Tout est là. C’était il y a plus de vingt ans, une éternité. Eternel, c’est sans doute de cela dont il s’agit. Hors du temps aussi, à une époque où le thrash metal était au firmament, où le death metal sortait de l’état embryonnaire.
Quorthon, lui, au tréfonds de sa tannière scandinave, faisait fi de tout cela. En moins de trois ans, il venait déjà de vomir le troisième volet du black metal le plus pur, le plus profond, le plus cru.
Under the Sign of the Black Mark est un aboutissement, un accomplissement.
Bathory ne contribuera plus jamais au metal noir comme il le fait sur ce monument qui, par conséquent, n’a pas à justifier le culte qui lui incombe.
Prétendre décrire ce disque revient à se lancer dans une longue profession de foi dédiée au black metal, au travers d’une litanie des repères musicaux inhérents au style, qui cependant ne comptent jamais autant que la haine glaciale et viscérale émanant de l’œuvre.
Tout est là.
Les riffs bipolaires dont le rendu enivre, effraie, terrifie…cette guitare au son d’acier trempé, au bleu reluisant, tranchant et froid, la preuve qu’une production médiocre peut générer des atmosphères miraculeuses.
La voix, criarde et gutturale, inhumaine au possible, possédée par on ne sait quelle force obscure et malsaine. La colère acérée qui assène les coups à chaque hurlement.
La rythmique, alternant les envolées échevelées où double pédale et frappes implacables déversent des torrents furieux d’impacts et de roulements dévastateurs.
Les touches de claviers, jamais omnipotentes, toujours subtiles, atrocement glacées, esquissant les contours d’un univers démoniaque et décharné, non dénué d’un mysticisme angoissant.
Tout est là.
Le résultat sublime, la démonstration éclatante de l’essence du black metal : la mise en musique de ces composantes pour générer l’essentiel, une atmosphère d’une richesse émotionnelle sans commune mesure avec tout ce qui a été créé jusque là, de par sa noirceur la plus abyssale, au travers de sa froideur maléfique qui traverse les chairs et les âmes.
La richesse artistique aussi, des actes les plus furieux de colère destructrice, atteignant une virulence peu commune (
Massacre, Of
Doom) ; les approches plus posées non moins impressionnantes par l’ambiance haineuse et la grandeur mortuaire qui s’en dégagent (Call From The Grave, Enter
The Eternal Fire). Comment isoler quelques titres quand l’écoute complète de l’œuvre se doit d’être, tel un sacerdoce?
Oui, tout est là.
La forme aboutie et définitive du cœur de la Bête, du black metal, dans ce qu’il a de plus profond et de plus grand.
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