« C’était le reflet vampirique de la pourriture, des temps disparus et de la désolation ; le phantasme, putride et gras d’égouttures, d’une révélation pernicieuse dont la terre pitoyable aurait dû pour toujours masquer l’apparence nue. Dieu sait que cette chose n’était pas de ce monde – ou n’était plus de ce monde – et pourtant au sein de mon effroi, je pus reconnaître dans sa matière rongée, rognée, où transparaissent des os, comme un grotesque et ricanant travesti de la forme humaine. Il y avait dans cet appareil pourrissant et décomposé, une sorte de qualité innommable qui me glaça encore plus » (H.P Lovecraft)
Cette citation se situe comme la métaphore littéraire d’une entité comme
Sunn O))). La création de Stephen O’Malley et de Greg Anderson est comparable aux visions asociales et misanthropes de l’écrivain où l’inavouable prend forme donnant autant un sentiment de révulsion que de fascination. Cette chose d’un état autre et dont l’apparence opaque se verra masquer, dénigrer par certains et adulé par d’autres en est l’essence même de son aura mystérieuse.
Sunn O))) empoigne là, dans un confluent de répugnance et d’hypnotisme, ce qui fait naître la peur dans sa forme la plus primaire et volcanique. Magma insignifiant et terrifiant de distorsions sonores, «
Flight of the Behemoth » peut être pris comme l’album le plus cacophonique de
Sunn O))). Cacophoniques et provocatrices, oui, car en plus d’immerger l’auditeur dans ses méandres typiquement « drone », les deux comparses injectent dans leurs « compositions » des relents indus bruitistes à base de samples de chantiers rendant ainsi la globalité de ce disque beaucoup plus tranchant où semblent percées de discrètes et énigmatiques pulsations tirant vers la démence sonore.
Un final où se mêlent une voix rauque, profonde et incompréhensible semblant venir d’un enfer cosmique donne naissance à ce
Behemoth, sortant de sa cage invisible, monstrueuse incarnation d’une frayeur que l’on n’ose à peine nommer.
C’est cela l’énergie et le souffle désolant de
Sunn O))), la création d’une entité incontrôlable mais miraculeusement maîtrisée dans sa forme, une vision cauchemardesque où le fait d’entendre un enchaînement de sons devient une expérience tactile soufflant et nous engouffrant dans les abysses immatérielles qui ne demandent qu’à surgir, telle une hantise.
Plus qu’un disque, plus qu’une expérience, «
Flight of the Behemoth » est une lamentation, une incantation oubliée.
« N’gai, n’gha’ghaa, bugg-shoggog, y’hah…
Yog-
Sothoth…
Yog-Shototh… »
Jdois dire que Flight Of The Behemoth est leur meilleur album (si c'est reellement un album !) !
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