Lorsque j'ai écouté pour la première fois cet album, j'avoue avoir été clairement déçu. Après avoir adoré pour ne pas dire sublimé
Live and Dangerous,
Nightlife semblait bien « petit » et sans envergure. Même les super titres repris régulièrement en live par nos Irlandais "Still in Love With You" ou "Sha La La" ne bénéficiaient pas d'une production à la hauteur. Sans rentrer dans les détails, si l'on croise sur
Nightlife des moments de pur génie musical, comme les titres cités plus haut, il y a également des morceaux inaboutis, pour ne pas dire inutiles. Je pense à ce pseudo morceau vaguement country de même pas 2 minutes intitulé "
Banshee", sur lequel j’éviterai de revenir.
Cette œuvre est à l'image de ce que fait
Philip Lynott depuis qu’il a débuté sa carrière. L’artiste a une sensibilité hors du commun qui s'appuie sur des coups de génie et en même temps il fait parfois preuve d'une grande immaturité. Ce côté désinvolte se traduit par un professionnalisme qui peut sembler un peu aléatoire. On le sentait bien sur les deux premiers albums, faits de titres anciens pas toujours super travaillés. Mais, le groupe semblait avoir pris une voie bien plus sérieuse avec un très bon troisième opus. Mais voilà, avec le départ d'Éric Bell et l’arrivée de Brian Robertson et de Scott Gorham, la formation prend un nouveau départ. Pour trouver les deux nouveaux guitaristes, Lynott et Downey ont dû faire des dizaines d'auditions avant de trouver Brian Robertson qu'ils connaissaient déjà et Scott Gorham, un Américain perdu en Grande Bretagne car il avait caressé l'espoir de jouer avec Supertramp (apparemment un plan « foireux » d’un cousin).
Autre changement, le contrat avec Decca se termine et n'est pas renouvelé. Phil Lynott met un certain temps à trouver un nouveau label, ce qui sera fait avec Phonogram
Vertigo. Cette maison de disques leur permet de faire appel à Ron Nevison, connu pour avoir travaillé sur le premier album de
Bad Company et avec les Who. Très rapidement, c'est la déception, dans la nouvelle équipe de Lizzy. Nevison veut absolument adoucir le son au grand désarroi de Brian et de Scott dont c’est alors le premier opus. Il faut se replacer dans le contexte, même si
Thin Lizzy dégage de la puissance en live, ses premiers travaux sont loin d’avoir fait du groupe un pilier du hard-rock. Lynott n’a toujours pas choisi entre ses pulsions agressives et son goût pour les ballades sirupeuses. En plus, il aime ajouter dans sa musique du blues, des airs irlandais et même des sons qui évoquent la soul.
En fait, les extraits sont tellement cool qu’ils finissent par manquer de relief et surtout de puissance. C’est le cas de "
Night Life" dont le son est très adouci et un tantinet sirupeux avec ses violons, on croirait entendre un jazz pour salon d’hôtel, agréable mais pas très excitant. Dans le même esprit, on retrouve "Showdown", encore une ambiance jazzy avec des percussions à la Santana. Pour clore le côté, certes talentueux, mais un peu mou du genou de cette galette, on trouvera "
Dead Heart" et "Frankie Caroll", deux morceaux accompagnés au piano. Tous ces titres ont des mélodies plutôt sympas et les deux guitaristes font preuve de talent, mais leur manque de vigueur a tendance à plomber l'ensemble de l'album.
Mais on y trouve des choses intéressantes sur cette galette. Ainsi, avec le titre d’ouverture "She Knows", écrit par Gorham, d'entrée de jeu les guitares nous font la fête et montrent que le père Lynott a bien fait d’embaucher Robertson et Gorham. Puis il y a le très bon morceau irlandais qui préfigure le futur
Black Rose, "Philomena", dédié à la maman de notre bassiste. Le titre était sorti quelques mois avant en 45 tours. Quant à "It's Only
Money", c’est un bon morceau qui correspond davantage au côté hard du combo. Evidemment, l’autre morceau plus agressif est la démonstration de Brian Downey avec sa batterie sur "Sha La La" qui restera un des titres phares de Lizzy en live.
Enfin, il reste à évoquer "Still in Love With You" un des plus grands titres de Lynott. C'est le genre de chanson qui arrive à vous faire chialer d'émotion. Sur cette version, le solo de guitare est de
Gary Moore, Robertson n'a pas voulu le reprendre. D'ailleurs, on sent bien que Moore s'est appuyé sur ce travail quand il opérera son virage blues. Autre particularité, Lynott chante avec Frankie Miller, un copain de Robbo (pseudonyme de Robertson) qui a une voix très soul. Frankie Miller fera une carrière solo et travaillera plus tard avec de nombreux artistes dont à nouveau Robertson.
En conclusion, on a un album pas très bien produit, où l’enchaînement des titres n’est pas forcément bien réfléchi et ne permet pas de donner du punch à l’ensemble et, surtout, le son a été bien trop adouci. Mais par contre, il faut écouter ce sens incroyable de la mélodie et se laisser prendre par l’émotion. Phil Lynott qui a du génie nous a pondu des titres inoubliables.
Je ne doute pas un instant que tes commentaires sur la production étaient sourcés. Je me contentais seulement d'jouter mes impressions personnelles (qui ne vallent guère que pour moi) et ce que j'avais lu sur la mayonnaise un peu longue à prendre entre les deux guitaristes et le noyau dur de Lizzy
Encore une excellente chro, pleine d'infos intéressantes pour les passionés du groupe, merci.
La patte Lizzy commence à s'affirmer, notamment lors de ce magnifique "She knows" que tu as longuement évoqué.
Et puis, rien que pour la magie de « Still in love with you », comment ne pas avoir ce disque dans sa collection, impensable.
Je partage d'ailleurs complètement ton ressenti sur ce disque. Il n'y a comme l'ami Hibernatus que pour la prod' que je ne te suis pas. Perso, ce son des seventies me fait grave kiffer. Le son de la basse est un régal.
« Nightlife » n’est pas un album pour votre serviteur.
Trop calme, trop influencé par le blues et par les interminables ballades truffées d’arrangements, ce disque ne propose pas le tranchant du hard rock développé par Thin Lizzy durant la suite de sa carrière.
« Nighlife » contrairement à ce que laisserait supposer sa pochette aguicheuse, n’est donc pas un album félin et instinctif mais me paraît plutôt destiné aux amateurs de blues-rock à l’ancienne.
Déception donc pour moi !
Chronique complète sur mon blog : https://lediscoursdharnois.blogspot.com/2021/03/nightlife-thin-lizzy.html
Comme tous ceux qui ont découvert Thin Lizzy sur le tard (lorsqu’un vieux hibou me mît avec autorité Renegade entre les mains), je continue de remonter le temps avec ce groupe. Si de prime abord Nightlife m’a un peu déçu, le laisser reposer quelques mois à été salvateur car à l’heure d’aujourd’hui je suis conquis. Ce son bien rond, muy caliente, et cette ambiance cool de rue seventies, ah j’adore ! C’est vrai qu’il y a un petit côté Santana par moments, ce qui pour un fan du groupe est forcément une bonne chose. Et contrairement au commentateur propagandiste du dessus, je la trouve très à propos la pochette. Showdown, Sha La La, je la visualise cette panthère guettant les rues chaudes et crépusculaires de la ville. Un côté sexy et dangereux à la fois. Top !
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