Fini les petits jeux de guerre, place au massacre…
Misanthrope a beau se résumer à cinq personnalités, la puissance de feu qui se dégage de ce
Sadistic Sex Daemon renvoie à l’image d'une phalange hermétique de 300 spartiates assoiffés de sang prête à se jeter sur tout ce qui se présentera à elle. Comme dirait si bien Jacques Brel : « au suivant ».
Comment expliquer un tel retour aux sources de l’extrême ?
Misanthrope vient de boucler une tournée triomphale venant promouvoir leur 6e album,
Misanthrope Immortel, placée sous le signe d’un plébiscite unanime tant de la part des fans que des critiques. Toutefois le phénix a tendance à se reposer sur ses lauriers, si chèrement acquis. En effet,
Misanthrope s’est laissé gagner par un mal difficilement identifiable. Peu à peu, le groupe s’est « embourgeoisé » au cours de
Libertine Humiliations et
Misanthrope Immortel, des albums excellents, mais trop édulcorés, qui finissaient par nuire à l’essence de
Misanthrope. La trilogie produite par F.Nordström a le mérite de donner un second souffle bienvenu à un groupe qui peinait jusque-là à sortir la tête de l’eau. Mais au bout de trois albums, l’élan initial perd de sa spontanéité et surtout de sa force. La stabilité peut avoir des effets pervers parfois (même line-up, même producteur, même son).
Misanthrope en serait-il pour autant devenu prévisible ? Ô que non, l’inspiration est toujours bien présente, mais il manque ce grain de folie, ou dans le cas de
Misanthrope, cette colère viscérale qui faisait de
Visionnaire, pardonnez-moi l’expression, un « putain » d’album.
L’esprit originel misanthropique surgit de l’ombre sans crier gare.
Les circonstances qui vont bousculer le quotidien du groupe demeurent, somme toute, classiques : changements en cascade (Alexis Phélipot (batterie) et Jean-Baptiste Boitel (guitares)), inspiration en suspension (7 mois de composition et d’enregistrement au lieu des 3 prévus), nouvelle orientation stylistique (un death plus brutal).
Le résultat, c’est un album puissant et vicieux, encore plus direct et bestial que
Visionnaire. La cause première provenant de l’apport de sang neuf qui a su ré-aiguiser les bas-instincts de la Bête. Les fulgurances de Gaël Féret, « batteur de l’Enfer », apportent un renouveau en matière de puissance ; il représente le pilier autour duquel s’articule toute la musique de
Misanthrope. Les guitares assurées à la dernière minute pour l’enregistrement par Anthony Scemama jouent technique, pour un résultat épuré et tranchant. Quant aux claviers et la programmation, moins clinquants que sur les dernières productions, c’est Jean-Baptiste Boitel qui en assure l’enregistrement plus que leur composition. Mais l’homme qui tire les ficelles sur cet album, qui signe la composition de la totalité des titres, sauf les paroles (monopôle de S.A.S.), et l’entière production de l’album n’est autre que Jean-Jacques
Moréac, connu pour être avant tout le bassiste du groupe. Et le résultat ne manque pas de sauter aux oreilles.
Si
Visionnaire est considéré comme l’album noir de
Misanthrope (facette S.A.S./axé death suédois, en provenance direct de Göteborg),
Sadistic Sex Daemon s'annonce d'ores et déjà comme l'album rouge (facette
Moréac/axé death américain). C’est un brin exagéré car les deux influences se mélangent sur ces deux albums mais chaque fois avec une dominante. Ce qui caractérise le plus ce nouvel album, c’est l’efficacité, produit de la maturité et de la technique. La rythmique et les arrangements ont été simplifiés ce qui donne un rendu plus brutal et direct, quasi-live, qui balaie tout sur son passage. C’est un
Misanthrope métamorphosé en mastodonte qui vous lamine sans concession. La percussion se fait intransigeante sur des titres comme Sans Complaisance,
Armageddon à l’Elysée, et Grand Démonologue. On peut déceler même une orientation Death’n Roll sur quelques morceaux,
Sadistic Sex Daemon et Romantisme Noir, en tête, qui apportent une nuance supplémentaire à l’identité déjà riche et complexe de
Misanthrope. Toutefois, certains titres sont plus convenus, et réduisent l'impact ravageur de l'album, à l'instar de l’
Extinction d’une Etoile, qui dépareille par son côté ultra mélodique, voire lyrique, ou encore l’intro décalée au clavier de Conversation Métapsychique, et les expérimentations vocales sur la Ballade des Cornus, qui révèlent que la métamorphose n’est pas encore achevée empêchant un album rouleau compresseur de pouvoir dérouler sans fausse note.
A la frontière entre Art brut et art de Brutes,
Sadistic Sex Daemon se singularise par un retour au
Misanthrope de l’Ombre, puissant et possédé. A l'entâme d'une seconde jeunesse inespérée, le cadavre misanthropique ne fait pas que remuer, il tabasse encore, et pour notre plus grand plaisir.
Ahou ! Ahou ! Ahou !
Merci Arthur.
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