Pitfalls

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18/20
Nom du groupe Leprous (NOR)
Nom de l'album Pitfalls
Type Album
Date de parution 25 Octobre 2019
Style MusicalMetal Progressif
Membres possèdant cet album54

Tracklist

1.
 Below
 05:33
2.
 I Lose Hope
 04:44
3.
 Observe the Train
 05:08
4.
 By My Throne
 05:45
5.
 Alleviate
 03:42
6.
 At the Bottom
 07:21
7.
 Distant Bells
 07:23
8.
 Foreigner
 03:52
9.
 The Sky Is Red
 11:22

Bonus
10.
 Golden Prayers
 04:26
11.
 Angel (Massive Attack Cover)
 06:27

Durée totale : 01:05:43

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Leprous (NOR)


Chronique @ Eternalis

20 Octobre 2019

"Pitfalls" est l’œuvre différente d’un groupe ne faisant rien comme les autres depuis ses débuts

Aimer un album est une expérience très personnelle. Un certain nombre de raisons en sont la cause. Parce qu’aimer un album peut provenir de plusieurs éléments. Il peut être historique, pour l’apport de l’œuvre à son registre, son importance dans le développement d’un genre ou l’émoi qu’il a pu susciter à une époque donnée. Il peut-être social, l’effet de masse que génère un engouement faisant que l’on aime ce que l’autre aime, créant ainsi un vaste buzz autour d’un artiste, d’un album ou même d’un titre. Il peut aussi être émotionnel, résonnant tel un écho nostalgique sur notre personne. Il peut-être aussi purement subjectif...le fait d’aimer sans pouvoir poser de mots dessus, d’être touché, simplement ému.

Leprous a désormais touché plusieurs de ces catégories dans son giron de la musique progressive mais force est d’admettre que "Pitfalls" risque de surprendre, désarmer, interloqué, choqué ou décevoir tout autant qu’il pourra émerveiller. Les norvégiens sont arrivés à un stade où il ne faut désormais plus attendre d’eux quelque chose de convenu ou simple à appréhender.
"Malina" avait créer une fracture avec les premiers disques, délaissant sensiblement cette technicité démonstrative, ayant atteint son paroxysme avec "The Congregation", jugé aujourd’hui trop complexe et mathématique par son géniteur Einar Solberg. Ce nouveau disque sera-t-il dans la lignée ? Rien n’est moins sûr.
Ce qui surprend, et positivement, c’est à quel point Leprous est reconnaissable malgré l’accumulation de différences entre ce septième album et les précédents. Écrit telles des confessions sur la dépression dans laquelle Einar a plongé après le retour de la précédente tournée, "Pitfalls" représente un abandon de soi, une ouverture sur son désespoir et la maladie qui l’a rongé pendant des semaines.

La première sensation est de se demander où sont passées les guitares ?
Elles semblent initialement absentes, masquées, invisibles à nos oreilles attendant naïvement des riffs sur cordes vides lourds et angoissants tels que Tor sur sa 8-cordes nous a habitué depuis des années. Elles surgissent progressivement, bien plus subtiles, souvent clean mais finalement omniprésentes, constamment poursuivis par les nombreux synthétiseurs d’Einar et la batterie d’un Baard Kolstad au jeu toujours aussi fouillé et impressionnant dans un registre pourtant extrêmement dépouillé et minimaliste.
La question qui va bruler les lèvres de beaucoup se résume en quelques mots : Leprous joue-t-il toujours du metal ?
Oui. Non. Peu importe. On s’en fout même complètement à l’écoute, progressivement transcendante, de "Pitfalls". « Nous devenons de plus en plus Leprous » disait Einar durant le processus de création de "Malina"...c’est encore plus le cas ici. N’ayant que faire de perdre potentiellement des suiveurs en route, il semble évident que Leprous évoque, sur cet album, plus facilement Massive Attack, Muse ou Radiohead (tous dans des registres bien différents) qu’Ihsahn, Devin Townsend ou Between the Buried and Me. Les growls sont bannis, la saturation presque absente, les compositions sont longues, planantes, atmosphériques, minimalistes, bourrées de moogs, de boucles électroniques, d’envolées de cordes et du chant enchanteur d’Einar...tout en portant en elle une noirceur évidente, un désespoir criant mais une recherche d’espoir, une volonté de s’en sortir, d’entendre les paroles bienveillantes menant à la sortie du tunnel.

Dans les faits, cela se reflète dans les choix de titres dévoilés, dévoilant progressivement et intelligemment la direction que prendra l’album. D’abord en douceur avec l’ouverture fantastique que représente "Below", pur produit Leprousien (désormais une marque déposée !). D’abord des sonorités un peu étranges et fantomatiques sur lesquelles Einar va poser sa voix, complètement déboussolée et d’une fragilité troublante, loin de la force d’un "Foe" ou "The Price". Sa voix se brise dès ce premier refrain d’une beauté effarante, aux quelques guitares éparses car largement surplombé d’une mélopée de violons d’une grande mélancolie. La seconde partie se rapproche plus volontiers du précédent album, notamment dans des plans plus techniques, fugaces mais bien présents, où l’asymétrie des guitares reprennent le lead sur le reste. Il y a ensuite "Alleviate", plus troublante, très pop dans l’âme, à la richesse sonore impressionnante mais complètement dénuée de ce que le Leprous d’il y a dix ans aurait fait. Baard parvient à travailler un jeu très intelligent sur une composition lente, jouant tel un percussionniste accompagnant les samples étranges qui la ponctue. La montée en puissance se fait par l’intensité que place Einar dans sa voix, progressivement de plus en plus puissante jusqu’à cette jouissive, certes évidente mais sublime explosion que représente la dernière minute. Le fait que le vocaliste soit sans aucun filtre, cru et à nu, reflète une sincérité désarmante, comme un chemin de croix qui pourrait trouver une issue positive. Quant au fabuleux "Distant Bells", seul morceau écrit par Simen Borven (basse), elle est l’une des plus belles réussites de cet album et véritable étendard du nouveau son des norvégiens. Une lente progression de sept minutes, d’abord un piano/voix extrêmement mélancolique, avec quelques trouvailles sur la ligne vocale démontrant tout le travail d’Einar pour faire vivre ses mots et non simplement réciter docilement un texte. Alors que l’on imagine un emballement après le premier titre (avec ce bon vieux gros riff qu’une multitude de groupes de prog aurait placé là), Leprous continu de semer le doute en débutant plutôt un léger beat électronique et des arrangements orchestraux. L’ambiance est, certains en témoigneront, plombante de tristesse mais on ressent de plus en plus que le bouillonnement est là, que le volcan s’apprête à exploser. Explosion sur un dernier tiers beau à pleurer (expérience vécue...), dévoilant peut-être la plus belle interprétation jamais faite par Einar, sortant du plus profond de ses tripes.

"Distant Bells" est la meilleure représentation du reste de l’album, de cette fausse simplicité cachant une recherche constante de sons, de détails et de nouveaux éléments mais qu’ils n’ont cette fois jamais déguisé derrière des murs de guitares ou de plans improbables et injouables. Sans renier son passé, Leprous tisse son avenir en cherchant à s’extirper des pièges d’un artiste ayant un son si singulier qu’il peut très facilement s’enfermer dedans.
On pourra penser à "By my Throne", bien plus technique qu’il n’y parait et enveloppé dans des ambiances trip hop, ou encore à "I Lose Hope" qu’un Muse n’aurait pas totalement renié sur "The 2nd Law" sur les arrangements de voix, cette petite mélodie syncopée de guitares et ses multiples effets de claviers presque aliénants. Etrangement, Leprous fait des miracles sur cette composition (cette voix transcendée ...) et semble même plus à l’aise que sur certains titres lents de "Malina" qui semblaient parfois un peu là pour du remplissage.
Car en neuf titres, "Pitfalls" n’en contient aucun, chaque morceau ayant sa personnalité propre et servant l’ensemble sans qu’aucun ne semble là pour la beauté du décor. "At the Bottom" renoue avec des terres plus connues des norvégiens, notamment par ce côté techniquement très audible, des guitares lourdes et une tension générale jouant constamment aux montagnes russes. Il en va de même pour "Foreigner", faussement accessible et rappelant plus facilement "The Congregagtion" dans son immédiateté et son riff de guitare facilement discernable mais pourtant totalement instable. Ne parlons même pas de Baard qui, comme sur un "Moon" ou "Down" joue comme un épileptique (toutes ces ghost notes chiantes à jouer au possible) pour, semble-t-il, nous offrir un final plus en accord avec nos attentes.

Nos attentes ? C’est un magistral "The Sky is Red", long de onze minutes, qui vient les combler en nous collant par la même occasion la plus grosse baffe du groupe depuis des années. Expérimental, noir à l’extrême, dérangeant et totalement surprenant, le morceau semble créer un chainon improbable entre "Bilateral" et "Malina", entre l’angoisse et l’extravagance. Leprous a été en Serbie pour enregistrer avec une chorale professionnelle ce qui ressemble à une œuvre dans l’œuvre, sans refrain, découpée en plusieurs parties. La première se pare de guitares tordues et d’une caisse claire à la sonorité étrange et lointaine, Einar se faisant tour à tour doux et positif ou complètement à bout de nerfs, sans pourtant jamais poser un seul mot hurlé. Le seul solo de l’album surgira plus tard, mélodique mais très grave dans sa résonance, long et tortueux dans son déroulement. Jusqu’à son aboutissement dans une dernière étape chaotique et étouffante, comme une BO de film. Je préfère ne pas en parler plus pour laisser la surprise sur ces cinq dernières minutes que nous n’aurions plus pensé chez Leprous, qu’Einar lui-même n’aurait pas imaginer en 2019 ...

"Pitfalls" est grand. Leprous aussi. Il demande du temps et de l’attention, finalement comme chacun des albums précédents, mais surtout un effort de concentration car s’il s’y passe toujours énormément de choses, le domaine d’attention n’est plus le même. Certains ne s’y retrouveront pas, d’autres au contraire pénètreront peut-être plus cet univers moins surproduit et gonflé en technicité. Quant à ceux qui ne voient plus l’intérêt d’inclure Leprous dans une rubrique dédiée au metal, il est évident que les norvégiens n’ont cure de ce type de reflexion aigrie et réductrice. Pour aller en ce sens, inutile également de noter cet album puisque chacun trouvera à y redire. "Pitfalls" est l’œuvre différente d’un groupe ne faisant rien comme les autres depuis ses débuts. Confirmant ainsi son talent pur et son excentrisme dans la façon de mener leur carrière. Avec ou sans vous.

39 Commentaires

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Molick - 05 Septembre 2020:

@Gustave : Donc le métal n'est jamais commercial, le néo-métal, le métalcore à midinettes, tout ça n'existe pas ? Et donc le free jazz et la musique contemporaine qui se refusent à la facilité c'est du métal ?

Même si je suis pour laisser les groupes qui ont un passé métal (Anathema, Leprous, Ulver, Empyrium, ...) sur SoM, la question est légitime. En tout cas il est clair pour moi que le groupe ne pratique presque plus de métal progressif, mais plus un rock/pop progressif (ce qui n'est nullement péjoratif).

J'en profite pour parler de l'album avec le recul. A part quelques morceaux de temps en temps, il ne tourne pas souvent chez moi, en tout cas bien moins souvent que Malina.

David_Bordg - 06 Septembre 2020:

Ils sont tous terribles, même si je préfère effectivement pitfalls à Malina (c'est celui que j'aime un chouïa moins). Je trouve que PITTFALLS reste metal et agressif mais avec d'autres éléments qu'habituellement. Après l'équilibre parfait reste pour moi THE CONGREGATION dans ce cas.

 
Madness77 - 06 Septembre 2020:

Je préfère également the congregation après je n'ai  rien contre les expérimentations et Leprous est un groupe qui n'a eu de cesse d'évoluer son style depuis leurs débuts je ne suis pas contre au contraire j'aime d'autres musiques que le metal mais force est de constater que les guitares sont de moins en moins présentes dans leurs compos mais dans l'ambiance ça reste très sombre c'est déjà ça. 

 
Madness77 - 06 Septembre 2020:

Parfois on est plus sensible à l'ambiance d'un album metal ou pas que par la musique elle même cela dépend bien sûr de la sensibilité de chacun  c'est vrai que la musique de leprous demande une grande ouverture d'esprit pour l'apprécier pleinement. 

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