Je pense ne pas avoir besoin de présenter ce groupe, mais faisons un rapide récapitulatif pour ceux ayant vécu dans une grotte les 4 dernières années.
Fleshgod Apocalypse officie comme le petit frère spirituel de
Hour Of Penance, les deux partis ayant eu des membres en commun à travers le temps. Ces italiens couillus et férus de
Brutal Death
Metal et de musique classique nous ont déjà démontré l'étendu de leur talent avec leur premier effort, j'ai nommé l'excellentissime
Oracles. Accueilli par la critique comme "le renouveau du Death
Metal" (en s'octroyant au passage un joli score moyen de 88% sur les
Metal Archives), le groupe s'est très rapidement fait un nom et demeure actuellement, avec ses 4 ans d'existence au compteur, une référence en matière de Bru-Tech Death
Metal. Mais après un album mêlant si bien musique classique et Death technique, le groupe peut-il encore se renouveler ? On va voir ça tout de suite avec leur dernière galette,
Agony.
C'est sur une intro planante que débute cet album. Plutôt inquiétante au fur et à mesure que les secondes s'écoulent, une mélodie se dessine peu à peu, s'accentuant, se développant... La première minute passée, l'intro prend alors une forme plus "conventionnelle" si je puis dire, plus rythmée, et gagnant significativement en puissance après 1:30, pour finalement rentrer dans le vif du sujet : "Temptation" s'arrête et laisse place à la première dose de brutalité qu'offre l'album avec "The
Hypocrisy". Et là, on comprend instantanément cette idée de "renouveau du Death
Metal".
Car en effet, quel que soit le style de musique que l'on écoute, on ne peut PAS enlever à
Fleshgod Apocalypse cet indéniable talent à innover. Alors que le premier album se contentait plus ou moins de regrouper des "influences" classiques (à travers les monstrueux solis notamment),
Agony est tout simplement la suite logique de leur EP
Mafia sorti en 2010 : les violons et divers autres arrangements classiques côtoient désormais directement la musique, en addition d'une voix claire (exercée par Paolo Rossi, tenant aussi la basse). C'est donc de cette manière que "The
Hypocrisy" nous inflige dès les premières secondes une baffe monumentale : un riff épique au possible, d'une puissance redoutable, doublé par des cordes & vents grandioses (les fameux arrangements orchestraux), le tout sur fond de blast beats furieux et surplombé par un hurlement en growl intense et dévastateur.
Voilà : 2 minutes. C'est, grosso-modo, le temps qu'il aura fallu à ces cinglés pour nous foutre une branlée magistrale. Et pourtant, il reste plus de 3/4 d'heure de violence à déguster. A ce premier assaut sonore succède "The Imposition" et son démarrage en grande pompe sur une imposante mélodie privilégiant l'orchestral, avant de nous laisser à nouveau sombrer dans la folie brutale et sans concession que ces italiens talentueux savent si bien mettre en œuvre. La voix clean se mêlera par la suite à la voix growl dans un sublime pas de 2, avant d'enchainer sur un solo d'une mélodie démentielle, hérissant les poils sur la nuque. Puis les Italiens de reprendre de plus belle dans la violence pure issue du mélange Death
Metal/instruments classique, que ces gars semblent maîtriser à un niveau proche de la perfection. Les pistes s'enchainent, chacune laissant son lot de surprises. Tantôt malsaine, tantôt désespérée, parfois mélancolique, bien souvent épique, l'ambiance va constamment changer, pour notre plus grand plaisir. Mais attention, les changements en question seront parfaitement réalisés : pas de coupure brusque totalement dépourvue de sens. Chaque riff amène le suivant, guidant l'auditeur dans ce voyage dans le temps, mêlant l'époque classique pure et simple au Death
Metal à la technicité poussée à l'extrême comme on le connait de nos jours.
Survient le rythme martial au milieu de "The Deceit", ayant pris la place d'un passage ponctuée par une voix clean, que l'on retrouvera par la suite, avant de nous laisser sur une courte pause sous la forme d'un autre arrangement (uniquement) orchestral. La montée en puissance de l'arrangement ne se fait pas attendre, avant de nous replonger dans la brutalité avec "The
Violation", reprenant le principe du riff particulièrement épique couplé aux instruments classiques pour accentuer ce penchant, à l'instar de "The
Hypocrisy". La voix clean refait une apparition solo très impressionnante, couvrant plusieurs octaves sans perdre de puissance, pour finalement nous laisser arriver sur "The Egoism" et ses airs de fin du monde. Les blast beats sont (partiellement) laissés de côté pour cette piste, au profit d'une double pédale fournie participant énormément à l'ambiance dans cette musique, accompagnée de riffs très mélodiques. On sent s'installer une certaine mélancolie, particulièrement appuyée par l'apparition d'une voix féminine très haut perchée, renforçant cette sensation d'apocalypse de par son timbre et sa puissance. "The
Betrayal" démarre sur un riff mêlant mélancolie et espoir fou, à nouveau surplombé par les blasts de Francesco Paoli, ne faiblissant pas d'un pouce. Cette musique donne l'impression d'un affrontement entre 2 entités de puissance égale, vouées à l'éternité par le fait. La terreur et la violence se côtoient admirablement bien, appuyés par les violons, qui exerceront parfois un semblant de précipitation par l'utilisation de croches multiples à haut tempo, installant une ambiance de suspense et d'inquiétude, laissant planer le doute... avant de terminer sur un autre passage orchestral, ce dernier nous menant à "The Forsa
King", piste portant décidément très bien son nom. Le piano de Francesco Ferrini se démarque particulièrement dans cette musique, et prend la tête des autres instruments, qui le suivront à travers l'épopée mélancolique -à la limite du désespoir- qu'il mènera. La double pédale ponctue tout cela de manière délicate (si je puis dire), à travers une des pistes les plus lentes de l'album.
Le mot d'ordre ici est clairement de décélérer un peu la machine et de reprendre ne serait-ce qu'un tout petit peu son souffle, malgré la magnificence de la mélodie principale et la violence encore bien présente. Quelques soli ici et là se démarqueront de par leur aspect mélancolique à souhait, là aussi, renforçant l'ambiance générale. Une outro au piano assez triste se fait entendre, avant de repartir sur du bourrinage intensif avec l'avant-dernière piste de l'album, "The
Oppression", faisant office d'affrontement final, "le dernier souffle avant la mort". Le principe ici est de faire en sorte que les arrangements orchestraux soient réalisés de manière très éclectique : tantôt suivant les guitares, tantôt ponctuant brutalement la musique, voire même juste derrière un solo pour donner l'apparence d'une suite dans un registre différent (au piano). La voix clean se fait de nouveau très présente, assombrie ici et là par des growls succincts, mais puissants et fermes. La title-track de l'album se fait finalement entendre, sous la forme d'une mélodie jouée au piano, sur un rythme parfois proche de la marche funèbre. Mais les notes s'envolent aussi dans d'émouvantes sonorités, diverses et variées, que l'on laissera glisser avec délectation jusqu'au plus profond de notre être...
La diversification extrêmement poussée de cet album en fait un chef-d’œuvre d'une complexité impressionnante. La virtuosité de chaque membre est d'ailleurs bien réelle. Les guitares se veulent incisives et puissantes, couvrant un large panel de styles et de registres, nous abreuvant de mélodies magnifiques; de riffs brutaux et rentre-dedans, tantôt rapides et furieux, tantôt pesants et puissants, dépourvus de toute forme de compromis; sans oublier bien sûr, les solis monstrueux ! La basse, en revanche, se fait plus discrète. Le véritable barrage de son provoqué par les guitares à l'unisson et la double pédale quasi-constante bloquent en partie les sonorités graves de la basse, qui n'en restera pas indiscernable pour autant, prenant de l'ampleur lors des solos, appuyant par sa présence la rythmique de façon très appréciable. La batterie reste fidèle à elle-même, à la différence près que Francesco Paoli s'est ENCORE amélioré. Ce gars est un monstre, tout simplement : chanteur à la base, il a appris à jouer de la batterie, et en joue actuellement depuis environ... 3 ans. Une capacité d'adaptation et d'assimilation pareille est tout simplement surhumaine.
Je vois d'ici certains arriver et gueuler que ce ne sont que des conneries... et bien, je ne pense pas. Étant moi-même batteur et les ayant vu en live, j'ai assisté à l'échauffement de Francesco. Il entrainait ses poignets grâce à des roulements rapides, mais semblait avoir les difficultés que rencontre un batteur pas trop expérimenté : multiples heurs dans les cerclages, double pédale pas forcément très régulière, perte de puissance... Il semblait par ailleurs beaucoup souffrir durant le set du groupe (même si les erreurs précédemment citées se faisaient beaucoup, beaucoup moins fréquentes), trahissant une grande fatigue et des difficultés à tenir la longueur; bref, je pense sincèrement que ce gars n'en est encore qu'à ses "débuts" sur la batterie. Ce qui n'en fait pas moins un excellent batteur (les rythmes de
Fleshgod Apocalypse sont particulièrement pointus et compliqués, mais aussi et surtout d'une très grande rapidité), qui sait se donner à fond malgré quelques petites erreurs ici et là en live, en comparaison de la quasi-perfection de son jeu sur album.
La voix growl reste ce qu'elle est : puissante, mais aussi relativement audible, ce que j'apprécie beaucoup. La voix claire fera sans doute grincer des dents certains, mais pour ma part, cette envolée harmonieuse ne sera que bénéfique à la musique, tant son apparition se fera de façon intelligente et ponctuelle. Car même si je déplorais cet ajout au début, je dois bien avouer que l'on s'y fait vite, et qu'on y trouve même finalement du charme. Les arrangements orchestraux se veulent grandioses et se couplent parfaitement bien à la musique du groupe. Voilà tout ce qui fait de
Fleshgod Apocalypse un groupe si novateur et surprenant, ce dont peu de groupes actuels peuvent se targuer de nos jours.
Agony est un véritable monument érigé à l'éclectisme. 50 minutes seront amplement suffisantes au groupe pour démontrer l'étendu de son talent et de ses capacités (malgré le fait que je ne disposais pas de la musique bonus, à savoir leur reprise de "Heartwork" (
Carcass), à laquelle j'aurai aimé jeter une oreille tant leur précédente reprise ("Blinded By Fear", par
At The Gates) était géniale). J'avoue que l'arrivée de cet album me laissait perplexe, et l'artwork de la pochette n'a fait qu'accentuer mon appréhension (celle-ci rappelant malheureusement je-ne-sais quel énième groupe de
Deathcore, en plus d'une simplification grossière et très décevante du logo du groupe, auparavant superbe et désormais d'une simplicité désespérante, sans aucune spécificité). En effet, je me disais "bordel mais comment ils vont réussir à reproduire un album d'une qualité similaire à
Oracles???". Bah comme ça... A écouter de toute urgence.
NOTE : 18/20
Pour moi, quand c'est plein de blasts, de voix très criardes et d'orchestration, cela s'appelle du black sympho ;)
Même si on le mélange avec du death.
Et c'est tant mieux, j'adore les mélanges depuis que j'écoute du métal (joke inside).
Je comprend finalement le problème (et c'est toujours le même).
Les puristes death sont déçus parce que c'est pas seulement du death.
Et les puristes black sont déçus car il y a des pépites de death dedans.
Je ne dit pas que tout ceux qui sont déçus sont des puristes, mais beaucoup en sont.Je suis juste un fan de métal, quelle que soit sa teinte et là, je viens d'apprécier "The Hypocrisy".
Ce qui ne m'empêche pas de trouver l'orchestration un peu trop envahissante aussi.
Mais je sais ce que c'est de mixer un album, et c'est VRAIMENT dur de rentrer un orchestre dans un mix aussi dense que du métal.
On est pas dans la pop ou le jazz, là ;)
J'adore.
Black/death/sympho...ou pas, cela n'est pas important finalement.
Merci pour la kro ;)
"Death Sympho...je suis assez dubitatif sur le terme. Pour moi, quand c'est plein de blasts, de voix très criardes et d'orchestration, cela s'appelle du black sympho ;)"
Donc du Death avec des orchestrations, c'est quand même du Black Sympho ? Je ne suis pas sûr de suivre ton raisonnement, là... C'est un peu comme dire que les fraises à la chantilly sont des framboises, non ?
Je m'avance peut-être, mais je pense qu'il y a plus de blasts dans le Death que dans le Black, en moyenne. En outre, ici, il s'agit de Death growls, donc je ne vois pas le rapport direct avec le Black...
Dans le monde du Sympho, il y a une sacrée tripotée de groupes jouant du Black/Death (notamment en Pologne). Mais quand on a un album comme "Agony" où il y a du Death partout, je vois mal comment on pourrait parler de Black Sympho, désolé.
Concernant, l'album en lui même bah ça envoie, c'est efficace, les mélodies symphonique aèrent l'ensemble. Pour ma part je trouve ça tout à fait agréable.
Après j'ai tout de même quelques réserves, la prod déjà, l'ajout d'un tel orchestre synthétique se fait évidement au détriment des guitares, et on perd leur sons incisif, massif, presque organique qu'elles avaient sur "Oracle". Ensuite l'adjectif "technique": je le trouve un poil usurpé, évidement les guitaristes sont loin d'être des manchots, le batteur va à une vitesse inhumaine (encore que ce ne soit pas un gage de technicité). mais ça n'a pas du tout cet aspect,qui selon moi, caractérise le death technique, d'une abondance de note qui part dans tout les sens, de soli incessant etc, mais cela ne remet pas en cause la musique. Après il y a l'ajout de voix claire qui tranche, à mon sens trop.
Pour finir, il ya de grande chance que tout ça soit une démarche commerciale du groupe (ya qu'à voir le nombre de nouveaux fans parmi les commentaires^^), et je vais pas répetez les autres arguments qui ont été donné au dessus. Reste que comme bien d'autre groupes d'autre taxé de "commercial", il y a toujours cet argument: le créneau dans lequel officie Fleshgod Apocalypse n'est pas et, de loin, commercial.
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire