Le paradoxe ! Œuvre de discorde autant que de ralliement quand il se fait artistique, le paradoxe, ayant pour but d’allier les inverses, de faire jouer les antinomies, de lier feu et glace est devenu pour les grands compositeurs un symbole d’avant-garde parfait pour souligner l’unicité d’une œuvre.
Beethoven ira même jusqu’à dire (parait-il) que c’est ce même paradoxe dans sa musique, agrémenté de nombreuses cassures symphoniques et à mille lieux d’un Mozart ou d’un Chopin, qui fera vivre sa musique à travers les siècles.
Si nous courons tout droit au hors sujet d’après vous, vous allez comprendre qu’il n’en est rien, et qu’il ne suffit pas plus que de se pencher sur la pochette de ce second opus de Sonata Artica pour comprendre où je veux en venir.
En effet, l’atwork (beau ? laid ? je ne saurais dire…) de
Silence offre ce paradoxe si précieux entre jour et nuit, façade de ce que sera et ne sera pas le disque.
Réunissant les contraires et les expérimentations musicales venant de paysages musicaux radicalement différents il ne sera pas, cortège et alliage d’excellence et de médiocrité en revanche sera ce de quoi est fait
Silence.
Comprenez bien, et replongez vous dans le contexte (le contexte mon bon seigneur, le contexte), "
Ecliptica" avait révélé à la face du monde un groupe d’adolescents écœurants de virtuosité en proie à une crise de personnalité que l’on espérait alors chronique, mais rapidement rattrapée par une fougue, une joie de vivre et un élan communicatifs qui faisaient taire toutes formes de critiques sur les ardeurs des jeunes Finlandais.
Ils étaient donc attendus au tournant, et quel tournant ils prirent les bougres, celui de revenir avec un album qui devint rapidement culte dans le monde du speed mélodique et prit la place de référence dans la carrière du combo.
Culte ? Non,
Silence n’en a clairement pas la carrure, et les hordes de fans très (trop ?) jeunes écoutèrent sans doute avec un manque d’attention un album très inégal, passant du bon au très bon mais sachant également retomber dans les abimes d’une conformité navrante de banalité.
Le son n’a pas bougé d’un iota, simplement gagné un peu en puissance et masqué les quelques imperfections sonores de "
Ecliptica", mais le tout reste très propre, très lisse et compact (la marque Finnvox et Mika Jussila est reconnaissable entre mille) et, si elle ne représente pas encore un défaut majeur en soi, elle laisse déjà entrevoir des limites alors que le budget avait été revu à la hausse suite au succès du premier jet.
S’ouvrant sur une narration sombre et clichesque comme seul le heavy peut encore en produire, "…of
Silence" nous donne les clés d’un monde imaginaire, peuplé de mélodies limpides, de refrain incroyablement beaux et rapidement mémorisables, de pluies de solos mirobolants de claviers et de guitares à chaque détour de couplet, de créatures parfois féériques (que son chant est sensuel...) parfois horrifiques (...même s’il montre parfois les crocs) et d’arrangements épiques faisant office de terre promise pour un public affamé.
A "Weballergy" incombe la lourde tache de débuter les hostilités, et c’est un Sonata Artica au sommet que nous rencontrons, toujours aussi sympathique et disponible mais plus mur, plus mature et sûr de lui, avec cette petite touche de folie bien placée mais moins prépondérante que par le passé. Très rapide, la double pédale faisant office de rouleau compresseur tandis que le riff nous aplatit sous son double pianistique (la liaison guitare/claviers est géniale sur ce titre). Les solos, un peu moins plagiés sur
Stratovarius, sont délectables tout comme d’un refrain unique, sur lequel Tony Kakko y chante très haut, à la limite de ses possibilités mais avec grande puissance (hit !).
Mais ce n’est pas fini, la première partie du disque va voir s’enchaîner tubes sur tubes, regorgeant d’un talent d’écriture que nous n’aurions même pas soupçonné (enfin si, un peu…).
"False News Travel Fast" déferle dans cette brèche mélodique si travaillée avec un solo magnifique, sorte de questions/réponses entre les différents instruments, sur une rythmique aussi mélodique qu’affreusement speed, sur des lignes de chant splendides, inspirés et se permettant des transitions incroyables (noter l’accélération vocale à la quatrième minute, sortant de nulle part et cassant un rythme pourtant bien installé).
Comme je le disais, paradoxe entre médiocrité et excellence, la magie du pétrifiant "
The End of This Chapter" (où la mélodie de piano la plus belle qu’ait jamais composée Tony, d’une sensibilité si rare qu’elle ramène en nous toutes les épreuves les plus mélancoliques d’une vie) se renverra à la banalité d’un insipide "
Land of the Free", où rapidité devient synonyme d’ennui et de prévisibilité (notamment sur un refrain où personne ne semble y croire, ni les vocalises, ni les rythmiques).
Là où "
The End of This Chapter" respire une atmosphère grandiose et artistique sur plus de sept minutes (la performance vocale y est exécutée sans que l’on puisse y faire l’ombre d’un reproche), une autre ballade comme "Sing In
Silence", belle mais inexpressive (un chant anachronique que l’on croirait cynique sur une unique nappe de claviers, étrange) se chargera de remplir un album trop long, habillé de quatorze titres pour soixante minutes dont une vingtaine était largement dispensable.
Car les morceaux speed prennent déjà la fâcheuse habitude de se ressembler ("San
Sebastian", le néanmoins très bon "
Black Sheep") et les ballades s’amoncellent par trop grand nombre ("
Last Drop Falls", arrivant trop tôt dans la setlist, et perdant de sa beauté un peu surjouée ou l’inutile "Tallulah", ayant pourtant une entame au piano splendide mais annihilée par une conformité emplie de niaiserie pop). Si bien qu’il devient difficile à l’intérieur de ce labyrinthe de pistes de trouver LA chanson qui détruira tout sur son passage, celle qui s’intitule ici "
Wolf &
Raven" (nous passerons sur "
Revontulet", solo de une minute trente sympathique mais démonstrative au possible et quelque peu inutile une nouvelle fois).
"
Wolf &
Raven" ; furieuse chanson où les guitares se font mordantes, agressives, Tony hurlant comme si rarement il le fait (et s’accordant une légère éructation si jouissive), avec hargne et conviction pour tout défoncer sur un refrain magnifique, épique, grandiose et puissant. Les riffs tailladent la toison sonore pour créer une brèche dans notre sensibilité et y trouver une place confortable. Pleine de passion et de rage, emplissant notre esprit de délectation (que ces solos néo classiques sont bons quand ils sont joués si intelligemment), il prépare le terrain avant un final de onze minutes : "The
Power of One".
Malheureusement, rien ne viendra nous émoustiller sur ce final, alternance de parties speed et au piano, comme un assemblage maladroit de plusieurs morceaux afin de créer une pièce conséquente.
Finalement, c’est donc entièrement paradoxale que sera cette écoute, nous ballotant sans arrêt radicalement d’un bord à l’autre, de l’excellence à l'imperfection d’un titre à l’autre. Une carence sur l’ensemble se retrouvant dans une note au final moyenne, parfaitement représentative d’un album bancal, mais culte. Comme quoi…
À l'époque il m'avait mit la claque mais c'est vrai que ma connaissance en metal debuttait à peine bon après l'avoir écouté à de nombreuses reprises je lui trouve des défauts evidents où l'excellent côtoie le pas terrible cela dit Silence reste pour moi un de mes albums favoris dans la catégorie heavy speed mélodique allez savoir pourquoi c'est sans doute lié à cette époque où le genre metal allait définitivement prendre une grande place dans ma vie.
C'est bizarre, parce-que c'est mon préféré ! Aucune fausse note, ils ont enfin trouvé leur personnalité, et la dernière pièce je la trouve magistrale, avec ses ambiances qui dressent les poils.
J'ai 62 ans et j'écoute du hard-métal depuis une cinquantaine d'années. J'ai acheté mon 1er vinyle à 10 ans ( Deep Purple In Rock ) Je suis donc de la vieille école. Et quand les groupes de Power mélodiques sont arrivés, j'avoue que j'ai eu du mal. Et puis en écoutant Stratovarius, Hammerfall, Helloween, etc... tout doucement mon oreille s'est habituée. C'est donc avec plaisir que je découvre Sonata Arctica. Il faut avouer que pour pondre de belles ballades, ces groupes n'ont rien à envier à des Scorpions, Bon Jovi, etc... Le seul petit reproche que je peux faire, c'est parfois la longueur des morceaux.
18/20
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