est présente sans être pesante pour autant. Les fréquents passages instrumentaux en solo impressionnent par leur brio, les accords bien affutés et les arrangements, quant à eux, demeurent éminemment convaincants.
Globalement, cet opus de dix titres, dont deux bonus, se range stylistiquement dans la tradition propre au heavy symphonique, avec quelques passages instrumentaux empruntés à l'univers pop-rock. S'avérant accessible de par son ambiance relativement sereine et ses mélodies aisément identifiables, l'album s'imprime assez rapidement dans les esprits. Qu'en est-il alors de son contenu?
Tout d'abord, la moitié des morceaux sont de très bonne facture, à commencer par le titre éponyme de l'album. "
The Grand Design" est une véritable fresque musicale de dix minutes assurée à la fois par une rythmique progressive, par une voix au timbre clair distillant des notes très mélodieuses à cette composition et par des soli de guitare bien inspirés. Le tout est servi par une riche et fine orchestration et quelques passages d'influence orientale. Dans cette lignée, mais un poil en-dessous, on retiendra l'entraînant "
Flame of Passion", avec ses refrains addictifs, ses rythmes syncopés, son agréable instrumentation et un solo guitare de toute beauté.
Dans un registre plus soft, "The Most Beautiful Place" retient l'attention par le bel échange piano/voix, sa ligne mélodique nuancée et sa douce orchestration de fond, exempte de rythmique.
Plus magnétique encore, "
For Your Eyes Only" accroche par son côté classieux et solennel, ses refrains imparables et les subtiles variations de sa ligne mélodique, délicatement mis en exergue par son interprète.
Enfin, les amateurs de belles plages instrumentales ne seront pas en reste avec "
Empire of the Sun", où le jeu de guitare de
Lanvall fait merveille tout le long. L'atmosphère soft qu'il imprime à ce titre s'inspire des Pink Floyd et sa technique instrumentale renvoie à celle de grands guitaristes de rock tels que David Gilmour (Pink Floyd) ou Andrew Latimer (Camel).
Dans une moindre mesure, on pourra encore se concentrer sur l'entraînant "On the Top of the World". Ce titre nous octroie d'assez belles plages instrumentales ponctuées par des breaks bien distillés, avec un petit solo de guitare à la clé. D'un point de vue mélodique, on se situe néanmoins à un niveau inférieur à celui des morceaux ci-dessus. Tout comme le sensible "Taken Away", où le piano/voix est encore utilisé sur fond de douce orchestration. De son côté, l'énergique "See You Fading Afar", où le rythme semble s'accélérer sur fond d'ambiance typiquement heavy, peine plus encore à convaincre! De plus, sur le plan harmonique, les sobres variations témoignent d'un cheminement mélodique un peu fade.
On ressort de l'écoute de cet album plutôt satisfait au regard de la qualité de la production et des talents conjugués de Sabine et
Lanvall. On aurait pu souhaiter encore davantage de modulations dans les couplets, gommer quelques rugosités instrumentales, affiner encore les parties vocales sur certains passages, notamment grâce à la présence de choeurs. Non qu'on soit frustré, mais on a l'étrange sentiment que le groupe en a encore sous le pied et qu'il ne lâche pas tous ses chevaux! En effet, à l'écoute de certains morceaux mélodiquement imprécis, voire carencés, on peut ressentir comme un manque d'extase.
Cet opus conviendra tout de même à bon nombre d'amateurs de heavy symphonique à chant féminin. Sans faire partie des albums d'anthologie, on tient néanmoins là une pièce importante du répertoire déjà étoffé de ce groupe aux qualités multiples. Qualités qu'ils sauront sans doute encore mieux valoriser dans leurs compositions futures. Par cet opus, ils nous prouvent déjà qu'ils ont les arguments pour répondre à cette requête.
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