Ozzy est un survivant, un miraculé même. «
Immortal » chante -t- il dès le deuxième morceau. Et on le croirait presque ! Au point que cet adjectif aurait été bien plus pertinent comme intitulé que ce bien énigmatique
Patient Number 9. Mais qu’importe.
Il faut dire que l’une des clés, pour saisir la chance inouïe qu’il aura eu de rester en vie et de continuer a surnager au-dessus de la mêlée durant toutes ces années, est a mettre à l’actif de sa Manageuse de femme, l’intraitable Sharon (charogne) Osbourne. N’en déplaise à certains, sans sa ténacité, et au-delà de ses méthodes déloyales pour se remplir les poches sur le dos des musiciens (et de sa marionnette de mari), l’ancien chanteur de
Black Sabbath aurait sombré corps et âme dans les abîmes de l’oubli. Le monde du Rock, ou plus généralement de la musique, étant ce qu’il est : Cruel et souvent dégueulasse.
Cela étant dit, voici donc que paraît en 2022, un demi siècle après ses débuts, le douzième album studio de l’une des dernières vraies icônes du Heavy
Metal.
Les nouvelles sur son état de santé de ses dernières années n’augurant rien de bien fameux, j’avoue avoir été cueilli par la solidité d’un tel album. Ozzy s’y montrant très en verve et particulièrement en voix. C’est bien simple, depuis
Ozzmosis (1995), le Prince des ténèbres ne m’était rarement apparu aussi investi dans sa façon de chanter.
L’autre point commun avec
Ozzmosis est sa couleur musicale. Il n’y a qu’à écouter « One of Those Days » ou «
Nothing Feels Right » pour s’en convaincre. Enfin,
Patient Number 9 n’est pas construit non plus sur de gros riffs, comme il est de coutume dans le Heavy
Metal. En revanche, là ou
Ozzmosis pêchait par une trop systématique linéarité dans ses tempos (lents),
Patient Number 9 offre durant 1 heure une bien plus grande variété de tempos. Ce qui rend d’emblée son écoute autrement plus tonique et attractive.
Accompagné d’un nombre impressionnant d’invités, il est toutefois dommage que le guitariste de
Led Zeppelin n’ait pas souhaité se joindre à une telle réunion. Voilà qui aurait permis de retrouver l’ensemble des guitaristes issus des Yardbirds. Jimmy Page nous privant donc d’un événement qui aurait pu être gravé à tout jamais dans l’histoire. Et puis comment s’imaginer que, quelques mois plus tard, l’immense Jeff Beck s’en irait aussi subitement ? En guise de testament, l’homme y délivre 2 titres, dont la magnifique ballade « A Thousand
Shade » qui porte indubitablement son seau.
Au registre des autres guitaristes marquants, l’intervention pleine de feeling de Josh Homme (
Kyuss, Queen of the
Stone Age) sur une autre superbe ballade, «
God Only knows ». Accompagné du batteur des Foo Fighters, ce morceau prend lui aussi une saveur encore plus émouvante quand on sait que Taylor Hawkins nous aura lui aussi quitté prématurément. Quand je vous disais que cet album aurait dû s’intituler
Immortal...
Randy Roads,
Randy Castillo, eux aussi s’en sont allés trop tôt, et eux aussi ont écrit quelques-unes des pages les plus glorieuses de la carrière solo du Madman. Quelle incroyable trajectoire, à la lumière de ces faits, et dont Ozzy aura définitivement déjoué tous les pronostiques.
Toujours au registre des invités, la présence de Maître
Iommi, lui aussi sur 2 titres, prouve d’abord que l’animosité entre lui et Ozzy est définitivement à conjuguer au passé, et c'est une joie.
Concernant l’un des ces 2 morceaux, « Degradation Rules », co-écrit par Robert Trujillo (
Metallica), bassiste déjà présent sur l’ensemble de
Down to Earth (2001) et très présent aussi sur cet album, il fait ici figure de pièce de choix tant la guitare de Tony
Iommi s’y montre vorace. A l’inverse, « No
Escape From Now » est, lui, beaucoup plus conventionnel dans sa structure. Trop estampillé
Black Sabbath dans sa progression, ce titre n’aurait nullement dépareillé sur le dernier album en date du Sabb’, le pourtant bien fadasse 13 (cette observation n’engageant évidemment que moi).
Qu’Eric Clapton n’ait pas décliné, comme Jimmy Page, l’invitation de papy Oz’, aura été la plus grande des surprises pour moi. Et si j’avoue que « One of Those Days » est lui aussi un excellent morceau, je ne suis pas certain que le guitariste soit parvenu à imprimer sa patte de la même manière que les autres intervenants.
Avant d’en terminer avec les éloges faites à ce disque, il serait injurieux de ma part de ne pas mentionner de la même manière tout le travail accompli par
Zakk Wylde ici. Le final de «
Nothing Feels Right » nous ramenant assez vite aux meilleurs souvenirs d’avec le guitariste par exemple.
En revanche, ce qui m’aura empêché d’accroître mon plaisir d’écoute, c’est cette manière de plus en plus fréquente qu’ont certains producteurs de compresser le son à outrance. Et comme toujours en pareil cas, c’est la batterie qui en pâtit.
Pas de quoi hurler au loup, bien sûr, mais avec une caisse claire autrement plus présente et des fréquences basses moins envahissantes, l’ensemble aurait incontestablement gagné en brillance et donc en dynamique. Je suis certain qu’avec un producteur du calibre de Mike Fraser ou un Brendan O’Brien aux commandes, l’album aurait sonné du feu de Dieu.
Autre point de détail : La pochette. Je sais bien que le support physique n’intéresse plus grand monde de nos jours, mais pour qui y demeure sensible, il serait bien qu’un vrai travail de présentation et d’esthétique soit à la hauteur d’une telle figure. Je parle ici de la version CD. Car en plus d’une illustration pour le moins anodine (banale), les quelques clichés qui agrémentent le livret nous montrent une fois encore les mêmes attitudes d’un Ozzy tour à tour martyre, rédempteur, diabolique, le regard halluciné ou le doigt sur la bouche. Bref, on patauge dans les mêmes systématiques clichés, et ça commence à devenir franchement lourdingue.
Reste que, si ce disque devait être son ultime œuvre,
Ozzy Osbourne pourrait s’en aller avec le sentiment d’un dernier acte franchement réussi, car, en tout honnêteté, on ne s’ennuie pas une seconde à l’écoute de cette heure de musique. N’est-ce pas là le principal ?
Je me demandais justement lequel j'allais me refaire, après le cataclysme de la nouvelle hier soir, et la journée de merde en y repensant constamment... Ça sera donc celui là. Au moins pour 'Mr Darkness', un super titre pour moi. J'me console en me disant qu'en arrivant là haut, Randy était là pour l'accueillir ;)
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