Le "death-metal" français connut une période faste au début des années 90 avec notamment,
Massacra et son terrible "Enjoy the Violence",
Crusher avec "
Corporal Punishment" et
Loudblast. Considéré par beaucoup comme les "darons" du "death" français, le combo lillois ouvrit les portes vers l'international à toute cette scène de l'époque, en accouchant de trois premiers méfaits énormissimes dont le monstrueux "
Disincarnate" et le référentiel "
Sublime Dementia", auxquels nous pouvons ajouter le Ep "
Cross the Threshold" dont le morceau "No Tears to Share" est sans doute, le meilleur titre de toute la discographie du groupe. De ces trois groupes précités, seul
Loudblast a survécu à la dure réalité temporelle, puisque
Crusher explosa en vol et
Massacra a dû splitter, suite au décès de Fred Duval.
Contrairement à
Gojira, bien plus jeune et devenu une véritable référence au niveau mondial,
Loudblast a perdu beaucoup de temps en route, d’abord à la suite du controversé "
Fragments", qui vit le groupe ralentir le tempo, puis, la séparation en 1999 (avant de se reformer en 2000 suite à un concert en hommage à Chuck Schuldiner) et enfin, avec la publication du plus que moyen "
Planet Pandemonium". Cependant,
Loudblast redressera la barre avec la sortie de "
Frozen Moments Between Life and Death", pas révolutionnaire, mais plutôt bien accueilli par la critique et les fans du groupe, présentant par la même occasion, son nouveau guitariste, Darkhian. Trois années se sont écoulées avant que
Loudblast ne se décide de balancer à la face du monde, sa dernière offrande, intitulée "
Burial Ground".
En préambule, il est à noter que la sortie de cet opus fut annoncée, il y a presque un an. Les "Louds" ont dû chercher un nouveau label après la fermeture de
XIII bis et ont finalement trouvé refuge chez Listenable records. Puis, comme un malheur n'arrive jamais seul, Marianne "Lsk" Séjourné, bassiste de
Vorkreist, en charge des textes de l'album, a été retrouvé pendue à son domicile, le groupe demanda alors à Heimoth, guitariste de
Seth, de les aider à reprendre le flambeau.
L'artwork, signé
Will Kuberski, est très sombre. Celui-ci représente un visage démoniaque, avec une langue de serpent et, dotée des cornes du "
Baphomet". Il détonne complètement avec la tradition "
Loudblastienne", plus habituée à des pochettes plutôt "soignées" ("
Cross the Threshold" en est le parfait exemple), souvent inspirées de fresques ou de gravures. Nous ne le savons pas encore, mais l'artwork annonce les prémices de ce qui va arriver.
Le skeud s'ouvre sur "A Bloody
Oath" et sa courte introduction acoustique. Ce morceau, plutôt mid-tempo, annonce la couleur et plante littéralement le décor. Le titre est bien plus obscur que ce que le groupe à l'habitude de nous proposer, l'ambiance est très malsaine, voire poisseuse, une influence "black-metal", inédite jusqu'à présent chez
Loudblast, interpelle immédiatement, et cela va être le maître mot de "
Burial Ground".
L'influence "black" est présente dans tous les recoins de cet album, souvent sous forme de riffs dissonants comme sur le premier morceau "A Bloody
Oath", mais aussi sur "Shooting Torments", "Ascending Straight in
Circles" ou sur "I Reach the Sun", et, également avec des riffs très noirs et puissants comme "The
Path", "
Abstract God" ou encore "A Bloody
Oath". La coloration très obscure de "
Burial Ground" émane aussi de gros breaks lourds qui parsèment la galette comme sur "Ascending Straight in
Circles", "
Darkness Will Abide", "I Reach the Sun" ou encore sur "
The Void" et sa cassure rythmique proche du "doom", ainsi que par la mise en place fortement réussie d'ambiance dérangeante, âpre et glauque ("The
Path", "Shooting Torments", "
The Void" ou "From Dried
Bones").
Malgré la lourdeur ambiante,
Loudblast parvient à nous surprendre sur quelques accélérations bien senties comme sur "A Bloody
Oath", "Ascending Straight in
Circles" et sa seconde moitié dotée d’un riff très entraînant et, également, "Shooting Torments" ou "
The Void". Mais le joyau de "
Burial Groud" se trouve en sa toute fin, avec la composition "The
Path" qui clôture et verrouille la porte des ténèbres dans lesquelles nous sommes tombés et resterons définitivement enfermés. Ce morceau est la parfaite synthèse du
Loudblast nouveau, cuvée 2014, où rythmiques lourdes, dissonances "black", parties quasiment incantatoires, accélérations jouissives, solos lumineux, se retrouvent pour un final en apothéose. Ce titre deviendra assurément un futur classique et se hisse d’ores et déjà parmi les meilleures compositions de toute la discographie du groupe.
La performance du seul membre originel et leader de
Loudblast, Stéphane Buriez, est à l’avenant, il surprend par son growl beaucoup plus gras et caverneux qu’autrefois, mais également dans les parties vocales susurrées ou incantatoires, qui renforcent la noirceur de l’ensemble. Mais que dire de Darkhian, qui est sans doute à l’origine (avec Alex Lenormand) de la coloration "black" de "
Burial Ground", puisqu'il a officié chez
Black Dementia et
Fornication. Le bougre décoche des solos tous plus inspirés les uns que les autres, il suffit de jeter une oreille à "Shooting Torments", "
The Void", "I Reach the Sun" ou le final épique de "The
Path", pour vous en convaincre. Hervé Coquerel, l’autre "ancien" du groupe, est également au diapason et, enchaîne les alternances rythmiques comme au bon vieux temps sans sourciller et sans aucune faiblesse, le tout soutenu par la basse très présente d’Alex Lenormand (introduction de "
The Void" ou le break de "A Bloody
Oath").
Ayant goûté aux producteurs internationaux avec Scott Burns ou, plus récemment, Peter Tätgren sur "
Frozen Moments Between Life and Death",
Loudblast a décidé de ne pas s’expatrier pour «
Burial Ground » et, s’est alloué les services de Francis Caste, responsable du son de
Bukowski, Otargo,
Necrophobic ou encore
Svart Crown. Le résultat est à la hauteur et colle complètement aux propos du groupe. le mixage laisse une place de choix à chaque membre du combo, tous les instruments sont parfaitement audibles, la "chaleur" de la caisse claire, typique de ses productions, est également bien présente, renforçant ainsi, le côté massif de la batterie.
Au final, pas grand-chose à jeter sur ce dernier
Loudblast, qui nécessite toutefois, plusieurs écoutes pour pouvoir bien l’appréhender. Il surprendra assurément par son côté obscure "black-metal" inédit et fort prononcé, ainsi que son atmosphère oppressante, âpre et délétère, prouvant que
Loudblast et ses 30 ans de carrière, continue de vouloir évoluer et, éviter ainsi de devenir une parodie de lui-même. Tout comme votre serviteur, vous oserez la comparaison avec ses chef d’œuvres d'antan que sont "
Disincarnate" ou "
Sublime Dementia" (ainsi que "
Cross the Threshold" et "
Sensorial Treatment" selon moi…) mais c’est peine perdue, car "
Burial Ground" ne ressemble à aucune autre des productions du groupe, mais une chose est sûre,
Loudblast n’a pas publié un opus d’une telle stature depuis vingt et un an. "
Burial Ground", au patronyme fort approprié, ouvre de nouveaux horizons aux "Louds", que nous attendons de pied ferme à la prochaine édition du Hellfest, pour un set qui s’annonce explosif.
J'ai souvenir d'un concert avec le Loudblast de 95, où Mr Buriez se vantait de faire de la mélodie sans brutalité, et là quelle surprise!!!
Je pense qu'il a changé d'avis.
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