Amorphis, c’est trois albums qui posèrent les bases d’un death metal progressif-mélodique innovant, aux ambiances folk bien ancrées, et qui trouva son apogée avec le sublime «
Tales from the Thousand Lakes » (même si «
Elegy », qui suivra deux années plus tard, est une franche réussite lui aussi). Les trois albums qui suivirent quittèrent les terres sombres du death metal pour mieux développer les côtés folk et jazzy/psychédéliques/expérimentaux du groupe. Mais death metal ou non, le talent du groupe restait intact, à l’exception peut-être du petit dernier : «
Far from the Sun ». Tout ceci pour simplement aviser celui qui aimerait s’aventurer dans les contrées finlandaises propres à
Amorphis que chaque album – ou plutôt chaque « ère » – du groupe ne ressemble à nul(le) autre, et que, selon ce qui vous plaît le plus chez
Amorphis, vous aimerez plutôt un album ou un autre.
Mais seulement voilà, l’avenir du groupe semblait bien compromis avec le départ du chanteur Pasi Koskinen et les deux derniers albums qui rencontrèrent un succès mitigé. En effet, trop influencés par le rock psychédélique des 70's pour plaire au public de « gros bourrins aux cheveux longs » qui était tombé amoureux du groupe sur «
Tales from the Thousand Lakes ». Et si la plupart de leurs albums restaient de franches réussites, «
Far from the Sun » manquait vraiment de panache et « d’envie ». On sentait donc un groupe au bout du rouleau et on se demandait franchement comment ils allaient s’en sortir.
Du coup, où en est-on avec «
Eclipse » ? Hé bien, après une longue recherche pour trouver un remplaçant à Pasi Koskinen – et qui a bien failli déboucher sur un album instrumental –
Amorphis recrute un certain Tomi Joutsen. (Presque) parfait inconnu de la scène metal, on pouvait vraiment se demander sur quoi cela allait déboucher.
Il s’avère que Tomi était un grand fan d’
Amorphis et il proposa ainsi plusieurs retours aux sources, qui se ressentent sur «
Eclipse ». Ainsi, la dualité chant clair/ growl, qui avait complètement disparu avec Pasi, refait (gentiment) surface. Les textes reviennent, comme à l’origine (Karelian et Tales), sur la mythologie finlandaise et sa fabuleuse littérature. Ainsi, «
Eclipse » raconte l’histoire de Kullervo, « héros tragique de l'épopée nationale le
Kalevala. Maltraité dès l'enfance, il devient un homme sans foi ni loi, ignorant et violent. Ayant violé celle qu'il découvre être sa sœur, il finit par se suicider avec son épée » pour reprendre les mots de Wikipedia.
Mais «
Eclipse » est loin d’être un simple retour aux sources. Il incorpore un passé retrouvé (le côté death, les textes), qui viendra s’ajouter aux nombreux bagages cumulés ou développés par les derniers albums : le folk plus développé sur «
Elegy » et «
Tuonela », et le psychédélisme et les expérimentations (qui vont de pair avec l’arrivée de Sakari Kukko au sein du groupe) de «
Am Universum ».
Enfin, signalons tout de même que Tomi Joutsen est loin, très loin, du chant de Pasi Koskinen (à comprendre de manière élogieuse). Non seulement il dispose d’un growl puissant mais il est aussi capable de beaucoup de finesse et d’émotion. Totalement à l’aise, il passe aisément d’un type de chant à un autre (bluffant sur «
The Smoke »), et pour vous dire la vérité, je suis bien heureux du changement de chanteur. Bien qu’il n’ait pas contribué à l’écriture de l’album, qui n’attendait que de trouver un chanteur pour sortir, son influence reste considérable sur «
Eclipse ».
Ainsi, on a droit a de véritables pépites, provenant d’influences en tout genres et des apports de chaque membre et ex-membre du groupe, qui ont chacun contribué à faire d’
Amorphis ce qu'il est à ce jour. «
Perkele (The
God Of
Fire) » ou «
The Smoke » en sont de bons exemples : ils sont folk, progressifs, death et psychédéliques par moments. Le clavier occupe une place très importante dans beaucoup de morceaux. C’est un constat qui ne fera que se confirmer au fil des albums. Toutefois, il n’occupe pas toujours le même rôle : très jazzy dans « Same
Flesh » (qui est du genre à vous rappeler les expérimentations de «
Am Universum ») mais beaucoup plus ambiancé dans «
The Smoke ». Le folk, qui avait presque disparu sur le dernier album du groupe, « bouffé par le côté rock/psyché», refait gentiment surface sur « Brother
Moon » ou « Leaves Scar », mais concrètement il s’agit du grand absent de ce disque. Effectivement, «
Eclipse » est encore bien marqué par la patte «
Am Universum –
Far From Sun », plus rock et moins folk que leurs premières productions. Cependant, rassurez-vous, cet aspect du groupe refera surface de plus belle manière sur l’album suivant. Pour l’instant, il n’est vraiment présent que par petites touches de clavier, quelques riffs et surtout les textes.
Je peux bien vous raconter tout ce que vous voulez, c’est très difficile à expliquer ce que l’on ressent à l’écoute de cet album. Une chose reste sûre tout de même : il est très bon, bien meilleur que son prédécesseur. Personnellement, il reste l’un des albums qui me plaît le moins dans « l’ère Joutsen » car il est plutôt avare en ce qui concerne le côté folk/progressif du groupe, que je trouve bien plus développé dans «
Silent Waters » ou «
The Beginning of Times ». Sans parler du fait que le son de l’album est encore très rock.
«
Eclipse », c’est donc et surtout le retour triomphal d’un groupe qui semblait en difficulté. Il comporte ainsi d’indéniables qualités, tant au niveau de la production (enfin ! Merci
Nuclear Blast !) que dans son écriture (la plupart des morceaux ne font que 3 à 4 minutes, composés avec génie), ou encore cette sublime pochette qui illustre parfaitement la beauté qu’un tel album recèle.
@FBD5367: Et juste après : "(même si « Elegy », qui suivra deux années plus tard, est une franche réussite lui aussi)."
C'était peut-être formulé de manière un peu maladroite, mais c'était pour dire que l'apogée du death metal à la Amorphis pour moi c'est plutôt "Tales" que "Elegy"
Sinon, je me suis réécouté Eclipse, Silent Waters et les deux derniers d'une traite. Du coup ça fait un peu comme si j'avais écouté un seul et très long album. La recette est toujours la même (mais ce n'est pas le seul groupe à pondre des albums quasi identiques). En même temps, c'est leur style et je ne dis pas ça en terme de reproche !
De toute façon je vais tous les réécouter car je pense chroniquer les albums qui n'ont pas encore eu cet honneur...et qui le méritent.
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