Un poids lourd de la scène française au gout d’inachevé.
Encore une fois, constante fatalement rébarbative, dont on espère qu’elle ne deviendra pas comptine,
Dagoba ne parvient pas à transformer convenablement l’essai. Après un "Poséidon" catastrophique, qui faisait suite au génial et surpuissant "
What Hell Is About" et au plus créatif "
Face the Colossus", "
Post Mortem Nihil Est" remonte certes le niveau de plusieurs crans (heureusement) mais ne convainc pas totalement un auditeur qui, avons-le, est peut-être peu partial avec les marseillais.
Pourquoi ? Peut-être parce que, simplement, la bande à Shawter commence à tourner en rond…
Le principal défaut de Poséidon était la production famélique et anorexique qu’avait concoctée Dave Chang, à des années lumières de la brutalité et de l’incroyable masse sonore de Tue Madsen. Inévitablement, les marseillais ont changé leur fusil d’épaule sur "
Post Mortem Nihil Est" et ont enregistré l’album eux-même, pour le mixer et le masteriser à
Los Angeles, chez Logan Mader en personne. Le style de
Dagoba, brut et relativement simple dans ses structures (si l’on excepte les nombreuses nappes de claviers et orchestrations) convient parfaitement à Mader, à qui on peut en revanche reprocher un manque de personnalité relatif qu’il donne au son des groupes qu’il produit. Cela ne rate pas avec
Dagoba puisque si l’album se pare d’une production en béton, elle reste néanmoins moins personnelle et percutante que celle de Tue Madsen, étant plus chaude et ronde, peut-être même un peu moins incisive mais très « grosse ». On ajoute à cela le travail graphique d’un
Seth Siro
Anton très en vogue, qui a cependant réalisé un boulot incroyable et sortant de ses propres sentiers battus, et on tient entre les mains un opus où le groupe a mis le paquet pour qu’il soit le plus « bankable » possible ! Sur ce point, aucun soucis. Sur la réussite artistique, elle n’est pas totale.
Le chanteur, quasi compositeur intégral désormais, avait laissé entendre que l’album révèlerait la face la plus violente du groupe. Partiellement vrai puisqu’on trouve parmi les titres les plus mélodiques de
Dagoba et surtout un chant clair à foison que Shawter maitrise certes de mieux en mieux, mais qu’il colle malheureusement un peu trop systématiquement sur les refrains. Les structures restent fidèles à
Dagoba, en se basant sur des riffs très rentre-dedans, beaucoup d’arrangements mécaniques ou symphoniques et avant tout le jeu ultime de Franky Costanza qui se montre une fois de plus absolument irréprochable derrière sa batterie. Il suffit de prendre le premier titre dévoilé, "I, Reptile", pour comprendre que le marseillais a encore évolué à l’échelon supérieur sur la densité de son jeu et surtout la force de frappe qu’il obtient. Très violent et extrême, le titre dévoile justement la face sombre que l’on attendait du groupe, avec son refrain sans concession surmonté d’un blast beat atomique et surtout d’un riff simple mais capable de retourner une foule en moins de trois secondes. Beaucoup plus sombre et négatif, le timbre de Shawter gagne énormément en profondeur et surtout en agressivité afin de propulser la composition sur orbite. Les riffs de Z, déjà écrit lorsqu’il a rejoint les groupes, ne changent pas énormément du jeu d’Izakar et la différence est réellement moindre lorsque l’on compare les deux.
Au rayon des titres les plus efficaces et brutaux, "The Great Wonder" est également une grande réussite puisqu’il parvient à fusionner une intensité quasi néo-metal à la manière d’un Spliknot tout en proposant cette fois des parties en chant clair intelligentes et complètement à leur place, sans paraitre de trop ou juste simplistes. "When
Winter…" se veut dans une veine similaire, grâce à une ouverture dramatique très réussie et une intensité des riffs et du chant mettant immédiatement l’auditeur face à un mur de son (putain ce jeu de Franky est à tomber !). Fouillé et agressif, le titre colle ce genre d’uppercut que l’on a envie d’entendre sur la durée complète de l’album. Non pas que
Dagoba n’ait pas le droit de se montrer mélodique, ou qu’il soit mauvais dans l’exercice, mais la tournure trop systématique digne d’un pilotage automatique est décevante et ne peut que faire remonter le souvenir du décrié mais pourtant si réussi "
Face the Colossus", qui parvenait à manier la mélodie et les émotions avec infiniment plus de classe et d’intensité. Car à l’écoute de "Yes, We
Die", au riff des plus bateaux et au chant clair constellé d’effets au vocodeur déjà entendu des millions de fois, on ne peut que douter du fond de la démarche. Encore une fois, le résultat n’est pas foncièrement mauvais mais tellement impersonnel et immobile qu’il en devient dépriment, à l’instar des vocaux qui se désincarnent de toutes émotions et de toute rage. Le syndrome est identique sur "Son of a
Ghost", entre vocaux saturés à outrance et refrain mélodique aussi banal que possible, qui pourrait être composé par tant de monde que
Dagoba se devrait de proposer quelque chose de simplement plus propre, plus intelligent, plus créatif. "
Kiss Me
Kraken" se reprend sur des riffs bien plus techniques et techniques mais encore une fois, les échanges vocaux se devinent à des kilomètres. Là où
Machine Head parvient à surprendre ou simplement à livrer des moments de grande poésie,
Dagoba court justement parfois à vide, dans le néant.
Néanmoins, des instants comme l’intermède "Nevada", à l’ambiance western inédite mais très forte en émotion, permet une respiration bienvenue et d’entre quelque chose que ces riffs mécaniques qui, après cinq albums, mériteraient de se bonifier. De se bonifier comme sur "Oblivion is for the Living", lui aussi bien plus violent, mais permettant au groupe d’imposer un rendu plus apocalyptique, tout simplement différent, avec un refrain en chant clair vraiment surprenant, presque angélique.
Quelque chose de différent. C’est aussi ça que l’on attend d’un groupe qui s’impose dans le temps et prend de plus en plus d’ampleur. Car l’impression d’entendre, à peu de variations près (si l’on excepte la qualité sonore), des albums se ressemblant de manière trop flagrante, est malheureusement dominante après moult écoutes de "
Post Mortem Nihil Est". Peu de variations avec le style que l’on connait des marseillais, trop de plans répétés, trop de gimmicks commençant à lasser. Il manque cette étincelle, inéluctablement, afin que
Dagoba passe définitivement du côté des grands et non des très sérieux outsiders. Car non,
Dagoba n’est pas encore un grand groupe. Le temps passe, et les mêmes espoirs s’avèrent gâcher pour des raisons identiques. L’espoir semble permis, mais la cause difficile à atteindre…
Je n'ai pas encore d'avis à donner
sur cet album, ni de note.
Mais je reste dubitatif sur le chant...
Et je retournerai plus facilement écouter Poséidon, je pense!
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