L'avantage avec des artistes aussi traditionalistes, obstinés et intègres que le guitariste, chanteur, auteur, compositeur, producteur, maître du monde, détenteur de la vérité universelle et lumière des peuples Piet Sielck, réside dans le fait qu'un nouvel opus de son
Iron Savior, pour peu qu'il ne soit pas perclus d'horribles tares inadmissibles (ce qui, soyons honnête, arrive assez rarement pour ne pas dire jamais), apporte toujours son quota de satisfactions. Le revers de cette étincelante médaille est, quant à lui, un peu plus terne puisque ce caractère et cette vision artistique singulière (symptomatiquement allemande) excluent, peu ou prou, toutes formes d'audaces et cantonne ce collectif dans un carcan où le changement profond n'est qu'un concept vague. En d'autres termes, avec
Iron Savior, le plaisir est envisageable, la surprise moins.
Mais revenons à ce
Rise of the Hero, neuvième album de ces Saxons qui sort en cette année 2014. Dans la continuité immédiate de son prédécesseur,
The Landing, ce disque poursuit sur cette voie d'une musicalité un peu (et insistons sur le "un peu") différente de celle de ces temps antiques où
Iron Savior aimait à s'exprimer dans une agressivité primaire loin de toutes concessions. Et ce même si, bien évidemment, eu égard à la voix particulièrement caractéristique de son vocaliste et aux riffs singulièrement distincts de ses guitaristes, le quatuor originaire de Hambourg n'a rien perdu de cette âpreté propre aux Heavy Speed
Metal typiquement Germains qu'il aime tant à défendre. Il s'applique simplement, désormais, à peaufiner davantage l'aspect mélodique de certains passages qu'il enfante (notamment les refrains). Des chansons telles que les vifs From
Far Beyond Time,
Thunder from the Mountains ou encore tel que
Revenge of the
Bride en sont d'ailleurs de parfaits exemples.
Parlons aussi de The
Demon qui, quant à lui, est un peu différent. Avec ces détours intimistes où l'interprétation de Piet se fait plus nuancé, ce titre très réussi nous évoque parfois les méandres d'un
Beyond the Realms of Death des Britanniques de
Judas Priest (Stained Class (1978)).
En revanche on ne pourra que s'interroger sur l'intérêt d'un morceau tel que Dance with Somebody. Cette reprise initialement parue sur le cinquième album du groupe de Rock suédois Mando Diao (Give Me
Fire (2009)), contraste, en effet, bien trop avec la consistance et la rugosité ambiante du reste de cet opus. Non pas qu'il soit de nature à permettre aux détracteurs du quatuor de déverser une haineuse vindicte sur ce nouvel ouvrage, loin s'en faut, mais il laisse tout de même l'auditeur dans une expectative gênante. Pourquoi un tel morceau?
Ce désagrément sera d'autant plus regrettable que le traditionalisme convenu de certaines des autres pistes de ce manifeste ne parviendra pas vraiment à endiguer ce sentiment. Et ainsi des chansons telles que Last Hero, dont on relève sans peine la parenté avec
Primal Fear (notamment dans son entame) ou encore Iron
Warrior (malgré un remarquable solo de guitare) et Fistraiser ressemble à s'y méprendre à ce que ce collectif nous aura déjà offert autrefois.
De plus, très caractéristique de ces travaux les plus emblématiques, il est difficile de ne pas voir dans la pochette de ce nouvel effort la paternité du Colombien Felipe Machado Franco. Une fois encore nul ne pourra véritablement dénigrer les qualités de cette illustration tant elle apparaît esthétiquement irréprochable. Toutefois, comme un certain nombre d'autres, votre humble serviteur ne pourra s'empêcher d'émettre une objection à son encontre. Notamment sur ces couleurs qu'elles partagent avec tant d'autres œuvres du créatif et sur l'aspect un peu trop artificiel qui s'en dégage. Tant et si bien d'ailleurs que ce prisme installe une sorte de conservatisme qui, parfois, finit par ne plus nous permettre de distinguer un ouvrage du maître d'un autre. Qui se souvient, en effet, des détails de l'artwork de l'album précédent d'
Iron Savior? De ceux des derniers
Galderia ou
Stormwarrior?
D'ailleurs, pour conclure sur le chapitre des tares de ce disque, ne serait-il pas temps que Thomas Nack et ses comparses amorcent une réflexion profonde et une remise en question salutaire? Combien de temps encore parviendront-t-ils à se complaire dans une expression aussi peu évolutive?
Quoi qu'il en soit, au-delà de ces digressions futiles, ce
Rise of the Hero laisse donc à votre humble serviteur un goût doux-amer. Peu de défauts lui sont imputables si ce n'est ce conservatisme un peu usant et cette inspiration un peu déclinante nous offrant les automatismes classiques et habituels d'un
Iron Savior immuable. Cependant, dans le même temps, il apparaît difficile de ne pas reconnaître, toujours encore, les qualités de ce Heavy Speed
Metal redoutablement maîtrisé.
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