Remember…
Remember the past…
Le mont Olympe approche. Ce n’est plus qu’une question de temps, il est en vue. Chacun sait qu’ils peuvent le faire, ils y sont déjà plus ou moins. Ils sont déjà adulés des nymphes et de sujets littéralement à leurs pieds. Les grands maîtres fondateurs Stratovariens ne sont plus que poussières et souvenirs, et ne semblent pas en mesure de revenir dans la course effrénée et malsaine de la popularité.
La gloire éternelle approche. L’affront de la création. Cette innocence, voire même insolence dans la maîtrise de leur art malgré leur âge encore relativement faible ne pouvait qu’affirmer une soif de désir et une envie de conquête. Les deux premières armes furent si éclatantes et pures, sous les douces appellations d’"
Ecliptica" et de "
Silence", que personne n’en revint. Cette fluidité caractéristique des pays du froid, de la Finlande particulièrement, cette aisance dans l’art du riff meurtrier et de la mélodie divinement belle, cette simplicité farouche à jeter en pâturage au public des refrains qu’ils s’époumoneront à apprendre puis répéter.
Mais là où ces aveugles pâturages trouvèrent autant de génie dans les salves suivantes, quelques spécialistes avisés prirent peur. Pourtant, "Victoria’s Secret" ne fut-elle pas nommée par certains acharnés comme la meilleure composition de ses habitants du froid ?
Il ne restait alors plus qu’un pas, un seul, et le fauteuil de leader serait à eux, pour toujours sans doute. Définitivement. Mais un certain Tony Kakko, fondateur émérite, eut un jour, envie de rêver. Il voulu penser, oser, choquer, comme las de travestir son for intérieur.
"
Unia" (rêves en finnois) vit alors le jour, et la réaction fut aussi immédiate que prévisible.
L’Olympe s’éloigna, inéluctablement. Le risque, le rêve de Tony ne fut pas compris, même Jani, vaillant guitariste, délaisse le groupe. Cette complexité créative, cette approche progressive et en constant mouvement, cette richesse sonore quasi jouissive, cette prépondérance pianistique absolument sublime, cette beauté pure, enfin, et non lisse et insipide, déçurent le plus grand nombre, au grand dam de quelques ardents défenseurs.
A l’orée d’une nouvelle création, aidé par un nouveau virtuose nommé
Elias Viljanen (effectuant son premier passage en studio),
Sonata Arctica allait-il tenter un nouveau coup d’Etat afin de reprendre son règne ? ou au contraire continuer à rêver, toujours et encore plus profondément dans les tréfonds visiblement de plus en plus tourmentés de son principal compositeur et vocaliste ?
Les masses ne seront une nouvelle fois pas assouvies, et c’est tant mieux. En préférant la musicalité à la simplicité, Sonata gagne des jalons de musiciens, et non plus de simples interprètes, aussi bonne copie soit-elle de
Stratovarius.
Car "
The Days of Grays" va encore plus loin que son prédécesseur, plus progressif, plus torturé, plus original, probablement plus cohérent également, il s’écarte définitivement du chemin tout tracé que bon nombre avaient gravés pour eux. Si le retour au speed fut envisagé, il n’en fut rien.
Présenté dans un coffret digipack véritablement somptueux, le livret offre la couleur. Mélancolique. Froid. Mais bariolé, un peu fugace, probablement empreint de folie.
"Everything Fades to Grays" débute le périple. Une tension grimpe, déjà, paroxysmique ? Non, une mélodie de piano prend rapidement le relai, emplie de mélancolie et de beauté, en évitant avec un talent sidérant la niaiserie caractéristique de l’exercice. L’orchestre, réel ici, est néanmoins présent, en trame de fond. "Deathaura" laisse perdurer la mélodie, puis écrase le tout par un riff sombre et presque extrême, les cuivres emplissent l’espace sonore…puis, une légère brise féminine, le
Silence, le minimalisme, la pureté. Tony débute mais le rythme s’emballe, les orchestrations prennent de l’espace, la double pédale également, mais les cassures rythmiques se succèdent, apportant théâtralité et richesse à cette longue composition d’ouverture (onze minutes les deux bout à bout). On remarque une ligne vocale directrice, mais une multitude de chœurs, mis en valeur par une production très sombre et ample.
Ne pas évoquer la comparaison de forme avec "The Poet and The
Pendulum" serait impossible, tant cela semble évident, mais Sonata va bien plus loin, explorant mille et une facettes de son étrange et désormais unique personnalité.
Laissant libre cours au talent inouï d’Henrik Klingenberg, les Finlandais ne se fixent aucune limite. Éclaboussant de sa maîtrise l’art de cette cuvée 2009, on citera la ligne mélodique magnifique de "Breathing", sincère et poignante, minimaliste, au riff se distillant dans le temps, et au chanteur unique, évoquant un vide immense, non pas créatif, mais émotionnel, comme s’il représentait cette sensation si complexe de vide intérieur, de mélancolie exacerbée. Mais à son parfait contraire, on trouvera la folie, voire la schizophrénie d’un génial "Zeroes". Débutant sur un chant en retrait étrangement malsain, les chœurs qui prennent le pas semblent presque désabusés, tandis que le refrain semble renvoyer au "Superheroes" de
Edguy par le texte. Puis il y aura ce solo, amené par une batterie terriblement bien mixée et des hurlements quasi brutaux de Tony, qu’il maitrise de mieux en mieux. Débridé, complètement barré, hésitera t-ont à dire expérimental ? Henrik y dévoile une force quasi indescriptible. Magique.
D’une variété incroyable, mais en gardant une impressionnante cohésion, "
The Dead Skin" marquera par son approche radicalement différente tout au long de sa progression. D’une introduction mélodieuse, la démence, les effets de distance dans le chant, tout amène à une longue descente aux enfers émotionnelle, qui trouvera comme égale son point culminant en la présence d’un break dantesque. Le chant de Tony atteint ses différents paroxysmes, beau, cynique et surtout des cris de plus en plus présents, très extrêmes dans leur fond et leurs sens.
"
The Last Amazing Grays", à l’instar de "No
Dream Can Heal a
Broken Heart", continuera d’apporter une profonde mélancolie à l’œuvre, par le biais d'une mélodie centrale au piano remplaçant les riffs en eux-mêmes.
The Last Amazing Grays, magnifique, évoque un "
Paid in Full" ou "
For the Sake of Revenge" plus symphonique et mature, mené à la baguette par un Tony ayant presque tout créé ici. L’influence de
Nightwish se ferait presque insistante, notamment dans la présence de cuivres, même si la profondeur d’interprétation laisse pantois (les chœurs suivant le refrain sont d’une beauté indéfinissable).
En fin de compte, le single imposé par
Nuclear Blast, "
Flag in the Ground", pourrait (presque) ne pas être à sa place s’il avait été speed. Puisqu’il n’en est rien, se parant de quelques coups de double pédale mais en mettant en avant une nouvelle fois les vocaux de Tony (ce pont est magistral) et un aspect celtique jusque là totalement nouveau de l’univers du groupe.
Ayant su composer des compositions dotées d’une âme, ne pas toutes les décrire en devient frustrant, tant "
The Truth is
Out Here" est également nouveau pour un groupe aujourd’hui complètement personnel, en dehors de toute scène et de toute concurrence, libre de son talent et de ses actes. Se rapprochant presque de l’univers onirique d’
Ayreon, cette composition très complexe dans les placements vocaux et les nombreuses pistes (de la plus mélodique au hurlement primaire), trouve sa plénitude sur un solo de Henrik renversant, unique, se rapprochant d’une sonorité d’un saxophone, jazz apportant un spleen encore plus grand et déchirant, prenant aux tripes comme jamais le groupe ne l’avait fait. Même "In The
Dark", pourtant uniquement bonus track, se transforme en un bijou d’interprétation que l’on rapprochera des grands crooners.
Que tirer de tout ça ? Oui,
The Days of Grays n’est clairement pas une œuvre réalisée pour les foules, non, elle est bien plus que ça. Alliance subtile, alchimie vaporeuse de mélancolie, de beauté et d’agressivité émotionnelle. La féérie de
Unia est encore plus ou moins présente mais, d’une manière similaire à "My
Dream's But a Drop of
Fuel for a
Nightmare", se broie à une atmosphère malsaine. C’est cet aspect si dérangeant, d’une féérie finalement annihilée par la maturité de ses compositeurs, qui offre toute la richesse et l’intérêt d’un chef d’œuvre créé par des cœurs sincères et intègres.
Sonata Arctica continue sa lente mutation, son évolution naturelle vers plus d’originalité, prouvant au passage que le metal mélodique peut encore offrir de bien belles sensations à qui veut bien les entendre. Et nous les en remercions sincèrement. C’est donc bien bas que je les saluerais, étourdi devant tant de talent.
Sonata Arctica, l'un des groupes mythiques que j'écoute depuis un moment, je ne pouvais hésiter en achetant le dernier, The Days of Grays, avec une magnifique pochette. Je me le suis procuré à prix neuf et en version digipack collector... pour rien !!
Album très décevant, vraiment. Je m'attendais à mieux. Je suis beaucoup plus attiré par le Power que par le Prog donc forcément... Silence est le meilleur album selon moi. Outre les rythmes Power moins présents (voire inexistants) je penserais que la voix de Tony me plairait plus. Résultat: niet! Certes, son chant a beaucoup changé mais il n'est absolument plus envoûtant, il est même carrément saoulant et ce, sur la totalité de l'album.
Si je me suis procuré la version collector c'est parce qu'il était indiqué "Orchestral Version".
Je me suis dit "chouette! Si c'est comme avec Nightwish, je ne serais pas déçu!". En effet, les parties musicales classiques sont époustouflantes mais c'est une déception totale qui m'envahi lorsque j'entends (encore -_-) le chant sur cette version.
J'aurai du réfléchir davantage, Orchestral ne veut pas forcément dire Instrumental...
Dommage, je ne le redirai jamais assez, mais je suis extrêmement déçu ! Cet album est destiné aux fans du groupe qui l'ont suivi depuis ses débuts, qui ont surtout aimé Unia également. Je tiens à signaler que les membres du groupes sont talenteux, ils ont travaillé dur pour réaliser cet album, mais il ne m'était pas destiné :)
Cela dit, j'avais adoré Unia, c'est un de mes disques favoris tous styles confondus, mais ce Days of Grays me laisse de glace mis à côté. J'ai d'ailleurs modifié il y a peu ma chronique, qui se trouve un peu plus bas...
Vraiment décevant.
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire