Message a été reçu par le prolifique combo transalpin de nous livrer son premier opus de longue durée, appelé de leurs vœux par tant de fans de la première heure. Avec deux fringants EP («
Celestial Angels » (2008) ; «
Nova Vita » (
2012)) et un vibrant single («
My Vampire » (2013)) au compteur, le collectif turinois souhaite dorénavant valoriser son background, affûtant dès lors ses compositions et affinant le trait de sa plume. Mû par un vent d'inspiration renouvelé, la troupe concoctera un an plus tard les 11 pistes arborant son premier et présent album full length «
Impressions » ; une galette généreuse de ses 57 minutes signée, pour la première fois, chez le puissant label italien
Fuel Records. Indice révélateur d'une sérieuse envie d'en découdre de la part de nos acolytes, ces derniers caressant désormais le légitime espoir d'accéder au rang de valeur montante d'un registre metal si couru par ses homologues...
Après la sortie de son second EP, le groupe procédera à une légère modification de son line-up, celui-ci comptant désormais dans ses rangs : Carol (dite ''
Evelyn Moon''), en qualité de frontwoman ; Denis Tucci (dit ''
Hydra''), aux growls ; Danilo Molatieri (dit ''
Lord of
Destruction''), à la guitare rythmique ; Richard, au piano, aux growls et aux choeurs ; Ivan Conti (dit ''
Ian''), aux claviers ; Irene Assenzi (dite ''Violet''), à la basse et aux choeurs ; Mattia Rubino (dit ''Matt''), en remplacement de Flavio Carboni, à la batterie. Fidèle à ses fondamentaux, le valeureux septet ainsi constitué nous livre une œuvre metal symphonique gothique et progressif, un tantinet complexe, jouissant de fines nuances mélodiques et d'une ingénierie du son plutôt soignée, dans la veine de
Therion,
Nightwish,
Rhapsody Of Fire,
Aesma Daeva, et
Theatre Of Tragedy. Embarquons sans plus attendre à bord du paquebot, pour une croisière au long cours...
Contrairement à nombre de ses pairs, le combo piémontais a fait la part belle aux pièces en actes symphonico-progressives. Un exercice de style techniquement exigeant, souvent redouté par ses concurrents, mais parfaitement assumé et mis à l'honneur par nos compères. Ainsi, passé l'intrigante, brève et somme toute dispensable entame instrumentale « Il Palcoscenico della Mente », la luxuriante, théâtrale et ''therionienne'' fresque « Blade's
Kiss » prend le relais, déroulant fièrement ses 9:10 minutes d'un spectacle volontiers épique, au caractère opératique et un brin romanesque. Déversant de complexes harmoniques, feignant alors de nous désarçonner, le dantesque propos glisse parallèlement sur un sillon mélodique certes peu couru mais qui jamais ne s'affadit ou ne tombe dans la caricature. Mis en exergue par les grisantes envolées lyriques de la mezzo-soprano, le tumultueux et pimpant méfait prend alors toutes ses lettres de noblesse.
Dans cette mouvance, on ne saurait éluder l'orgiaque, éclectique et ''rhapsodien'' « The Battle » qui, au fil de ses quelque 13 minutes, multiplie les effets de contraste rythmique tout en conservant une invitante ligne mélodique et de délicats arpèges au piano. Dans ce champ de turbulences, les limpides inflexions de la belle viennent en contre-point des growls caverneux d'une bête acariâtre. Et la sauce prend, in fine. Dans cette lignée, on ne sera guère moins magnétisé par les seyantes séries de notes inhérentes à « To Be Or... to Be », fresque mélodico-symphonico-progressive aux relents jazzy où de suaves gammes au piano ondulent parallèlement à ses nombreuses variations rythmiques. Histoire de varier ses effets, c'est à un duo mixte en voix claires et en parfaite osmose que l'on a à faire, les cristallines patines de la déesse répondant en écho aux fluides modulations de son alter ego. Sur un même modus operandi mais aux harmoniques un poil plus insaisissables, le ''therionien'' «
Monsters », quant à lui, laisse entrevoir un improbable mais chatoyant bandonéon au beau milieu de la tourmente, offrant ainsi un brin de sensualité à une pièce proprement opératique.
Lorsque l'atmosphère s'obscurcit, nos compères se plaisent à nous bringuebaler, au risque, parfois, de déconcerter un tympan non averti. Ainsi, au carrefour de
Theatre Of Tragedy et
Tristania, l'impulsif «
Lost Soul » nous immerge au cœur d'une gorgonesque et bourbeuse mare d'où semblent se mouvoir d'anxiogènes créatures. Egalement calée sur le schéma oratoire de la Belle et la Bête et recelant de stupéfiantes montées en puissance du dispositif instrumental, cette tonique et lugubre piste metal symphonique aux relents dark gothique interpelle autant qu'elle glace les sangs, nous intimant dès lors, un peu malgré nous, d'y revenir pour en saisir toute la teneur argumentative.
Quand ils nous mènent en des espaces ouatés, nos acolytes nous livrent leurs mots bleus les plus sensibles, mots que ne saurait éluder l'aficionado du genre intimiste. Ainsi, à mi-chemin entre
Nightwish,
Therion et
Aesma Daeva, « Il Lamento Della Ninfa » se pose telle une ballade opératique et progressive, romantique jusqu'au bout des ongles. Mise en habits de soie par les angéliques et frissonnantes modulations de la maîtresse de cérémonie, corroborée de gammes au piano pétries d'élégance, se doublant d'une sente mélodique d'une confondante fluidité et d'une soudaine et grisante montée en régime du convoi orchestral, la tendre aubade aurait les armes requises pour faire plier l'échine à plus d'une âme rétive.
A l'issue de notre parcours, force est d'observer que le combo italien a élevé le niveau de ses exigences d'un cran sur les plans technique et mélodique, témoignant, en prime, d'une production d'ensemble difficile à prendre en défaut. Si cette offrande jouit d'enchaînements intra pistes sécurisés et s'avère plutôt agréable, elle accuse toutefois d'incompressibles longueurs et ne concède que peu de prises de risques. Encore imprégnés du sceau de leurs maîtres inspirateurs, nos acolytes devront toutefois les digérer suffisamment pour permettre à leur projet de gagner en épaisseur artistique et en personnalité.
Au demeurant finement esquissée et interprétée, cette œuvre demeure en proie à un certain déséquilibre compositionnel, d'amples pièces en actes alternant trop souvent avec de menus et dispensables instrumentaux («
Aevum », « Intermezzo » et « Impressioni », notamment). Ayant pourtant veillé à varier ses atmosphères, ses joutes oratoires comme son jeu rythmique, le septet transalpin s'est effectivement ingénié à délivrer de foisonnantes et complexes offrandes au détriment de pistes plus immédiatement assimilables. Aussi, sept ans après sa sortie de terre, le collectif italien signe un message musical d'envergure et globalement bien inspiré, mais émaillé d'inaliénables bémols altérant d'autant sa portée, faisant de lui un espoir, pas encore une valeur montante de ce registre metal. Peut-être à l'aune d'un second album full length ?...
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