The Congregation

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17/20
Nom du groupe Leprous (NOR)
Nom de l'album The Congregation
Type Album
Date de parution 25 Mai 2015
Style MusicalMetal Progressif
Membres possèdant cet album89

Tracklist

1.
 The Price
 05:14
2.
 Third Law
 06:18
3.
 Rewind
 07:07
4.
 The Flood
 07:51
5.
 Triumphant
 04:25
6.
 Within my Fence
 03:16
7.
 Red
 06:35
8.
 Slave
 06:37
9.
 Moon
 07:13
10.
 Down
 06:26
11.
 Lower
 04:34

Bonus
12.
 Pixel
 05:15

Durée totale : 01:10:51

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Leprous (NOR)


Chronique @ Eternalis

31 Mai 2015

Nous pouvons encore être surpris en 2015. Rien que pour cela : merci.

Etre encore surpris en 2015. Susciter l’admiration, la stupéfaction et ne jamais comprendre ce qui nous arrive ; sensation devenant si rare et inconfortable lorsque nous sommes si habitués à analyser, disséquer et ingurgiter des albums par palettes.
Découvrir encore un disque aujourd’hui qui nous mette en position de faiblesse, de découverte, d’incompréhension face à une masse d’informations si dense et émotionnelle que nous ne parvenons de prime abord à la comprendre et la ressentir. Tant de grands albums progressifs ont déjà été écrits qu’il semble que tout ait déjà été dit, inventé et répété depuis des années, ne provoquant désormais ni grand frisson ni plongeon vers l’inconnu, malgré de grands encéphalogrammes de plaisir (rester uniquement tourné vers le passé serait inutile et vain). Mais se retrouver face à une réelle nouveauté n’est plus une chose à laquelle nos sens sont habitués…

S’attaquant cette fois-ci aux automatismes de pensée (tiens donc) et aux affres de la pensée unique sous ses multiples formes, qu’elle soit politique ou religieuse, Leprous aborde un sujet dense et complexe dégageant la noirceur physique et psychologique nécessaire pour coller à des compositions plus exigeantes, précises et sombres que jamais.
Nous avions laissé les norvégiens auréolés du succès critique et commercial (dans une dimension moindre) d’un "Coal" fantastique et poignant, ayant façonné une personnalité si forte que Leprous sortait définitivement du giron d’Ihsahn pour vivre seul sans qu’on puisse lui placarder une étiquette de prog expérimental « dans l’air du temps » comme cela avait pu être le cas après la sortie de l’excellent mais quelque peu impersonnel "Bilateral". Les musiciens, sous la houlette du fantasque et flamboyant vocaliste Einar Soldberg, se sont peu à peu émancipés de leurs influences pour devenir totalement indépendants et former l’entité artistique que nous connaissons aujourd’hui, en constant renouveau.
"Coal" était déjà difficile d’accès, merveilleux dans son approche lyrique et mélodique, aussi lumineux que crépusculaire, charnel que désincarné, beau que glaçant et portait en lui un talent inestimable, faisant de Leprous un groupe à part bien au-dessus des autres. Il ouvrait de nouvelles portes, en faisant un focus sur une partie très spécifique du groupe, la plus sombre et tourmentée, délaissant la vision extravagante et grandiose d’une musique édulcorée et plus démonstrative. "The Congregation", attendu de beaucoup, va dans une direction similaire à "Coal", tout en poussant à son paroxysme chacun des éléments en présence.

L’écoute de ce cinquième album se découpe en plusieurs phases. La découverte, difficile et abrupte. L’apprentissage, long et intrigant. Puis la compréhension, lumineuse et révélatrice. La voie est parsemée de ronces et de pièges mais l’aboutissement est si riche en enseignements qu’il faut, pour tous, se faire violence même si les premiers assauts semblent creux.
Car si nous attendions effectivement à une suite logique de Coal, le style graphique de l’artwork en étant une première preuve, il était peu probable que la difficulté d’accès se situerait si haut et que la première approche serait si éloignée de la réalité. "The Congregation" parait initialement bancal, les lignes vocales d’Einar apparaissent comme étranges, hors de la réalité. Les riffs sont si précis et millimétrés qu’ils semblent téléguidés, avec une totale absence de l’organisme de l’album précédent. Et puis tout est si sombre, sans jamais être violent, si froid et déprimant, qu’y faire sa place parait difficile. A cela s’ajoute des structures, des plans et des passages très techniques, parmi les plus techniques du groupes, et d’autres à l’inverses très intimistes et planants qui sèment le trouble et rendent difficile l’ingestion des compositions. Mais vient l’instant précieux où le voile se lève, le rideau se baisse et où la lumière devient.

Parler de chaque titre de cette véritable œuvre d’art serait long mais parait si indispensable. "The Flood" nous emmène par exemple sur des terres encore inexplorées, où Leprous flâne du côté de Matthew Bellamy (Muse) dans son introduction électronique où la voix enchanteresse d’Einar est au centre de tout. La tension est latente jusqu’à une explosion mélodique à couper le souffle, d’une beauté exceptionnelle sur laquelle se pose un riff de Tor et d’Oystein suffocant de lourdeur et de mécanisme, explorant les possibilités les plus noires de la huit-cordes pour un résultat purement aliénant. Quant au break presque pop aux multiples lignes de claviers, il découvre des centaines de détails toujours plus nombreux, particulièrement au niveau des parties de batterie d’un Baard Kolstad, nouvel arrivant chez Leprous, réalise le travail d’une vie, entre un touché pur et racé et l’équilibre d’une frappe entre puissance et légèreté. Son jeu, tel un alien, se mut constamment au service de la musique. Il est l’artisan principal de toute l’ambiance imprimée sur le terrifiant "Down", débutant sur un passage très technique et précis, saccadé, avant de marteler sur son tom basse une atmosphère oppressante et solennelle tout le long du morceau. Les moog d’Einar déploie une ambiance malsaine et lourde sur les couplets avant qu’un refrain une fois de plus flamboyant de lyrisme ne nous touche en plein cœur, s’envolant parmi les anges. Einar, dans sa voix, contient autant de beauté et d’espoir que d’épuisement et de mélancolie, en témoigne ces couplets où sa voix est seule avec la batterie et les lignes de claviers.

Comme c’était déjà le cas sur "Coal", "The Congregation" est un disque où les individualités s’effacent au profit de la musique pour former un ensemble, une entité cohérente et unie n’étant que pure émotion. Une émotion pouvant être déprimante comme celle de "Slave", qui si elle débute sur des claviers spatiaux, contient une lourdeur oppressante grâce une nouvelle fois à la noirceur des guitares qui, sous forme de nappes, tissent un climat lourd, froid et poisseux. Einar, toujours, porte par son charisme, un titre exceptionnel lacérant les sens et plongeant dans un profond désespoir, donnant la sensation de couler toujours plus profondément. Si pure au début du titre, sa voix se fait de plus en plus consistante, gagnant en colère et en intensité, malgré des mélodies similaires, pour ressentir une véritable montée en pression. Puis il y a ce riff, très pop dans l’âme mais brisant le titre en deux, pour sombrer dans la haine et le chaos. La basse se fait très lourde et Einar laisse sortir le démon qui est en lui, hurlant sa rage et son désespoir dans ce qui est probablement un one-shot tant on ressent sa sincérité et ses tripes déversées dans l’enregistrement (le norvégien étant un adepte de l’exercice).
Cette particularité devient évidente lors de la compréhension tout autant que les premières écoutes paraissent étrangement trop travaillées, dénuées de spontanéité alors qu’à bien y regarder, il y a de nombreux passages semblant proche de l’improvisation, du premier enregistrement et respirant une authenticité donnant une force incroyable aux titres. Il en est de même sur le second titre comportant du chant hurlé, le très progressif "Rewind", où Baard impressionne une fois encore pour la fluidité de son jeu. Ce titre tisse une toile avec le passé du groupe pour former un pont, un passage entre avant et aujourd’hui, comme pour mieux comprendre l’album. L’introduction rappelle sensiblement "The Valley" tandis que l’explosion, purement prog, avec claviers grandioses, ne serait pas sans évoquer un "Bilateral" qui se serait considérablement noirci. Les riffs sont d’une technicité démentielle sur la deuxième partie du morceau, qui se densifie de plus en plus avec l’intégration de plus en plus d’éléments (des lignes de guitares et de claviers notamment qui se chevauchent constamment) et surtout des hurlements d’Einar qui ouvre une porte chaotique sur la composition, comme un passage vers les cercles de l’enfer où l’âme humaine ne serait plus que tourments et damnation.

Si la dimension technique exceptionnelle du groupe n’est désormais plus au centre des débats, laissant de manière très intelligente une place prépondérante aux sensations et aux atmosphères, créés par et nous pour de la technique instrumentale, elle n’est néanmoins jamais éloignée d’un album très difficile à apprivoiser. "The Price", premier extrait, ouvre l’ensemble sur un riff mécanique mais alambiqué, loin d’être simple à exécuter. Les parties de batterie en arrière-plan respirent une sensation de légèreté proche du jazz (à l’instar d’un Cynic) et les lignes de basse (enregistré par le membre de session Simen Daniel Børven, le groupe n’ayant plus de bassiste officiel à l’heure actuelle) œuvrent parfaitement à l’ambiance feutrée et charnelle du titre. Les lignes vocales sous forme de nappes sonores se sont multipliées sur le disque et démontrent une réelle maturité d’Einar au chant qui ne se pose désormais plus de question et va exactement où il le souhaite, sans se soucier des scènes ou des genres. C’est flagrant sur le sensationnel "Moon" qui se veut soft et extrêmement mélodique sans jamais trahir à la musicalité de l’ensemble, sans sombrer une seconde dans la facilité. Leprous donne simplement plus d’importance à la basse et aux claviers sur ce titre, impérialement mis en orbite par un refrain lunaire (facile) et une délicieuse montée en puissance permettant aux guitares de complexifier l’ensemble sur la seconde partie d’un titre avoisinant là encore les sept minutes (la durée moyenne des morceaux de "The Congregation"). A l’exacte inverse, nous trouverons un "Third Law" chirurgical et d’une précision infinie démontrant la vision la plus expérimentale et étrange des norvégiens.

Il y aurait encore tant à dire. Mais le plus important, vous l’aurez probablement compris, est de vivre cet opus de Leprous. De le vivre de l’intérieur, de sentir ses entrailles se soulever, de sentir le voyage émotionnel se faire et de sentir que, si ce n’est pas rire ou pleurer, la musique que nous écoutons modifie tout au moins notre humeur du moment. "The Congregation" fait ouvrir les yeux, prendre conscience de la beauté de l’art et des émotions qui parsèment nos vies.
Il va bien au-delà d’un simple album de musique. C’est un fragment de vie, de sensations, d’humeurs qui évoqueront en chacun de nous des souvenirs différents et fera germer des futurs divergents. C’est une entité artistique complète, faisant partie de ces disques rare comme un artiste n’en fait parfois jamais. Leprous en a déjà créé deux et signe un nouvel opus une fois de plus radicalement différent de ses prédécesseurs pour monter encore un peu plus haut dans l’estime des fans.
Il y aurait encore tant à dire…mais une seule est une réalité commune : nous pouvons encore être surpris en 2015. Rien que pour cela : merci.

42 Commentaires

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alcajuar10 - 18 Juillet 2015:
Album exceptionnel pour un groupe exceptionnel . Aujourd'hui je suis resté 2 heures dans ma voiture en écoutant en ressentant des émotions très diverses sans avoir envie d' en ressortir ni de faire autres choses. On voudrais partager ces sensations mais est-ce possible ? Depuis toutes ces années à entendre et disséquer, je ne pense pas avoir jamais ressentis ce que ce dernier Leprous me fait ressentir. Bravo et merci Leprous
David_Bordg - 02 Août 2015: Mon number one toujours de l année!
Lesterial - 12 Fevrier 2016: Je ne connaissais ce groupe que de nom sans jamais avoir été vraiment écouter un titre, mais là !!! c'est la grande claque, je rentre complètement dans l'univers de Leprous avec cet album que je n'arrête pas d'écouter. je suis bluffé, en bon vieux metallleux je ne pensais pas être encore surpris à ce point par un groupe ... franchement ... respect. et puis ce chanteur ... quelle voix !!! alors que je suis plutôt fan de death suédois des années 90, c'est pour dire. magnifique chronique au passage.
mayhem13 - 09 Fevrier 2017: je les ai découvert en ouverture de devin townsend, mon dieu c'est quoi cet ovni!?
très déroutant aux premières notes, les structures des mélodies et des morceaux sont déroutantes, mais une fois l'album écouté en entier, on s'y remet volontiers, et boum, la claque! c'est très touchant comme musique.
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