Où est-il ? Où suis-je ? Que fais-je ici ? Dans ce dédale monstrueux et
Labyrinthique où la seule issue semble inéluctablement ma propre destruction.
La bête est prête à dévorer, lacérer les chairs et assassiner sauvagement mais non sans avoir préalablement chassé sa victime, la forçant à avoir peur, s’échapper, courir…espérer même parfois. Espérer pourvoir s’extirper de ce destin funeste sans y laisser la vie. Mais la créature ne laisse personne repartir de ses terres. Ce
Labyrinthe est son esprit, sa création et le symbole de sa puissance, de sa force et son intelligence. Sa bestialité n’a d’égale que sa cruauté et sa perspicacité. Le minotaure se rapproche et la fin avec lui…la mort.
La mythologie grecque est un vivier inépuisable d’idées conceptuelles pour offrir une métaphore de la puissance, de la destruction, d’un certain gigantisme gargantuesque qui aime lui-même se contempler (certes, de nombreux groupes musicaux y ont puisé des influences mais le cinéma et les jeux vidéo, comme "
God of
War" pour ne citer que lui, en sont également des exemples flagrants).
Fleshgod Apocalypse, dont la musique sied parfaitement à cette idée de démesure et de puissance écrasante et infiniment destructrice, s’attaque donc à ce mythe qu’est le minotaure et son fameux
Labyrinthe, dont les thèses explicatives sont diverses et variées. Les italiens vont d’ailleurs dans un sens aussi psychologique que mythologique, en voyant à travers ce
Labyrinthe la complexité d’un psyché complexe, bestial mais initié par un instinct sauvage et incontrôlable ne trouvant d’autres solutions que de tuer, inlassablement (à l’image de ce superbe artwork laissant entrevoir un
Labyrinthe à perte de vue).
Musicalement,
Fleshgod Apocalypse est tout autant devenu un monstre que la créature qu’il conte, notamment depuis la sortie de l’acclamée "
Agony", ayant créé une petite révolution dans la scène extrême il y a deux ans, bien qu’encore incomplet. Partant d’un death metal technique et ravageur sur "
Oracles" et "
Mafia", les italiens se sont embarqués dans une odyssée symphonique et outrancière en mêlant l’intensité paroxysmique du death metal à des symphonies renforçant la violence et la puissance quasi infinie du groupe pour un résultat foncièrement inédit, loin du rendu obscur d’un
Hollenthon ou ésotérique d’un Septic
Flesh. Les italiens voulaient être à la fois les plus extrêmes, rapides et symphoniques et ça s’entendait, tellement qu’un côté finalement brouillon ne pouvait que ressortir du disque, à force de matraquage ininterrompu et d’une trop grande similarité entre les compositions. Mais
Nuclear Blast ayant abattu un boulot incroyable, Fleshgod s’est retrouvé en tournée avec
Carach Angren et Septic
Flesh pour assouvir ses dessins et se découvrir à un public encore plus large. "
Labyrinth" doit donc se positionner comme l’album de la confirmation désormais.
"
Kingborn" ouvre admirablement l’album sur une mélopée mythologique qui nous plonge en quelques instants dans l’ambiance. Des bruits de pas, de porte qui se referme, des halètements...et puis des chœurs, beaucoup de chœurs ainsi qu’une première ligne de piano et un blast beat frénétique accueillant l’auditeur après deux petites minutes. Les éléments de base sont là et on reconnait donc
Fleshgod Apocalypse en quelques instants, sans présentation préalable.
La première chose qui saute aux oreilles, c’est la qualité incontestable de la production, plus claire et précise, qui permet enfin de discerner la totalité des éléments de la musique sans avoir l’impression d’entendre un amas d’instruments sous forme de capharnaüm imbuvable (ce que devenait parfois "
Agony", il faut l’admettre). La seconde chose, c’est que l’intégration de Ferrini au line up officiel lui a conféré une place encore plus importante car on remarque dès le début que les chœurs et les claviers vont être encore plus présents et clairement plus importants que les guitares. Si les symphonies servaient surtout à renforcer la puissance sur l’opus précédent, elles sont ici complètement indépendantes, bien plus variées et surtout l’intégration massif de chœurs liturgiques ou d’envolées féminines apportent une dimension épique encore plus forte et mature. Concernant les vocaux, les changements sont minces puisque le chant death est toujours aussi dogmatique et impitoyable tandis que les vocaux clairs, bien que toujours approximatifs apportent une couleur parfois démentielle et schizophrénique incroyable à la musique.
Certes, "
Labyrinth" possède toujours une rapidité d’exécution incroyable mais il faut tout de même souligner la plus grande présence de mid-tempo, permettant justement de placer les chœurs et les claviers au centre des débats. "
Minotaur (The Wrath Of
Poseidon)" par exemple, s’ouvre sur une ligne de piano pour ensuite placer un riff relativement lent et lourd pour justement imposer un tempo plus posé ne faisant que rendre la musique plus imposante et massive. Le groupe a compris que la puissance et les ambiances ne passaient que par la rapidité, et le (relatif) tempo plus lent permet de créer des ambiances beaucoup plus malsaines et grandioses, à l’image de l’énorme "Towards The Sun", tourmenté et glauque tel une âme en peine perdue dans les limbes de ce
Labyrinthe infini (bien que le groupe retrouve ses habitudes sur la seconde partie du disque).
Certes, on trouvera des réminiscences du passé avec par exemple "
Elegy" qui se veut très proche d’"
Agony" (ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le groupe l’a dévoilé en premier). Néanmoins, là encore, malgré une rapidité exaspérante, la clarté de la production permet de ne pas sombrer dans l’assemblage de couches presque vomitif pour que l’on puisse entendre autant les riffs que les symphonies de manière distincte (paix à l’âme en revanche de la basse de Rossi, définitivement inaudible dans cette extase musicale).
On ne pourra que s’incliner devant une composition du calibre d’"Under Black Sails", épique et jusqu’au-boutiste, débutant sur un superbe chorus de guitare et un rythme martial initié par Poali à la caisse claire. Les lignes vocales s’entremêlent à la perfection, entre la furie extrémiste du death et le clair tourmenté mais néanmoins hurlé, le tout sur un riff écrasant au possible et une partie symphonie magistrale et pleine de subtilité parfois proche d’un Howard Shore dans l’esprit. Des soli très mélodiques, permettant de respirer, aère magnifiquement le titre pour démontrer la qualité avant tout de composition des italiens (cette partie de gratte à six minutes en tremolo pic
King est juste géniale) qui, au bout de ce périple de sept minutes, placent une pointe mélancolique de finesse avant le final acoustique éponyme.
Il est certes difficile, au début, de dissocier l’ensemble des titres les uns des autres (en sachant que pas mal se suivent) mais certains ressortent de manière flagrante par des riffs inspirés, tels que "The
Fall os Asterion", peut-être le meilleur titre de l’album, avec un côté très fluide dans les guitares qui évoquent parfois un peu de shred.
"
Labyrinth" s’impose comme l’une des sorties majeures du style, sinon de l’année. Il dresse le portrait d’un
Fleshgod Apocalypse désormais à maturité, certain de sa force et prêt à prendre une ampleur supplémentaire. Les italiens vont là où encore personne n’a réellement posé les pieds, défrichant les vastes contrées d’un brutal death symphonique et épique encore vierges. Les derniers espoirs d’un retour aux débuts sont définitivement annihilés, le groupe imposant son nouveau visage avec autorité et brutalité. Sans être encore parfait de bout en bout, "
Labyrinth" marquera probablement la scène comme rarement, comme une porte vers une nouvelle ère, ouvrant une brèche qui ne devrait faire que s’agrandir dans les mois à venir…
Le peu que j'ai écouté (c'est à dire les titres postés) le rapprochement avec Moon in the Scorpio est franchement artificiel. Les norvégiens arrivent à marier sans problème les deux (quoique les claviers dominent) mais on ENTEND les autres instruments. Là ça fait gros bordel sonore par moments et on peine à entendre et apprécier (enfin je parle pour moi).
Je vais rester aussi aux précédents et Agony sans être mauvais ne m'avait pas convaincu plus que ça lors de sa sortie.
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