On reproche parfois à certains styles de vivre dans un certain immobilisme, à d'autres de ne survivre que par ses illustres représentants ou encore à d'autres d'être totalement refermés sur eux-mêmes.
Le power metal est un peu de ceux là. Après un passage à vide, le genre avait bien retrouvé des couleurs à l'orée des années 2000 et de multiples représentants, surtout allemands et scandinaves (les
Edguy,
Hammerfall,
Sonata Arctica et consorts) tandis que de multiples groupes cherchaient à trouver la formule magique de ces groupes qui cartonnaient. Néanmoins, l'explosion d'un metal plus moderne, le classicisme exacerbé du genre et la défection de certains groupes (
Hammerfall et ses albums identiques,
Edguy et son split qui n'en ait pas vraiment un, Sonata qui se perd, Strato qui a eu du mal à remonter la pente et est devenu plus commun, un
Rhapsody qui n'a plus grand chose à dire, les
Iron Fire ou
Primal Fear qui se répètent inlassablement) n'a pas vraiment aidé, seuls certains jeunes combos sortant de ce marasme, parfois avec une nouvelle magique pourtant pas exempts de défauts (pensons à
Sabaton ou
Powerwolf qui répètent à l'envie une partition connue de tous mais récoltent tous les suffrages).
Dans ce cadre,
Bloodbound aura eu de multiples vies. Après trois premiers opus typiques de la veine allemande, les suédois avaient tout pour devenir les nouveaux
Edguy, avec un metal mélodique, un brin moderne, aux refrains imparables et à la production en béton (citons
Tabula Rasa, quasiment parfait dans le genre). Les frères Olsson (guitares) ont cependant subi plusieurs départs de personnel et si Patrick
Johansson a stabilisé le line up, le groupe a bien changé ensuite. "
In the Name of Metal" et "Stormblood", deux opus excellents, se séparaient de cette vibe speed allemande à la
Helloween pour puiser dans la NWOBHM (Judas en ligne de mire) avec un heavy bien plus viril, des vocaux transperçant et un côté très hymnique, parfois clichesque mais hautement maitrisé et imparable (l'opus 2014, dans le genre, est un maitre album). Les deux suivants, la saga
Dragon (comme on peut l'appeler), quittaient cet univers pour ajouter un max de claviers, de gros chœurs guerriers et ainsi aller très logiquement vers du
Sabaton ou du
Hammerfall, voir du Manower.
Bloodbound boufferait-il à tout les rateliers ? C'est bien connu et c'est peut-être pour ça que le combo n'a pas décoller plus que son succès d'estime, lui manquant une personnalité propre ...
"
Creatures of the Dark Realm", sans changer forcément de crédo, mixe un peu plus les deux précédents opus avec ce qui avait fait la qualité des autres opus avec "
Pata" au chant, revenant même parfois à un metal plus mélodique et presque symphonique. Un "
Ever Burning Flame" évoque instantanément
Freedom Call sur son intro, pendant que les arrangements et les transitions semblent héritées du
Nightwish de "
Dark Passion Play". Les vocalises se font plus mélodiques, moins hurlées (nous savons tous désormais quel redoutable chanteur est Patrick) et collent parfaitement à une double pédale omniprésente symptomatique d'un happy metal si difficile à créer sans être totalement ridicule (la bande à Chris Bay, spécialiste, tombe d'ailleurs totalement dans cet écueil désormais).
Le title track et ses nappes de claviers ramènent toujours vers
Nightwish mais avec ce soupçon d'un
Sabaton qui serait chanté étonnamment comme ... Urban
Breed ! Et que dire de ce refrain ? Simplement qu'on a envie de headbanger et de le chanter avec le groupe ! Idem pour le redouble speed "The Gargoyles
Gate" et son cri initial qui nous ramènerait presque sur le "
Babylon" de qui-vous-savez (et cette partie solo !) ! Il en va de même pour le très heavy "
Eyes Come Alive" ou l'hymne "
When Fate Is Calling" clairement taillé pour le live, laissant ressurgir quelques claviers (très) sensiblement folk sans pour autant pétarader comme ce fut le cas sur "
Rise of the Dragon Empire". On pourrait presque voir cet album comme un résumé des différentes périodes tant les titres s'enchainent, certes avec cohérence mais aussi beaucoup de variété ("Gathering of Souls" et ses gros chœurs, "Face of
Evil" et ses mélodies qu'on aurait pu trouver dans "
Nosferatu"). "
The Wicked and the Weak" parait plus proche des opus récents, avec ce côté galopant et guerrier, plus épique dirons certains.
En soi, "
Creatures of the Dark Realm" est clairement plus abouti que ses deux prédécesseurs, différent d'un "
Nosferatu" ou "
Tabula Rasa" (qui étaient, à l'époque, les disques d'un groupe espoir, avec la jeunesse et le côté intrépide qui va avec) et moins radicalement heavy qu'un "Stormblood". On notera aussi une production très puissante, toujours au Black Lounge Studio mais bien plus équilibrée que sur le précédent qui plaçaient les claviers et la batterie bien trop en avant, au détriment des guitares. Un disque en forme de résumé de carrière, à même de ravir tous les amoureux de power speed mélodique car, il faut bien le dire, les représentants en activité à ce niveau sont aujourd'hui bien rares. Keep the
Flame Alive.
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